Un virage Web dans l'urgence
Face à la pandémie, des producteurs éprouvés par les mesures de distanciation se sont tournés « sur un 10 cents » vers les sites Web transactionnels. Les ventes semblent au rendez-vous, comme pour la fromagère Caroline Tardif. Mais ce virage n’est pas facile pour tous.
En pleine crise de la COVID-19, de nombreux producteurs et commerçants se sont rapidement organisés pour traiter avec les clients sur le Web. Si plusieurs ont flairé la bonne affaire, tout n’est pas rose avec le système D pour lequel ils ont opté.
Dès le début de cette nouvelle ère de distanciation sociale, plusieurs producteurs agricoles se sont tournés vers de nouvelles avenues transactionnelles et ont ainsi contribué à l’explosion des plateformes d’achats et boutiques en ligne sur le Web.
Ils ont senti que leur survie en dépendait.
Ainsi, bien avant que le ministère de l’Agriculture (MAPAQ) octroie une aide de 50 000 $ à l’Association des marchés publics du Québec pour lancer son site transactionnel le
16 mai, le président du Marché public de Granby et région, Dominic Châtelain, avait déjà parti le bal à la mi-mars.
« On ne pouvait pas attendre que le gouvernement nous aide. On s’est pris en main… il fallait agir », lance celui qui est aussi éleveur ovin à Roxton Falls, en Montérégie. Ce dernier avait réussi à réunir une quinzaine de producteurs en trois jours et aujourd’hui, ils sont 26 entrepreneurs agricoles à vendre leurs produits du terroir par l’entremise de leur nouveau site Web transactionnel. Et les ventes sont définitivement au rendez-vous.
Les clients payent leurs commandes via le site, puis ils se rendent au point de cueillette les vendredis et samedis. On y offre le service à l’auto. « Au début de la crise, on avait peur pour nos ventes. […] Mais finalement, ça a créé un mouvement social. L’argent reste dans la région », e estime stime Dominic Châtelain. La produc- r roductrice maraîchère Annie Pion, io on, de la Ferme des 3 clefs, s’est jointe in nte au projet de ce marché public, c , mais aussi au populaire marché é d’alimentation en ligne Maturin, n , environ un mois avant le début ut t de la crise. Dans les deux cas, quand anda on lui a proposé ces nouvelles f façons de vendre ses cultures en s serre, erre, Mme Pion n’a pas pris le temps m mps de réfléchir. « Dans la vie, ie e, il faut être capable de se revirer sur un 1 10 cents. Et c’est ce que j’ai fait! Je n’ai pa pas as eu peur d’embarquer dans le train. »
De petites épiceries
À Mercier, la propriétaire de la Fromagerie ma agerie Ruban bleu, Caroline Tardif, a profité fité éd de l’expertise d’une nouvelle employée, Lydia, pour lancer sa boutique en ligne. Un projet qu’elle repoussait constamment, jusqu’à ce que la crise éclate. «Elle [Lydia] a carrément sauvé l’entreprise. Toute seule, je n’aurais jamais pu faire ça », admet-elle, sans détour.
Afin de limiter les risques de contagion au sein de sa petite équipe, l’entrepreneure a fermé ses deux boutiques en mars; celle de la chèvrerie et l’autre basée à Châteauguay. Elle a dès lors enregistré des pertes de revenus de 25 %. Mais au cours du mois d’avril, ses baisses ont été limitées à 15 % avec sa boutique en ligne. Et en plus de vendre ses fromages, yogourts, petits fruits et pots de miel, elle distribue maintenant les produits d’une dizaine d’agriculteurs de sa région qui sont venus « cogner à sa porte ».
Chaque semaine, Caroline Tardif assure donc la livraison des paniers fermiers et tous les produits de sa petite épicerie locale. Marie-Chantal Houde, de la Fromagerie Nouvelle-France de Racine, a elle aussi lancé sa boutique en ligne en un temps record. Pour sa part, c’était surtout pour stopper l’hémorragie provoquée par le ralentissement du secteur des HRI (hôtellerie, restauration et institutions), qu’elle desservait principalement avant la crise.
Le distributeur de fruits et légumes frais Hector Larrivée, à Montréal, a également épousé ce concept d’épicerie en ligne pour le grand public, il y a environ un mois. « On a perdu 85 % de notre corebusiness [coeur de nos affaires] avec les restaurants et on avait beaucoup de produits en entrepôt, indique la gestionnaire Jessica Larrivée. Ça a commencé par un point de cueillette pour des paniers et maintenant, on fait la livraison. C’est devenu plus gros qu’on pensait », témoigne-t-elle.
« Dans la vie, il faut être capable de se revirer sur un 10 cents. Je n’ai pas eu peur d’embarquer dans le train. » – Annie Pion, productrice maraîchère