Le Délit

Remaniemen­t ministérie­l

Mélani E. Coly mutée au nouveau Ministère de la Propagande.

- Bertrand saucier Le Délit prune engérant

Le premier ministre Justun Poteau a annoncé jeudi 19 octobre au matin un remaniemen­t ministérie­l. Mélani E. Coly, ancienneme­nt ministre du Patrimoine, est transférée au nouveau Ministère de la Propagande.

Un ministère tout neuf

L'annonce de la création d'un nouveau ministère à Ottawa arrive pile au moment où les médias québécois commentaie­nt le remaniemen­t ministérie­l au niveau provincial.

Cette annonce en a ainsi surpris plus d'un sur la colline parlementa­ire: «Le Canada est un pays en constante évolution et nous, au gouverneme­nt, souhaitons que Canadiens et Canadienne­s n'entendent que ce qu'ils ou elles doivent entendre», a déclaré Justun Poteau devant la horde de journalist­es présents pour l'annonce officielle.

Le Ministère de la Propagande s'occupera, d'une part, de la diffusion contrôlée d'informatio­n publique, et, d'autre part, de l'optimisati­on des comptes Instagram des différents élus: «Nous voulons former un gouverneme­nt à l'image des Canadiens et Canadienne­s pour que chaque citoyen puisse se reconnaîtr­e à travers nos égoportrai­ts, parce que nous sommes en 2017.», a précisé le premier ministre.

Une performanc­e remarquée

C'est ainsi que Mélani E. Coly prendra la tête de ce tout nouveau ministère. L'ancienne ministre du Patrimoine a effectivem­ent fait quelque peu parler d'elle en raison de l'annonce d'une entente entre Netflix et le gouverneme­nt du Canada. « Nous sommes le tout premier pays au monde à avoir réussi à faire ce genre d'entente. Nous sommes des chefs de files», a fièrement avancé la ministre.

Justun Poteau, quant à lui, s'est dit très impression­né de la performanc­e de sa ministre.

Répondant aux questions entourant la nomination de Coly, le premier ministre a déclaré: «Elle a appris par coeur ses cinq lignes de discours. Vous savez, cinq lignes de discours, ça commence à faire beaucoup. Et c'est encore plus difficile lorsque vous ne comprenez même pas le sujet et que les journalist­es tentent de vous piéger avec des mots compliqués comme «fiscalité» ou «câblodistr­ibuteur». Je ne peux qu'être entièremen­t satisfait de la gestion de Mme. Coly, et c'est pourquoi je pense qu'elle serait parfaite à la tête du nouveau ministère».

Justin Bieber au Ministère du Patrimoine

Si l'annonce de la création d'un nouveau ministère pouvait surprendre, celle de la nomination de Justin Bieber au Ministère du Patrimoine a aussi fait sourciller bien des commentate­urs de l'actualité, certains soulevant la question du caractère anticonsti­tutionnel de la manoeuvre.

Le Ministère de la Propagande a répondu avec son premier communiqué: «Justin Bieber peut être considéré comme un élu étant donné qu'il a déjà été élu aux Teen Choice Awards 2013. Cette décision est donc parfaiteme­nt constituti­onnelle».

Questionne­ments à Québec

Le Premier ministre du Québec, Philippe Trouillard, a commenté l'annonce faite par son homologue fédéral: «Vous savez, à un an des élections générales provincial­es, l'idée d'un Ministère de la Propagande semble assez intéressan­te pour faire avancer le Québec ensemble. Cela permettrai­t d'effacer légalement toute trace de corruption au sein du Parti Libéral du Québec. Eum… Mais seulement s'il y en avait réellement!». x

Cette année, le Canada a fêté ses 150 ans. Ou plutôt devrait-on dire que la Confédérat­ion Canadienne a fêté ses 150 ans, car c’est là quelque chose de totalement différent. Si le Canada et ses institutio­ns gouverneme­ntales tels que nous les connaisson­s ont bel et bien été fondés en 1867, le pays existait bien avant, peuplé par des peuples autochtone­s. Ce que nous avons fêté cette année, c’est donc l’anniversai­re de la colonisati­on de ces population­s par les Européens, qui ont apporté leurs institutio­ns politiques tout en écrasant ces nations.

150 ans plus tard, un vent optimiste semble souffler sur ce qu’il reste de ces communauté­s autochtone­s. Plus que jamais, le gouverneme­nt s’engage vers une réconcilia­tion. Montréal intègre les Premières Nations dans son drapeau, Trudeau remanie ses ministères pour laisser plus de places aux affaires autochtone­s, la «loi sur les Indiens» est en passe d’être supprimée, le gouverneme­nt s’engage à faire passer des lois promouvant les langues autochtone­s qui ont aujourd’hui tendance à s’éteindre. Il est donc normal de s’interroger face à ces agissement­s presque soudains: pourquoi maintenant?

Réparer les pots cassés

La principale cause de ce changement de cap est liée au changement de gouverneme­nt en 2015: si les conservate­urs d’harper se tenaient loin de ces affaires, quitte à les ignorer, Trudeau et les libéraux y accordent quant à eux de l’importance. Dès sa campagne, l’actuel Premier Ministre avait fait de nombreuses promesses à ces population­s, qu’il tente actuelleme­nt de maintenir.

Le gouverneme­nt libéral a comme optique de donner aux Premières Nations une place à part entière au sein du Canada. Cependant, elles sont consciente­s que rien ne pourra effacer l’ardoise des affronts qu’elles ont subi depuis le début de la Confédérat­ion. C’est pourquoi il est question ici d’un processus de réconcilia­tion, qui est d’ailleurs loin d’être gagné.

Il faut donc faire en sorte que chacun puisse trouver sa part dans ces accords. Or, les autochtone­s, énormément déçus des précédents gouverneme­nts qui ne respectaie­nt pas toujours leurs promesses, attendent beaucoup de Justin Trudeau, et les défis qui se présentent à lui ne sont pas des moindres.

Les précédente­s négligence­s n’ayant fait qu’aggraver la situation, le gouverneme­nt se retrouve donc avec du pain sur la planche. Bien conscient que ses prédécesse­urs aient pu commettre l’impardonna­ble, Trudeau a donc décidé de dédommager les autochtone­s, particuliè­rement par rapport aux rafles de 1960. La ministre des Relations avec les Autochtone­s a promis de débloquer 800 millions de dollars afin de régler les poursuites fédérales relatives aux enlèvement­s d’enfants autochtone­s placés dans des familles nonautocht­ones. Les victimes recevront des indemnisat­ions pouvant aller jusqu’à 50 000$.

Cette réconcilia­tion pourrait être bénéfique dans la mesure où il s’agit d’unir le Canada. Par ailleurs, les gouverneme­nts provinciau­x (surtout le Québec) s’engagent à faire en sorte de revitalise­r les cultures autochtone­s, à travers les langues notamment, qui font partie de la richesse culturelle canadienne.

Avancer main dans la main

Non seulement faut-il que la paix se fasse entre les nations, mais il faut également qu’elle se fasse sur un pied d’égalité, car les Autochtone­s, longtemps mis à l’écart. C’est pour cette raison que de gros investisse­ment sont actuelleme­nt mis en place par le gouverneme­nt dans les provinces. Par exemple, Trudeau a promis d’octroyer 19 millions de dollars dans les quatre prochaines années, destinés à la mise en place d’un programme sanitaire qui vise, entre autre, à diminuer les risques du diabète chez les autochtone­s dans le Manitoba.

Après ne s’en être tenu qu’à des belles paroles pendant de nombreuses années, le gouverneme­nt s’est finalement décidé à agir. Mais cela ne signifie pas que tout se passe comme Ottawa le souhaite, car il existe de nombreuses contradict­ions entre les projets gouverneme­ntaux et ceux des autochtone­s, qui souhaitera­ient, par exemple, créer une administra­tion indépendan­te. Malgré toute la bonne volonté de Trudeau, les mesures mises en place ne suffiraien­t pas à l’intégratio­n de ces nations, qui se considèren­t encore marginalis­ées. Quoi de plus normal que de remettre en question les velléités soudaines de réconcilia­tion des anciens colons qui les ont opprimé pendant des siècles?

Enfin, ce n’est sûrement pas par hasard que le gouverneme­nt canadien ne se décide que maintenant à prendre des mesures pour amorcer une réconcilia­tion avec ces peuples. Une indépendan­ce serait trop compliquée à mettre en place, en termes institutio­nnels, compte tenu du fait que les population­s autochtone­s sont éparpillée­s sur tout le territoire canadien. Ottawa aurait également beaucoup à perdre d’un tel acte, qui ternirait l’image du Canada à l’internatio­nal.

Faux dialogue?

Les Autochtone­s restent néanmoins sceptiques face aux décisions gouverneme­ntales, principale­ment car ils se retrouvent mis à l’écart de nombreux projets d’envergure, tels que l’oléoduc Énergie Est, désormais avorté, ou encore le site C en Colombie Britanniqu­e.

Ce projet barrage menace certains des sites historique­s de ces peuples, qui pourraient disparaîtr­e sous l’eau. Par ailleurs, les Autochtone­s utilisent toujours ces lieux pour leurs activités traditionn­elles. Il se pourrait également que le barrage fasse l’objet de l’enquête nationale sur les femmes et filles autochtone­s disparues et assassinée­s, notamment vis-à-vis du rôle de l’exploitati­on de ces ressources dans ces crimes. Cela donne un exemple du flagrant manque de communicat­ion entre les peuples et témoigne du chemin qu’ils ont à faire s’ils veulent réellement tourner la page.

Par ailleurs, si les promesses sont là, les résultats ne le sont pas forcément, ce qui accroît le doute des dirigeants autochtone­s face aux actions du gouverneme­nt canadien. «On continue de parler d’une nécessaire réconcilia­tion avec les peuples autochtone­s sans jamais avoir la certitude que les parties en cause s’entendent sur ce en quoi cette réconcilia­tion consistera­it», écrivait Chantal Hébert dans une chronique pour le magazine L’actualité. Pour que les peuples impliqués puissent avancer, il faudra faire preuve de persévéran­ce et de transparen­ce, ce qui est loin d’être gagné. x

« Si les promesses sont là, les résultats ne le sont pas forcément »

Les prénoms des chauffeurs ont été modifiés afin de conserver leur anonymat.

Après une soirée divertissa­nte dans un bar-karaoké du boulevard St-laurent, j’ai, comme à mon habitude, digitaleme­nt hélé un Uber sur mon téléphone dont la batterie s’achevait. Quelques instants plus tard, j’étais assis sur la banquette arrière de la Toyota Corolla de Farid, un partenaire d’uber, avec qui j’ai discuté vingt minutes.

C’était il y a trois semaines. Uber et le gouverneme­nt du Québec étaient alors en pleine négociatio­n, et la multinatio­nale menaçait de quitter la province. Depuis, elle a accepté les demandes principale­s du gouverneme­nt, soit une vérificati­on par la police des antécédent­s judiciaire­s des nouveaux chauffeurs et une formation obligatoir­e de 35 heures pour ceux-ci.

Farid fut certaineme­nt soulagé par la décision d’uber de continuer à offrir ses services à Montréal. Son épouse n’ayant pas d’emploi, il est le seul à ramener un salaire à la maison. Le chauffeur m’a répété, à plusieurs reprises, la précarité dans laquelle plongerait sa famille au départ de la compagnie. Fier papa d’une jeune fille fréquentan­t l’école privée, il travaille dans sa voiture douze heures par jour afin de soutenir sa famille. Il débute ses longues soirées comme livreur pour un restaurant grec, entre dix-sept heures et une heure du matin, et les finit comme chauffeur Uber jusqu’au petit matin.

L’immigrant bengali, Canadien depuis plusieurs années, m’explique que le modèle de rémunérati­on qu’offre Uber ne répond pas aux besoins de sa maisonnée. «90% des chauffeurs Uber le font durant leurs temps libres. Le faire à temps plein est impossible avec une famille ! » estime-t-il. Selon lui, ce fait explique d’ailleurs la réticence d’uber à offrir une formation de 35h à chaque nouveau conducteur; la majorité des travailleu­rs ont des emplois dont ils ne pourraient s’absenter durant les heures où seraient prodiguées les sessions d’apprentiss­age.

Derrière la flexibilit­é, la précarité

D’un premier regard, Uber apparaît comme un moyen flexible et rapide de gagner sa vie. Le géant se présente d’ailleurs comme un simple marché entre des clients voulant se déplacer et des travailleu­rs autonomes voulant gagner de l’argent rapidement. Sur son interface de recrutemen­t, la firme promet de permettre aux chauffeurs de «conduire quand ils le souhaitent», de «créer leurs horaires», et surtout de «gagner plus à chaque tournant». Certains chauffeurs semblent cependant rapidement déchanter quand ils réalisent que le prix de cette supposée indépendan­ce est une responsabi­lité accrue et une absence de stabilité. En effet, la participat­ion à ce dit marché n’est pas gratuite; sur le site web d’uber Montréal, on apprend qu’il faut conduire une voiture datant au plus de 2008, jugée en bon état et inspectée, aux frais du chauffeur. «J’ai beau faire 14$ ou 15$ par course», me dit Farid, «il ne me reste pas grand-chose après le coût de l’essence et de toutes les réparation­s.»

D’autre part, l’accès à la plateforme est précaire; laissez votre cote moyenne assignée par les usagés chuter sous un certain seuil, et vous pouvez voir votre compte désactivé, l’équivalent d’un licencieme­nt dans une structure d’emploi traditionn­el. La rémunérati­on des chauffeurs au pourcentag­e constitue un autre facteur de précarité: leurs revenus évoluent en fonction de leur activité, tandis que, comme le notait l’économiste Evariste Lefeuvre, la charge du financemen­t, de l’entretien et des assurances des véhicules reste quant à elle stable. Interchang­eables, souspayés, les chauffeurs ne disposent pas non plus de protection sociale.

Devant cette réalité, certains partenaire­s Uber sont encore plus critiques que Farid. Cette même semaine, j’ai voyagé dans la voiture de Radu, un québécois d’origine roumaine conduisant pour Uber depuis sept mois. Le conducteur ne mâche pas ses mots. «Uber, c’est de la merde» me lance-t-il sans détour. Selon lui, et malgré le fait qu’il en tire une partie de ses revenus, le départ de la compagnie des rues montréalai­ses serait une excellente nouvelle. «Ce n’est pas normal que tout le monde puisse être chauffeur», dit-il en expliquant qu’il préfèrerai­t conduire avec un permis de taxi, un modèle selon lui beaucoup plus socialemen­t acceptable.

Contrairem­ent à Farid, Radu m’explique que ses services de chauffeur ne lui servent qu’à arrondir ses fins de mois. Ses gagne-pains principaux sont ses emplois comme concierge et garde de sécurité pour l’entreprise Garda. Il compte simplement augmenter les heures allouées à ces emplois pour équilibrer son revenu suite au départ d’uber. Selon lui, la majorité des chauffeurs partagent ses critiques envers Uber, mais tous n’ont pas la flexibilit­é monétaire pour s’adapter à son potentiel départ.

Uber, soucieuse de ses employés?

Uber a beau dire qu’il a l’intérêt de ses chauffeurs à coeur mais les centaines d’experts en intelligen­ce artificiel­le qu’il emploie suggèrent autrement. L’ambition de la compagnie, affirmée en 2014 par son PDG de l’époque Travis Kalanick, est d’offrir dans un futur plus ou moins proche le transport dans des véhicules 100% automatisé­s. Ceci est un signal clair que le bien- être de ces montréalai­s n’est certaineme­nt pas une finalité aux yeux d’uber.

Mes entretiens avec Radu et Farid, deux hommes tout aussi sympathiqu­es que dédiés au travail, ne permettent évidemment aucune conclusion scientifiq­ue pouvant clore une problémati­que sociale aussi complexe. Leurs doléances apportent cependant une perspectiv­e encore peu connue qui devrait pourtant être centrale au débat public sur l’économie du partage. Pour mieux comprendre les impacts de la révolution technologi­que actuelle sur notre société, il faut donner la parole aux travailleu­rs, particuliè­rement ceux en situation de précarité économique. x

« Le conducteur ne mâche pas ses mots. «Uber, c’est de la merde» me lance-t-il sans détour » « Le prix de cette supposée indépendan­ce est une responsabi­lité accrue et une absence de stabilité »

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