Le Devoir

La démocratie directe de Robert Burns

Le PQ s’est enfermé dans les institutio­ns britanniqu­es lui donnant accès au pouvoir

- DAVE NOËL ROBERT BURNS LE MINISTRE DE LA DÉMOCRATIE CITOYENNE André Larocque Éditions Trois-Pistoles Trois-Pistoles, 2016, 225 pages L’auteur sera au stand 91 du Salon internatio­nal du livre de Québec le 16 avril. Le Devoir

La Loi sur le financemen­t des partis politiques devait être le premier legs du gouverneme­nt de René Lévesque. Cette législatio­n avant-gardiste a toutefois été réduite à l’impuissanc­e par l’inertie du Directeur général des élections avant d’être dénaturée sous Pauline Marois, estime l’ancien sous-ministre péquiste André Larocque. Pour ce «lévesquist­e» inconditio­nnel, le temps est venu de parachever les réformes entreprise­s il y a près de 40 ans par Robert Burns, à qui il consacre ce livre-témoignage.

Le futur ministre indépendan­tiste est né en 1936 d’un père livreur de pain unilingue anglophone et d’une femme de ménage canadienne-française. Robert Gordon Burns est alors destiné à devenir «un petit Anglais », écrit Larocque, qui nous le montre vêtu d’un chandail des Maple Leafs de Toronto l’année des 50 buts de Maurice Richard. La mort du paternel le pousse toutefois vers l’est ouvrier de Montréal, où il forge ses idéaux socialiste­s.

Après des études en droit, l’avocat moustachu entre à la CSN, où il oeuvre jusqu’à son élection sous la bannière du Parti québécois en 1970. Réélu trois ans plus tard, on lui préfère Jacques-Yvan Morin pour diriger l’aile parlementa­ire péquiste. Il est ainsi privé d’un affronteme­nt direct avec le premier ministre libéral Robert Bourassa. Selon Larocque, cette tribune lui aurait permis d’aspirer à la direction du parti de René Lévesque, dont le leadership est déjà contesté. «Qu’aurait été un gouverneme­nt Burns ? demande l’auteur dans un élan fantaisist­e. Résolument social-démocrate, c’est sûr. Inconditio­nnellement indépendan­tiste aussi… et le grand réformateu­r de nos institutio­ns démocratiq­ues. Ah le beau rêve!»

Le réformiste démocrate

Burns est nommé ministre d’État à la Réforme électorale et parlementa­ire dans les mois qui suivent la victoire péquiste de 1976. Il planche d’abord sur la réforme du financemen­t des partis, avant de s’attaquer à la refonte de la Loi électorale et à la mise en place de la Loi sur les consultati­ons populaires. Il donne également le coup d’envoi à la version québécoise du « Freedom of Informatio­n Act », la loi sur l’accès à l’informatio­n dont on attend toujours la modernisat­ion.

Bien qu’il échappe quelques anecdotes ici et là, Larocque se concentre sur l’esprit des lois élaborées par son mentor jusqu’à sa démission à la suite d’un infarctus en 1979. S’il ne ménage pas les éloges pour son sujet décédé il y a deux ans, le biographe est sans merci pour les dépositair­es de son héritage. «La commission Charbonnea­u a fait le travail qui aurait pu et aurait dû être fait par le Directeur général des élections depuis plus de trente ans », s’exclame l’auteur, en rappelant l’étendue des pouvoirs d’enquête du DGEQ.

L’éphémère gouverneme­nt Marois est également écorché pour avoir rehaussé le financemen­t étatique des organisati­ons politiques en plafonnant les contributi­ons citoyennes. «Un parti incapable de subsister par un appui financier populaire ne mérite pas de continuer à exister », écrivait Burns dans sa dernière lettre ouverte publiée dans Le Devoir en 2012. Larocque reproche surtout au parti de René Lévesque d’avoir abandonné la réforme du mode de scrutin et le projet de loi sur les référendum­s d’initiative populaire. «S’il avait été adopté, avec ce qui s’est passé à la suite de l’échec de lac Meech, écrit-il, le Québec serait un État souverain depuis 1990. »

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BERNARD M. LAUZE LE DEVOIR Robert Burns, à l’extrême gauche, alors qu’il était au PQ.

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