L’immobilier résidentiel passe de la résistance à la résilience
Ottawa a pourtant resserré les règles sur les prêts hypothécaires assurés par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) à au moins cinq reprises depuis la crise. Et l’économie canadienne tarde toujours à s’engager sur le chemin d’une reprise digne de ce nom. Rien n’y fait. L’immobilier résidentiel défie encore toutes ces alertes à la surchauffe.
Les dernières données sur le marché de la revente sont plutôt éloquentes. Les ventes résidentielles ont connu un mois record en mars, a souligné vendredi l’Association canadienne de l’immeuble (ACI). Un recul a toutefois observé là où il y a présence manifeste d’une bulle. Les marchés de Vancouver et de Toronto subissaient vraisemblablement les premiers effets des nouvelles règles du gouvernement fédéral exigeant une mise de fonds plus importante sur l’achat d’une propriété dont la valeur est supérieure à 500 000 $.
Rappelons qu’à compter du 15 février, l’acheteur d’une propriété de plus de 500 000 $ doit, au moment de souscrire un prêt, fournir une mise de fonds minimale de 10% sur la partie qui excède 500 000 $. Cela s’ajoutera au taux de 5 % qui s’applique à la première tranche de 500 000$. Quant aux propriétés de plus d’un million, la mise de fonds minimale est déjà de 20 %.
Ainsi, les ventes dans la région de Toronto ont diminué de 1,8% par rapport à février, et elles ont baissé de 0,3% à Vancouver. Mais l’ACI a calculé une augmentation moyenne de 1,5% à l’échelle canadienne. Les ventes étaient en hausse dans près de six marchés locaux sur dix, dont ceux de Montréal et de Calgary.
Jeudi, la Fédération des chambres immobilières du Québec indiquait que les ventes immobilières résidentielles ont affiché une hausse de 8% au premier trimestre de 2016 par rapport au trimestre correspondant de 2015. Il s’agissait d’une septième augmentation trimestrielle consécutive et du meilleur début d’année en trois ans à ce chapitre. Pour le marché montréalais, la Chambre immobilière du Grand Montréal parlait du meilleur début d’année en quatre ans quant aux transactions conclues.
Le prix moyen a également poursuivi son ascension. Il s’établissait à 508 567$ en mars au niveau canadien, soit une progression de 15,7% par rapport à mars 2015. Si on exclut la distorsion provoquée par les marchés de Vancouver et de Toronto, le prix moyen passe à 366 950$, en hausse de 10,4 %.
Au Québec, le prix médian des unifamiliales s’est chiffré à 233 000$ à la fin du premier trimestre, soit une progression de 2% sur un an. Le prix médian pour l’unifamiliale dans la région de Montréal est de 285 000 $, de 246 000 $ à Québec.
Dans son évaluation trimestrielle du marché de l’habitation, publiée en janvier, la SCHL soulignait que les conditions problématiques les plus courantes dans les 15 régions métropolitaines de recensement visées par l’étude sont la surévaluation et la construction excessive. La surévaluation était mesurée dans huit régions et la construction excessive, dans sept. Des signes élevés de conditions problématiques étaient observés à Calgary, Saskatoon, Regina et Toronto.
Mais dans l’ensemble canadien, «la surchauffe et l’accélération des prix des logements ne sont pas à craindre pour le moment», disait la SCHL. La prochaine évaluation trimestrielle doit être publiée à la fin d’avril.
« La hausse des prix est également un enjeu pour la stabilité financière des ménages, alors que l’endettement associé aux prêts hypothécaires ne cesse de s’accroître», a rappelé vendredi Benoit P. Durocher, économiste principal au Mouvement Desjardins.
Statistique Canada indiquait le 11 mars que le ratio d’endettement au revenu disponible avait atteint un nouveau sommet au dernier trimestre de 2015, à 165,4 %. La veille, Equifax Canada soulignait cependant que malgré cet endettement record, le taux de défaillance à 90 jours et plus (en excluant les hypothèques) demeurait à un creux historique à l’échelle canadienne, à 1,09 %.
Et Statistique Canada de renchérir que le ratio du service de la dette des ménages, qui correspond au total des paiements obligatoires de capital et d’intérêts en proportion du revenu disponible, s’est établi à 13,8 % au quatrième trimestre de 2015, comparativement à 13,5% au troisième trimestre. Et que le ratio du service de la dette (intérêts seulement), qui correspond aux intérêts versés sur les emprunts hypothécaires et non hypothécaires des ménages en proportion du revenu du revenu disponible, se maintenait à un creux record de 6,2 %.
Il reste un peu de jeu.