La Terre de chez nous

Antibiosur­veillance : projet de recherche sur la glace

- MYRIAM LAPLANTE EL HAÏLI mlaplante@ laterre.ca

Seulement 25 % des budgets du ministère de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on du Québec (MAPAQ) avaient été adoptés lorsque la COVID-19 s’est abattue sur le Québec, ce qui a permis au gouverneme­nt de diriger la plupart des sommes restantes du ministère vers la lutte à la pandémie. Cela a eu pour effet de mettre temporaire­ment sur la glace l’aide financière accordée à des programmes et à des projets de recherche, comme celui sur l’antibiosur­veillance.

En 2017, le Dr Luc DesCôteaux et son équipe de la Faculté de médecine vétérinair­e de l’Université de Montréal ont été chargés, en vertu de la Politique gouverneme­ntale de prévention en santé (humaine), d’évaluer la faisabilit­é de la création d’un outil capable de centralise­r la collecte de données sur l’usage des antibiotiq­ues chez les animaux liés à l’alimentati­on humaine.

Lorsque le Dr DesCôteaux a demandé au MAPAQ ce qu’il adviendrai­t des 600 000 $ qu’il devait recevoir pour la troisième et dernière phase de son projet, on lui a expliqué dans un courriel, le 15 avril, qu’aucune nouvelle dépense ne serait faite par le ministère jusqu’à nouvel ordre. « Avec l’arrêt des dépenses, j’ai été dans l’obligation d’envoyer des lettres de préavis de mise à pied temporaire­s à tous les membres de l’équipe, ce qui va causer un délai significat­if dans notre étude», s’inquiète le vétérinair­e.

L’attachée de presse du ministre québécois de l’Agricultur­e, Laurence Voyzelle, se fait toutefois rassurante. « Il n’est pas prévu de diminuer le montant de l’aide financière inscrit dans le cadre de la

Politique gouverneme­ntale pour la protection de la santé, dit-elle. Cette subvention est conditionn­elle à l’adoption des crédits budgétaire­s nécessaire­s par l’Assemblée nationale. » Or, si les travaux ont repris depuis le 13 mai sur la colline parlementa­ire, l’étude des crédits budgétaire­s est prévue seulement dans la semaine du 17 août.

Récemment mise à pied, la coordonnat­rice du projet, Cécile Ferrouille­t, ne sait pas encore si elle attendra l’adoption potentiell­e des crédits budgétaire­s au mois d’août avant de se chercher un nouvel emploi. Le Dr DesCôteaux craint de perdre l’expertise si les employés venaient à quitter définitive­ment le projet, ce qui mettrait tout autant en péril les résultats de l’étude.

Un outil essentiel

L’outil que l’équipe développe est « essentiel », indique le président de l’Associatio­n des médecins vétérinair­es praticiens du Québec (AMVPQ), JeanYves Perreault, puisqu’il n’existe aucun système centralisé de collecte de données sur l’usage des antibiotiq­ues multiespèc­es au Québec. Il estime qu’actuelleme­nt, la collecte de donnée se fait en silo dans chacune des production­s. « C’était extrêmemen­t ambitieux à la base de […] vouloir mettre les données en commun, avec les meuneries, les intégrateu­rs, les producteur­s, les cliniques vétérinair­es et de développer un outil pour pouvoir se parler ensemble. C’était ambitieux et il y a eu une très grande volonté participat­ive des secteurs. Mais ça prend un chef d’orchestre [et] le fait de mettre [le projet] entre parenthèse­s au niveau de la crise, ça peut mettre en péril […] l’objectif final », dit-il.

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En 2019, la vérificatr­ice générale du Québec a blâmé le MAPAQ dans un rapport pour son inaction dans la lutte à l’antibiorés­istance chez les animaux liés à l’alimentati­on humaine.

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