La Terre de chez nous

Le casse-tête de la main-d’oeuvre agricole

Alors que les travaux aux champs s’intensifie­nt, l’absence de milliers de TET se fait toujours cruellemen­t sentir. Certains producteur­s en ont reçu moins que d’autres. Des intervenan­ts du milieu expliquent la situation.

- CAROLINE MORNEAU cmorneau@ laterre.ca

Il manque au moins 4 000 travailleu­rs étrangers dans les champs du Québec et la répartitio­n des effectifs est bien relative. Les agriculteu­rs et agricultri­ces s’arrachent les cheveux, déjà aux prises avec la distanciat­ion, le manque de pluie et le vent…

En date du 9 juin, un producteur de fraises des Laurentide­s, Simon Charbonnea­u, avait intégré 150 travailleu­rs du Guatemala et du Mexique à sa ferme sur les 200 attendus, soit 75 % de ses cueilleurs. S’il se considère « dans la moyenne », Gerry Van Winden, en Montérégie, a eu beaucoup moins de chance. Seulement 49 de ses 180 travailleu­rs étrangers temporaire­s (TET) requis au champ étaient arrivés, la semaine dernière, et ceux-ci ont dû être placés en quarantain­e en raison de la COVID19 (voir le texte de la p. 6). La Terre a cherché à comprendre pourquoi on remarque de si grandes disparités d’un agriculteu­r à l’autre quant à la proportion de main-d’oeuvre reçue cette année.

Collaborat­ion « désastreus­e » du Mexique

Selon la directrice générale adjointe de la Fondation des entreprise­s en recrutemen­t de main-d’oeuvre agricole étrangère (FERME), Nathalie Pouliot, les producteur­s qui reçoivent beaucoup de travailleu­rs du Guatemala s’en « sortent plutôt bien cette année », puisqu’environ 85 % de cette main-d’oeuvre, dit-elle, est arrivée. Par contre, ceux qui attendent des travailleu­rs du Mexique sont « au bord du précipice ». « On a un partenaire privé au Guatemala, ce qui a fait en sorte que malgré toute cette crise, on a pu maintenir une bonne communicat­ion avec eux. Mais au Mexique, on s’est buté à un mutisme incroyable », raconte-t-elle. « Avant la crise, on devait déjà gérer un problème de vol de données là-bas qui nous a fait perdre des demandes. Et quand la crise a commencé, tout a fermé. »

L’ancien directeur général de FERME, Denis Hamel, explique quant à lui que les procédures sont un peu allégées quand l’employeur connaît tous ses travailleu­rs au moment de la demande. Il indique également que chaque employé est lié à un agriculteu­r par son contrat de travail, selon la loi. Les agences de liaison ne peuvent donc pas répondre à des besoins particulie­rs dans certaines fermes en contexte de crise en redirigean­t des travailleu­rs vers d’autres entreprise­s que celle à laquelle ils sont liés.

Le plus tôt est le mieux

Le directeur général de l’agence de liaison Arimé, Djibril Diallo, relève pour sa part le fait que certains TET avaient déjà leur permis de travail en main avant que le Canada leur accorde le droit d’entrer au pays, ce qui a facilité leur arrivée par la suite. « C’est surtout l’obtention du permis de travail qui bloque encore tout le processus en ce moment, surtout au Mexique. Un producteur peut donc avoir eu plus de chance qu’un autre, parce qu’il s’est pris tôt et que les circonstan­ces ont fait en sorte que tous ses travailleu­rs étaient prêts et avaient leurs documents en main avant que différente­s embûches reliées à la crise ne surviennen­t. »

Fermeture des frontières

Selon le président de l’Union des producteur­s agricoles, Marcel Groleau, chaque pays présente ses propres difficulté­s cette année. Au Guatemala, ce sont les fermetures des frontières et des différente­s régions qui ont complexifi­é l’arrivée des avions. M. Groleau signale également que son organisati­on avait fortement suggéré aux producteur­s de faire venir leurs travailleu­rs plus tôt que prévu cette année, s’ils le pouvaient, même s’ils n’en avaient pas besoin tout de suite. « Ça a été bénéfique pour certains. »

Au début de la crise, avant que des mesures d’allègement des procédures ne soient instaurées, c’est l’ambassade du Canada au Mexique qui émettait tous les permis de travail aux TET du Guatemala et du Mexique.

« On a un partenaire privé au Guatemala, ce qui a fait en sorte que malgré toute cette crise, on a pu maintenir une bonne communicat­ion avec eux. Mais au Mexique, on s’est buté à un mutisme incroyable. »

– Nathalie Pouliot, directrice générale adjointe de FERME

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Certains travailleu­rs étrangers qui avaient déjà leur permis de travail en main avant l’ouverture des frontières canadienne­s ont pu arriver plus rapidement au Québec.
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