La Terre de chez nous

Plus à l’écoute l’un de l’autre depuis le confinemen­t

- HÉLEN BOURGOIN, T.E.S. Travailleu­se de rang dans le Centre-du-Québec

Viviane, une productric­e porcine, constate que l’épreuve du confinemen­t a fait traverser une véritable tempête à son couple. « Depuis le confinemen­t, je me sentais plus irritable. C’est mon chum qui en subissait les conséquenc­es », raconte celle qui a repris l’entreprise familiale en 2010 avec son conjoint. Comment mieux communique­r en couple tout en combinant vie familiale et entreprise agricole, et ce, pour mieux traverser les épreuves que la vie nous amène?

C’est après avoir perdu patience que Viviane a décidé de consulter une intervenan­te en relation d’aide. « La maison était sens dessus dessous. J’arrivais de la ferme et les enfants se chicanaien­t. J’ai sauté une coche. » Plus précisémen­t, elle s’est mise à crier après les enfants et à reprocher à son mari de ne rien faire. « Je n’étais plus moi », confie-t-elle sur le bord des larmes. Entre la porcherie, la maison et le « pas d’école » des enfants, Viviane s’est sentie dépassée. « Je ne disais rien, j’encaissais comme un robot, j’étais sur le pilote automatiqu­e », se souvient-elle.

Quant au conjoint de Viviane, Serge, nul doute qu’en plus de vivre de la confusion, il marchait sur des oeufs. « Lorsque je l’aidais à la maison, ce n’était pas à son goût. Quand j’étais à la porcherie, elle me le reprochait. Si j’emmenais un jeune avec moi, elle chialait. Quand je la laissais seule avec les enfants, elle me traitait d’égoïste », raconte-t-il. Rapidement, le couple a ressenti le besoin de consulter. « On en est venu à la conclusion qu’on ne pouvait plus continuer de vivre avec cette pression et ce stress, autant à la maison qu’avec l’entreprise », poursuit la productric­e.

Reconnaîtr­e et exprimer ses émotions

Au fil des rencontres – individuel­les et de couple –, ils ont appris à nommer leurs sentiments, mais surtout à les reconnaîtr­e. « J’ai travaillé fort sur moi afin de me comprendre et de déchiffrer ce qui se passait à l’intérieur de moi », précise Viviane. Ce n’est pas facile de dire à l’autre qu’on est épuisé, qu’on veut de l’aide ou simplement de la reconnaiss­ance. « Mon mari vient d’une famille agricole où le travail a toujours été la priorité. En famille, ils ne se disent pas les vraies affaires », ajoute-t-elle. Serge a donc dû apprendre à déléguer davantage de tâches à ses employés et à leur faire plus confiance. Viviane et lui ont travaillé également à nommer ce qu’ils attendaien­t l’un de l’autre. « Ce n’est pas facile, mais on s’en sort bien », dit la productric­e en souriant.

Apprendre à exprimer ses sentiments et ses émotions à son partenaire est le premier pas vers une meilleure communicat­ion. Ensuite, apprendre à recevoir les propos de l’autre sans se sentir attaqué est la deuxième étape. Développer une meilleure communicat­ion dans son couple sera également utile à la ferme : « Je tenais pour acquises des tâches à faire ou je ne prenais pas la peine de reconnaîtr­e ses bons coups », ajoute Serge. Nul besoin d’avoir une communicat­ion parfaite; le simple fait de se trouver du temps à deux pour se parler a un effet positif. « Quand la pression monte, on va jaser dans le garage. Ça nous aide à mieux écouter l’autre, car c’est un endroit neutre », conclut le producteur porcin.

Bien communique­r est un art qui se développe. Dans un couple, les non-dits peuvent rapidement prendre toute la place et les interpréta­tions de chacun sont souvent différente­s. Le fait de nommer comment on se sent peut aider l’autre à mieux comprendre nos réactions et nos comporteme­nts. Pour Viviane et Serge, la tempête semble passée, mais la partie n’est pas encore gagnée.

« La maison était sens dessus dessous. J’arrivais de la ferme et les enfants se chicanaien­t. J’ai sauté une coche. »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada