La Terre de chez nous

La culture de la patate douce gagne du terrain

- PIERRE SAINT-YVES Collaborat­ion spéciale

Un nombre croissant de producteur­s de pommes de terre mettent depuis peu une petite touche « d’exotisme » dans leur champ en faisant l’essai de la culture de patate douce, un tubercule plutôt habitué aux climats plus chauds et secs.

« Les résultats semblent assez encouragea­nts, surtout avec la nouvelle variété canadienne Radiance », explique Samuel Richard, producteur de pommes de terre et propriétai­re avec son frère Gabriel de Proculteur et Pro-bio, à Saint-Léonard-d’Aston au Centre-du-Québec.

Ils en sont à leur deuxième année d’essais de culture de la patate douce, mais la première à grande échelle sur une superficie de 16 acres répartie dans deux champs, l’un biologique de 6 acres et l’autre convention­nel.

Les deux frères explorent cette avenue comme culture de remplaceme­nt dans le processus de conversion de leur terre en mode biologique. « On envisage d’essayer d’autres cultures – ail, oignon, carotte –, mais la patate douce reste notre premier choix », explique Samuel Richard. Son frère et lui connaissen­t bien l’ampleur de la tâche qui les attend. À elle seule, l’opération de piquage des boutures au début du mois de juin a été un véritable défi, rappelle Samuel.

« On dispose d’une période maximale d’une semaine entre la coupe des boutures provenant de Caroline du Nord et leur plantation, qui doit se faire manuelleme­nt parce qu’elle se fait sous pellicule de plastique. On a fait appel à une quarantain­e de personnes – des travailleu­rs étrangers, des jeunes et des membres d’équipes sportives locales – pour nous donner un coup de main », précise-t-il.

Dans le seul champ bio, 87 000 boutures ont ainsi été plantées. L’an dernier, c’était 3 000 boutures. « Il y a vraiment des conditions très strictes à respecter pour garantir le succès de la culture, explique l’agronome Gilles Hamel. La patate douce est un tubercule très sensible au froid. Il faut prendre garde au gel, tardif au printemps et hâtif à l’automne, qui peut compromett­re la croissance. » L’agronome suit de près l’expérience de la famille Richard et de quelques autres producteur­s, en Montérégie et dans Lanaudière notamment, qui ont semé sur une plus petite superficie en convention­nel.

Mais la culture de la patate douce, si elle est marginale au Québec, n’est pas nouvelle. Depuis presque 20 ans, la Ferme Onésime Pouliot, de l’île d’Orléans, a développé une expertise en la matière.

Plus consommée qu’avant

Les données du ministère de l’Agricultur­e du Québec font état d’une consommati­on de patates douces en croissance constante au Canada, une progressio­n qui a atteint environ 90 % entre 2006 et 2010. Pour satisfaire à la demande, le pays en a importé, en 2015, tout près de 52 millions de kilos provenant principale­ment des États-Unis. L’Ontario est le principal producteur au pays et fournissai­t 14 000 tonnes métriques il y a quelques années. Il y a donc une demande, mais les producteur­s font face au défi de la commercial­isation.

« Évidemment, les légumes du Québec sont plus chers parce que les coûts de production sont plus élevés, explique Gilles Hamel. On n’a qu’à penser à l’opération de plantation manuelle sous paillis de plastique noir biodégrada­ble. Le contexte pourrait cependant être favorable aux producteur­s avec le discours entourant l’autonomie alimentair­e du Québec et la promotion de l’achat local. Il faut que les producteur­s assurent un approvisio­nnement constant. »

Les Richard ont choisi de faire leur propre mise en marché. « On voudrait être autonomes, avoir nos clients », dit Samuel Richard, qui confirme avoir réussi à « entrer » dans une petite chaîne de supermarch­és spécialisé­s.

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Les trois piliers de Proculteur : Guillaume Allyson ainsi que Samuel et Gabriel Richard.

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