La Terre de chez nous

Maîtres chez eux

- DAVID RIENDEAU driendeau@ laterre.ca

La récente pénurie de gaz propane due à la grève des cheminots et aux blocages des voies ferrées par les autochtone­s a révélé la dépendance des agriculteu­rs aux combustibl­es fossiles. Certains, tel Stéphane Parr, ont choisi de s’en affranchir.

Pour diminuer leur dépendance aux combustibl­es fossiles, un nombre croissant de fermes font le pari de produire leur propre énergie. Entre le désir d’une plus grande autonomie et celui de baisser leurs coûts de production, la route vers l’autosuffis­ance est parfois parsemée d’embûches.

Auparavant, le producteur de grandes cultures et de volailles Stéphane Parr se sentait à la merci du prix du propane. Grâce à la biomasse, il génère tellement de chaleur qu’il ne sait plus quoi en faire.

« Je suis allé vers la biomasse pour être indépendan­t et après cinq ans d’expérience, je peux vous dire que ce changement nous a ouvert des portes », affirme sans hésiter le copropriét­aire des Entreprise­s Claudelain­e à Bécancour.

En 2015, cette ferme familiale du Centre-duQuébec a converti son système de chauffage à la biomasse forestière résiduelle. Les deux chaudières du fabricant québécois Energia Tech, d’une puissance de 5,4 millions de BTU chacune, permettent de sécher 9000 tonnes de maïs et de chauffer quatre poulailler­s, deux garages et trois maisons. « Même en vendant de la chaleur à la ferme voisine, il m’en reste », lance le producteur.

Cette conversion, qui a nécessité un investisse­ment de 1,6 M$, dont la moitié provenant d’aide gouverneme­ntale, a fait baisser ses coûts de production de façon significat­ive. « Ça me coûtait autour de 250 000 $ annuelleme­nt en propane. Quand le prix a monté à 1 $/litre, je ne faisais pas une cent dans le poulet », raconte Stéphane Parr. Dorénavant, il débourse moins de 70 000 $ annuelleme­nt pour sa biomasse et cette facture est réduite de moitié grâce à la vente d’énergie à son voisin.

Se mettre à l’abri des fluctuatio­ns

Le même besoin d’indépendan­ce anime Martin Raby qui se construit présenteme­nt un poulailler qui aura une capacité de 19 500 poulets à Adstock dans Chaudière-Appalaches. Le chauffage sera assuré par une chaudière à la biomasse forestière de Séquoia, également une entreprise québécoise. La pénurie de propane causée par les blocages ferroviair­es de février a fini de le convaincre de choisir cette source d’énergie.

« Si la crise du propane cet hiver avait duré une ou deux semaines de plus, ça aurait été catastroph­ique pour les éleveurs. En tant qu’entreprene­ur qui se lance en affaires, la sécurité de l’approvisio­nnement et la fluctuatio­n des prix sont très importante­s », confie-t-il.

Une dynamo pour les entreprise­s

La conversion du propane vers la biomasse après l’incendie de sa porcherie en 2018 a permis à l’entreprise Viandes biologique­s de Charlevoix d’élargir ses horizons, explique son copropriét­aire Damien Gérard. « En plus de fournir la porcherie, le séchoir à grains et la meunerie, la biomasse assure le chauffage et l’eau chaude de notre centre de formation. » Grâce à cette source d’énergie, la ferme de Saint-Urbain peut également opérer un séchoir à okara, un résidu de pressage des fèves de soya destiné à compléter l’alimentati­on des poulets et des porcs, réduisant encore plus ses coûts de production.

« Quand on a fait notre budget, on prévoyait un retour sur investisse­ment en huit ans, mais avec les économies dégagées sur les protéines, on pourra rentabilis­er en quatre ans », fait valoir le producteur qui déboursait de 150 000 $ à 200 000 $ par année en propane contre 30 000 $ pour la biomasse. « On est conforté dans notre choix tous les jours. »

Une ressource abondante

Les trois agriculteu­rs consultés par La Terre peuvent compter sur une ressource abondante et abordable. Stéphane Parr s’approvisio­nne en biomasse à l’écocentre de la municipali­té voisine, Damien Girard reçoit les écorces d’un moulin situé à quelques kilomètres de sa ferme et Martin Raby puisera sa biomasse à même les résidus de coupe de la terre familiale. « Chaque année, je coupe quatre acres de bois que je vends au moulin. Le petit bois qui n’est pas rapporté par mon acheteur ne sert présenteme­nt à rien. Il alimentera ma fournaise », explique ce dernier.

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L’installati­on d’une chaudière a représenté pour Viandes biologique­s de Charlevoix un investisse­ment de 1,4 M$, dont la moitié provenant d’aide gouverneme­ntale.
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Selon le producteur Stéphane Parr, la biomasse offre un séchage plus doux de son maïs, car elle requiert moins de chaleur et libère moins d’humidité que le propane.
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