Le Carillon

DE LA FERME À LA TABLE

- MICHEL LAMY michel.lamy@eap.on.ca

De la ferme à l’usine de transforma­tion, la Fabrique Laitière de Saint-Isidore achemine le lait 365 jours par année. La Fabrique Laitière est l’une parmi une poignée d’entreprise­s de l’Ontario à qui Dairy Farmers of Ontario (DFO) confie la tâche de transporte­r le lait des producteur­s laitiers vers quatre usines de transforma­tion de la région, soit l’usine Kraft à Ingleside, Natrel à Orleans, Parmalat à Winchester et la fromagerie de Saint-Albert.

L’entreprise a été fondée en 1959 par Roger Ménard, qui cherchait à l’époque à approvisio­nner sa fromagerie avec du lait. Et bien que la fromagerie fermera une quinzaine d’années plus tard, M. Ménard continuera de transporte­r le lait des producteur­s laitiers de la région vers les usines de transforma­tion. Évidemment, cette période relativeme­nt courte sera le témoin de changement­s importants au chapitre de la production du lait. La traite du lait s’automatise ce qui mènera à l’abandon progressif des bidons. Le lait sera désormais transporté en vrac dans des camions-citernes.

La deuxième génération entrera en scène vers 1987-88. L’entreprise JR Ménard Ltée, dont M. Ménard était président, se délestera du transport du lait. La fille de M. Ménard, Danielle, et son gendre, Luc Villeneuve, prendront le volant de l’entreprise et la conduiront vers de nouveaux sommets. « Quand nous avons acheté la compagnie, nous transporti­ons environ 39 millions de litres de lait par année. Avec le temps, la compagnie a acquis 50 % de JM Vinette & Fils, un autre transporte­ur de lait, ce qui a fait que notre volume a augmenté jusqu’à 60 millions de litres annuelleme­nt », a expliqué M. Villeneuve.

UNE JOURNÉE QUI COMMENCE TÔT

La journée commence assez tôt. Même que les coqs n’ont pas encore commencé à chanter. À 4 h 55, Alain DeRepentig­ny, un des chauffeurs, arrive sur les lieux afin de se préparer à une journée de travail qui pourrait durer jusqu’à une douzaine d’heures.

Avant de se lancer sur la route, il y a quelques vérificati­ons d’usage à effectuer. « Il faut inspecter le camion, a-t-il indiqué. Il ne faut pas seulement respecter les directives de Dairy Farmers of Ontario (DFO), mais aussi du ministère des Transports de l’Ontario (MTO). » Le chauffeur manoeuvre son camioncite­rne de 36 000 litres jusqu’à la première ferme pour prendre livraison de la précieuse matière blanche. À part être titulaire du permis de conduire applicable, chaque chauffeur doit être dûment accrédité pour transporte­r le lait. « Tous les deux ans, nous devons également passer un cours de recyclage qui évalue nos compétence­s », a poursuivi le chauffeur qui travaille pour l’entreprise depuis 25 ans.

Le DFO fournit la liste des quantités et vers quelles usines les camionneur­s doivent transporte­r le lait. « La liste nous est envoyée quelques jours à l’avance, a précisé M. Villeneuve. »

Ce matin-là, il y a une première levée d’environ 15 000 litres prévue à l’horaire. Tel un vinicole, une première étape primordial­e pour les chauffeurs de camion de lait consiste à sentir le lait. « Avant même de mettre la procédure de pompage en marche, nous ouvrons le couvercle du réservoir de lait du fermier et nous sentons le lot, a précisé M. DeRepentig­ny. S’il y a contaminat­ion, nous le sentirons. » Afin d’éviter les possibilit­és de contaminat­ion, le lait est filtré et maintenu dans des réservoirs réfrigérés. La températur­e oscille autour de 4°C. Le DFO tolere jusqu'a 10°C. Cependant, l’usine de Winchester, par exemple, n’accepte rien de moins que 6°C.

« Nous devons prendre des échantillo­ns à chaque ferme et faire en sorte que la températur­e demeure basse. Ces échantillo­ns, maintenus en réfrigérat­ion, sont également analysés par le DFO », a assuré le chauffeur.

Cette mesure est aussi essentiell­e afin d’éviter la croissance bactérienn­e. L’élément sanitaire est prioritair­e. Ainsi satisfait, le chauffeur peut procéder au pompage du lait dans sa citerne. Chaque camion a un lecteur de données qui capte une myriade d’informatio­ns comme la températur­e du lait. Un indicateur de niveau donne la quantité de lait dans le réservoir et cette informatio­n est entrée dans le lecteur.

Boyau raccordé, pompe branchée, le lait est transféré d’une citerne à l’autre. Le chauffeur en profite pour laver l’extérieur de la citerne du producteur laitier et une fois le lait parti, un cycle de lavage est mis en marche à l’intérieur.

Ce matin-là, l’opération recommence­ra deux fois. La citerne contient 33 000 litres de lait, qui est en deçà du poids maximal à observer pour le MTO. M. DeRepentig­ny se dirige vers Winchester pour vider sa charge. « Le plus délicat est quand la citerne est remplie aux trois quarts. Comme ce n’est pas un solide, le liquide ballotte dans les deux réservoirs de 18 000 litres chacun. Si on ajoute le verglas aux conditions routières comme on a connu ce printemps, alors il faut être très prudent», a fait remarquer le chauffeur.

LE LAIT, UNE FORCE DE LA NATURE

Une fois arrivé à l’usine de transforma­tion, le même scénario se répète. L’inspecteur prend un échantillo­n et la températur­e du lait. Satisfait, il autorise le chauffeur de la Fabrique Laitière à vider le contenu de ses citernes, qui sont reliées ensemble. Cette étape prend un certain temps. Encore une fois, l’assainisse­ment est de rigueur. M. DeRepentig­ny s’assure de laver son camion à l’extérieur. Une fois vidées, les citernes sont lavées à l’intérieur. Un cycle de lavage automatiqu­e assure un nettoyage complet. Les citernes des camions doivent être lavées toutes les 24 heures et les citernes des producteur­s laitiers toutes les fois qu’elles sont vidées, soit tous les deux jours.

Ce processus terminé, le chauffeur aura cinq autres fermes à visiter avant de finir sa journée et le camion sera encore prêt à être vidé de son contenu. « Une fois rendu au bureau, a expliqué l’homme originaire de Casselman, les données du

lecteur sont transférée­s dans l’ordinateur et l’informatio­n envoyée à DFO. » La Fabrique Laitière couvre un territoire sous contrat avec DFO, qui est renouvelab­le tous les deux ans. Pour se conformer aux exigences de l’organisme, M. Villeneuve doit investir prochainem­ent dans l’achat de citernes et de camions.

« Une citerne à trois essieux coûte environ 145 000 $, usagée. Et un camion pour la tirer nous fera dépenser autour de 153 000 $, taxes en sus dans les deux cas », a fait remarquer le président.

« Nous avons été chanceux, a confié le membre de l’Ontario Milk Transport Associatio­n. Les affaires vont bien. Nous avons de bons employés, dont un qui prend sa retraite avec plus de 30 ans de service. Nous avons un autre chauffeur qui est là depuis 40 ans et son fils est avec nous depuis cinq ans. » Entre-temps, une troisième génération se prépare à prendre la relève. Catherine et Samuel, les enfants de M. et Mme Villeneuve vont prendre la barre d’ici un an à un an et demi.

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 ?? Photo Michel Lamy ?? L’inspecteur de l’usine de transforma­tion du lait prend un échantillo­n et la températur­e pour s’assurer de la qualité.—
Photo Michel Lamy L’inspecteur de l’usine de transforma­tion du lait prend un échantillo­n et la températur­e pour s’assurer de la qualité.—
 ?? Photo Michel Lamy ?? Rien n’est laissé au hasard lors de la collecte du lait. Alain DeRepentig­ny, chauffeur pour la Fabrique Laitière, prend les données sur son ordinateur portable et synchronis­e avec le lecteur du fermier.—
Photo Michel Lamy Rien n’est laissé au hasard lors de la collecte du lait. Alain DeRepentig­ny, chauffeur pour la Fabrique Laitière, prend les données sur son ordinateur portable et synchronis­e avec le lecteur du fermier.—
 ?? photo Michel Lamy ?? Après avoir vidé la citerne du producteur laitier, c’est le temps de programmer le cycle de nettoyage.—
photo Michel Lamy Après avoir vidé la citerne du producteur laitier, c’est le temps de programmer le cycle de nettoyage.—
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