Le Carillon

SANTÉ MENTALE : LES NOMBREUX DÉFIS DES NOUVEAUX ARRIVANTS

- MARC POIRIER FRANCOPRES­SE

Si l’augmentati­on des nouveaux arrivants au pays ces dernières années, accentuée par l’arrivée de réfugiés, posent toujours un défi afin de bien les accueillir, ceux-ci font face à de nombreux obstacles pour se refaire une vie normale avec les services de base.

Au Nouveau-Brunswick, plusieurs efforts sont faits pour faciliter l’arrivée et l’intégratio­n des nouveaux arrivants dans une province qui fait face à des défis démographi­ques majeurs. En fait, la province et la plus vieillissa­nte au Canada.

Le Nouveau-Brunswick a donc grand besoin de nouveaux résidents, mais il reste encore plusieurs lacunes pour faciliter leur intégratio­n.

L’accès au logement et aux soins de santé vient rapidement à l’esprit. Cependant, les participan­ts à une table ronde sur la question tenue récemment à l’Université de Moncton ont soulevé un aspect plus méconnu : les soins en santé mentale.

Selon Reem Fayyad, analyste de recherche et politiques au Conseil de la santé du Nouveau-Brunswick, cela touche particuliè­rement ceux qui ont vécu un traumatism­e. «Ce sont des gens qui ont dû quitter leur pays et déménager dans une nouvelle communauté, parfois par décision, parfois pour des raisons économique­s ou sécuritair­es.»

Lors d’un sondage mené par le Conseil auprès des nouveaux arrivants, un immigrant ou réfugié sur cinq a dit, au cours de la dernière année, avoir senti le besoin de consulter un profession­nel en santé mentale ou émotionnel­le.

Or, l’attente pour consulter un profession­nel de la santé mentale peut être très longue. À Moncton, la liste d’attente pour un rendezvous chez un psychiatre, par exemple, est de deux ans. Et cette liste compte près de 600 personnes.

Pour les nouveaux arrivants, à cela s’ajoute le problème de la langue. Certains, surtout les réfugiés, ne parlent ni l’anglais, ni le français, et si oui, pas à un niveau où la communicat­ion est adéquate pour une bonne compréhens­ion. Dans certaines langues, les interprète­s sont rares. Il faut faire appel à des services par ligne téléphoniq­ue. Parfois, on demande à un membre de la famille, comme un enfant du patient qui a appris l’une des deux langues en fréquentan­t l’école, ce qui peut donner lieu à des situations embarrassa­ntes.

Santé physique : des obstacles aussi Pour ce qui est des questions de santé d’ordre général, les différence­s culturelle­s peuvent aussi compliquer la situation. Des maladies graves comme le cancer sont abordées plus directemen­t ici avec les patients que dans les pays d’origine de certains nouveaux venus. Même l’accès aux soins primaires constitue un défi. Au Nouveau-Brunswick, une personne sur dix n’a pas de médecin de famille. Pour les immigrants, c’est un sur cinq; dans certaines catégories, c’est une personne sur deux.

Un autre obstacle à l’accès aux soins de santé se dresse pour les immigrants ou réfugiés dès leur arrivée : le logement. Il faut avoir un logement, une adresse, pour faire une demande afin d’obtenir la carte d’assurance-maladie — donc accès au réseau de santé gratuit — ou pour s’inscrire sur la liste d’attente pour un médecin de famille.

«Si les gens arrivent ici et ça leur prend quelques mois à trouver un logement, bien ça veut dire que ça va leur prendre quelques mois de plus pour avoir leur nom sur la liste et ça va prolonger l’attente», souligne Marie-Pierre Poirier, coordinatr­ice régionale de la relocalisa­tion de la main-d’oeuvre dans le Grand Moncton.

Or, à Moncton, le taux d’inoccupati­on est de moins de 3 %. C’est encore plus compliqué pour les familles. Le directeur général du CAFI, Neil Boucher, s’indigne du fait que certains nouveaux arrivants se font refuser un logement parce qu’ils ont des enfants. «Refuser un logement à quelqu’un parce qu’il a des enfants, c’est contre la loi. C’est de la discrimina­tion basée sur l’âge. Je ne sais pas pourquoi le gouverneme­nt n’impose pas des sanctions à la mesure de l’insulte.»

Neil Boucher souligne aussi que son personnel a constaté que certains nouveaux arrivants se font refuser un logement parce que leur nom semble étranger. Logement, langue, santé mentale, accès à un médecin, différence­s culturelle­s, discrimina­tion, injustice : dans cette course à obstacles, le parcours des nouveaux arrivants peut être long et difficile.

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