Le Carillon

UN AMOUR QUI PERDURE

- MICHEL LAMY michel.lamy@eap.on.ca

En 1944, Viateur et Fernande Charlebois de Saint-Bernardin s’unissaient, pour le meilleur ou pour le pire après quelques années de fréquentat­ions.

« J’avais 16 ans. Il en avait 20. Je l’ai vu et j’ai dit ‘celui-là, c’est le mien’ », de se rappeler Mme Charlebois. Aujourd’hui, Mme Charlebois a 96 ans. Son mari… eh bien, il est centenaire. Récit d’une histoire d’amour qui transcende huit décennies. Quelque temps après ce premier coup de foudre, ils ont commencé à se fréquenter. « Il m’est tombé dans l’oeil lors d’une soirée de campagne, d’expliquer la nonagénair­e. Les soirées avaient lieu dans des maisons du voisinage. »

À l’époque, la fête changeait d’endroit chaque weekend. Les hôtes offraient à boire et à manger. « C’était peu dispendieu­x de recevoir. Des produits de la ferme et un gallon de gin baptisé plusieurs fois, ça allait loin », lance Mme Charlebois, sourire aux lèvres.

Les soirées étaient normalemen­t animées par un raconteur, lequel dans ce cas-ci s’appelait Lucien Leduc. « Il nous faisait mourir de rire, alors que lui, il gardait toujours un air sérieux, se rappelle Mme Charlebois. Puis on chantait et on dansait. Des sets carrés, des valses…. » M. Charlebois avait quatre soeurs, mais aucun frère. Sa mère était morte alors qu’il n’avait que 10 ans. Avant que Viateur et Fernande puissent se dire « oui, je le veux », il leur a fallu attendre que les soeurs de M. Charlebois partent de la maison. Il n’y avait pas assez de place pour le couple. « Roméo, le père de mon mari était une bonne personne. Un homme bien correct. Une fois mariée, j’ai emménagé chez lui, où Viateur demeurait toujours. Roméo avait une ferme de 200 acres et Viateur aidait son père. »

Elle poursuit : « Viateur n’était pas bien gros. Mais il était très fort, lance Mme Charlebois, visiblemen­t fière. Déjà à 14 ans, il maniait la charrue à cheval. » Mais avec la mécanisati­on, la tâche devint plus facile. « En 1940 nous avons acheté un tracteur Massey-Harris et plus tard une batteuse de Dion machinerie­s », se rappelle M. Charlebois qui, en tant que fils unique d’un agriculteu­r, n’avait pas eu besoin d’aller à la guerre. La mécanisati­on a aussi permis de diminuer le nombre d’employés. « Je me souviens au début, dit-elle. Il y avait une douzaine d’hommes à nourrir au diner et au souper, se rappelle Mme Charlebois (…) Avec la modernisat­ion, on est passé à un homme engagé. On cultivait de l’avoine de l’orge et du millet. » L’engouement de Roméo Charlebois pour les nouvelles technologi­es ne se limitait pas à la machinerie agricole. « Quand elles sont devenues disponible­s, Roméo a acheté trois télévision­s, de raconter sa bru. Il en a gardé une pour lui et a donné les deux autres à deux de ses filles, ajoutet-elle en riant. Il aimait tellement regarder son hockey. »

Quant à Viateur et Fernande, ils ont eu quatre fils, dont des jumeaux. « Mes jumeaux sont venus au monde un jour de l’An. Le docteur était venu de Saint-Isidore et avait emmené ma mère avec lui pour m’aider, de poursuivre Mme Charlebois, qui aurait aussi bien aimé avoir une fille. « Mes enfants n’ont jamais été malades, poursuit-elle, car comme nous, ils ont été élevés sur une ferme. » C’est d’ailleurs à cela que Mme Charlebois attribue leur longévité. « Tout était biologique et les animaux n’étaient pas pompés d’hormones. (…) Nous avions tout sur la ferme : du lait, des oeufs, du beurre, des poules et des boeufs, en plus de nos vaches laitières. » Après le décès de Roméo Charlebois, ils ont continué d’exploiter la ferme, qui était passée de 200 à 300 acres. L’aventure agricole durera près de 30 ans. En 1973, les fils du couple prennent la relève. Viateur et Fernande s’installero­nt « au village ». « Nous sommes demeurés au village (de Saint-Bernardin) pendant 27 ans. Viateur demeurait actif. Nous avions un grand jardin qui était source d’admiration. Il s’acharnait contre la mauvaise herbe », d’insister la dame en regardant son mari avec admiration.

En 2000, ils déménagent leurs pénates à Hawkesbury. « Cela fait 18 ans que nous vivons au même endroit. Nous sommes près de tout et nos jumeaux nous emmènent faire des courses et des visites. » Le couple, qui fêtera son 75e anniversai­re de mariage l’an prochain, est toujours heureux après tant d’années. « On ne s’est jamais tanné l’un de l’autre. On a notre mobilité et notre raison. Je continue de faire la cuisine, d’insister Mme Charlebois. On n’achète pas de repas tout préparés », de conclure en grimaçant l’agricultri­ce à la retraite .

Avec quatre enfants, 10 petits-enfants, cinq arrière-petits-enfants et un sixième qui un sixième qui se montrera le bout du nez en juin, le couple a une bonne raison de fêter à nouveau, tout comme il y a 80 ans.

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photo Michel Lamy Fernande Charlebois contemple l’album de famille sous le regard de son mari, Viateur.—
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 ?? photo Michel Lamy ?? « Malgré notre âge avancé, nous avons une bonne mémoire. L’Alzheimer nous a épargné », de dire Mme Charlebois—
photo Michel Lamy « Malgré notre âge avancé, nous avons une bonne mémoire. L’Alzheimer nous a épargné », de dire Mme Charlebois—
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photo Michel Lamy L’heureux couple apprécie la bonne santé dont ils jouissent, ce qui leur permet de demeurer indépendan­t.—
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—photo Michel Lamy « En 1944, ma soeur Thérèse et moi avons fait un mariage double. »
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