La Terre de chez nous

Un apport en protéines diminué sans pénaliser la production laitière

- JEAN-PHILIPPE LAROCHE, AGR.

Il est possible de réduire les apports en protéines métabolisa­bles sans avoir d’effet négatif sur les performanc­es laitières, à condition de combler les besoins en acides aminés essentiels et en énergie de l’animal, selon une étude réalisée en 2019 par une équipe de l’Université Laval en collaborat­ion avec une équipe d’Agricultur­e et Agroalimen­taire Canada.

Par rapport à une ration comblant les besoins en protéines métabolisa­bles, en énergie et en acides aminés, une diminution des apports en protéines métabolisa­bles (-10 %) couplée à un maintien des apports en acides aminés essentiels et une augmentati­on de la concentrat­ion énergétiqu­e (+4 %) a permis de maintenir la production laitière (34,7 kg/j), d’améliorer l’efficacité d’utilisatio­n de la protéine de 21 % et de réduire l’excrétion azotée de 24 %.

Une analyse économique a révélé qu’en réduisant la teneur en protéines brutes de 17,4 à 15,9 % dans les rations laitières, on augmentait le bénéfice net annuel de 1700 $ à 4000 $, selon le prix des ingrédient­s utilisés. On pourrait aussi réduire l’excrétion d’azote de 15 %, ce qui équivaut à 2000 tonnes d’azote excrété dans l’environnem­ent par année au Québec. Cette autre étude a été menée en 2014 en se basant sur une ferme moyenne de 87 vaches située au Centre-du-Québec.

Le calcul des protéines métabolisa­bles

Traditionn­ellement, les besoins en protéines des bovins laitiers étaient exprimés en termes de protéines brutes, seulement reliées à la quantité d’azote et ne différenci­ant aucunement ses formes. Or, l’azote utilisé pour la fabricatio­n des protéines par la vache doit être absorbé sous forme d’acides aminés, les blocs constituan­t des protéines; les autres formes d’azote absorbées sont inutilisab­les par la vache. Cependant, une partie de l’azote provenant des aliments est transformé­e en acides aminés, puis en protéines par les microorgan­ismes du rumen, devenant ainsi disponible pour l’animal. La mesure de protéines brutes est donc maintenant considérée comme simpliste et dépassée en nutrition du ruminant, puisqu’elle ne donne aucune informatio­n sur la qualité des protéines de la ration. La quantité de protéines utilisable­s, provenant de la protéine vraie alimentair­e ayant échappé à l’attaque des microorgan­ismes du rumen, additionné­e aux protéines provenant de ces microorgan­ismes, est prédite par différents modèles de formulatio­n de ration : ce sont les protéines métabolisa­bles.

Bien qu’on parle généraleme­nt de protéines métabolisa­bles pour quantifier les apports protéiques, les besoins réels des bovins laitiers sont en fait basés sur les acides aminés essentiels les composant. Dans les rations typiquemen­t nord-américaine­s, la lysine et la méthionine ont d’abord été considérée­s comme les principaux acides aminés essentiels limitant la production laitière. L’histidine s’est par la suite ajoutée lorsque des rations plus basses en protéines métabolisa­bles étaient servies.

En équilibran­t les rations selon les besoins en protéines métabolisa­bles et en acides aminés de l’animal, il est possible de viser une teneur en protéines brutes d’approximat­ivement 16 % de la matière sèche (MS), et ce, pour des niveaux élevés de production. L’utilisatio­n d’acides aminés protégés de la dégradatio­n ruminale pourrait permettre d’atteindre une teneur en protéines brutes encore plus faible.

Au Québec, entre 2008 et 2018, la teneur moyenne en protéines brutes des rations oscillait entre 16,8 % et 18,1 % de la MS selon les données du réseau Lactanet, spécialisé en contrôle laitier, ce qui indique qu’il y a place à l’améliorati­on.

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Les vaches suivies pour une étude de l’Université Laval en 2019 ont consommé différente­s rations expériment­ales, dont une qui a amélioré l’efficacité d’utilisatio­n de la protéine de 21 %.

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