Le Carillon

DE PEINE ET DE MORT

- STÉPHANE LAJOIE stephane.lajoie@eap.on.ca

La Troupe des Non-coupables est de retour au pied de la potence de l’ancienne prison de L’Orignal pour y présenter sa pièce La dernière pendaison.

La Troupe des Non-coupables est de retour au pied de la potence de l’ancienne prison de L’Orignal pour y présenter sa pièce La dernière pendaison, inspirée des actes et du procès des fermiers meurtriers William Larocque et Emmanuel Lavictoire, les deux derniers hommes à avoir été pendus à la prison.

La pièce transporte le public au début des années 1930, au coeur d’une Amérique écrasée par la Grande dépression, où l’argent se fait rare et l’usure grandit. La mort de Léo Bergeron, dans des circonstan­ces peu catholique­s, fait ressortir les maux d’une société qui se cherche, prise dans l’étau économique. L’assurance n’est plus, qu’elle soit monétaire ou identitair­e.

Durant la pièce, les comédiens abordent l’historique procès avec tact et humour, sans donner dans la gratuité. Peu importe le crime, le respect des faits et de la dignité enrichisse­nt l’oeuvre et ses personnage­s.

Dans le rôle de Raoul Sanschagri­ns (William Larocque), Guy Rouleau est poignant avec des yeux d’enfer et un caractère bouillant. L’intensité de Raoul donne parfois la frousse, qu’il soit en position de pouvoir ou en route vers sa chute.

« Quand je pense au curé qui nous crie par la chaire à tous les maudits dimanches qu’il faut travailler à la sueur de nos fronts pour faire joindre les deux bouts, a lancé Raoul durant la pièce. On est juste bon à faire engraisser les grosses poches tandis que l’on végète dans nos trous ! »

Son naïf compagnon Roméo Ledoux (Emmanuel Lavictoire), campé par Gilles Bélanger, tranche par sa franchise aveugle et son habileté à se faire emberlific­oter. Mêlé à un crime dont il ignorait le dénouement, le beau camion rutilant du petit marchand s’est transformé en navet, une récolte qui lui a passé la corde au cou.

Lorsque l’orgueil de Canadien-français de Raoul l’envoie derrière les barreaux après avoir sous-estimé l’inspecteur polyglotte, un long procès aux témoins bavards s’ensuit. Histoire d’ouvrier, réflexions du désespoir et résignatio­n au pied du mur, la troupe réussit tout un coup en donnant couleurs et vie à une époque teintée de noir et blanc. Trente-deux pas à trépas Malgré la clémence du jury, les deux hommes n’obtiennent pas d’ultime pardon. Durant sa dernière marche, Raoul éclate en sanglots, innocentan­t alors, 32 pas trop tard, son compagnon Roméo. Cette scène, jouer dans la salle d’audience du palais de justice, lieu même du procès en 1932, est forte en émotions et tension.

La dernière pendaison est une oeuvre qui rattache l’ancienne prison à son histoire. Prenant un recul historique et une touche humoristiq­ue, elle relate des événements marquants pour la région et ses familles.

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 ??  ?? Convainqua­nt comme pas un, Raoul Sanchagrin­s a emberlific­oté les assurances et le pauvre Léo Bergeron, qui a couru à sa perte en travaillan­t avec le magouilleu­r.
Convainqua­nt comme pas un, Raoul Sanchagrin­s a emberlific­oté les assurances et le pauvre Léo Bergeron, qui a couru à sa perte en travaillan­t avec le magouilleu­r.
 ??  ?? Raoul Sanchagrin­s a été marqué, durant son adolescenc­e, par la pendaison de son oncle Narcisse en 1891. Des décennies plus tard, il s’est à son tour retrouvé sur la potence, un triste destin pour l’homme de Cumberland.
Raoul Sanchagrin­s a été marqué, durant son adolescenc­e, par la pendaison de son oncle Narcisse en 1891. Des décennies plus tard, il s’est à son tour retrouvé sur la potence, un triste destin pour l’homme de Cumberland.
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Les six prochaines représenta­tions de la pièce seront toutes jouées à guichets fermés. En raison de problèmes avec certains spectateur­s sans billet la saison dernière, la troupe fait appel au bon jugement des citoyens le soir des représenta­tions.
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