Le Devoir

Le gel de la production attendra

L’Iran réitère qu’il doit d’abord retrouver son rythme d’avant les sanctions avant de souscrire à un plan censé rehausser les prix

- AMAL BELALLOUFI MARTINE PAUWELS à Alger

La réunion des pays producteur­s de pétrole prévue à Alger mercredi a peu de chances de déboucher sur un accord pour geler la production et faire remonter les prix, notamment en raison des divergence­s entre l’Iran et l’Arabie saoudite exprimées mardi.

Réunis à Alger à l’occasion d’un forum énergétiqu­e internatio­nal, les pays de l’Organisati­on des pays exportateu­rs de pétrole (OPEP) vont se réunir de manière informelle mercredi après-midi pour tenter de trouver un moyen de faire remonter le prix du baril, bas depuis mi-2014. Mais comme anticipé, de fortes divergence­s de vues notamment entre l’Iran et l’Arabie saoudite, deux grandes puissances rivales du Moyen-Orient, risquent de bloquer un accord, comme cela avait déjà été le cas à Doha en avril.

«Atteindre un accord en deux jours ne figure pas dans notre agenda », a déclaré dès mardi le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, à Alger. «Nous avons besoin de temps pour de plus amples consultati­ons », a-t-il dit avant d’ajouter qu’un accord pourrait éventuelle­ment être trouvé lors de la réunion de

l’OPEP le 30 novembre à Vienne.

L’Iran affirme notamment vouloir avant tout rétablir ses niveaux de production antérieurs aux sanctions internatio­nales liées à son programme nucléaire, sanctions désormais levées. «Nous ne sommes pas prêts» à geler notre production à ses niveaux actuels, a-t-il dit, affirmant que leur objectif de production était de 4 millions de baril par jour, contre de 3,6 à 3,8 actuelleme­nt selon les sources.

Les prix du pétrole ont été divisés par plus de deux depuis mi-2014 en raison d’une offre excédentai­re, fruit du boom des hydrocarbu­res de schiste américains et de la stratégie de l’OPEP d’ouvrir à fond les robinets pour maintenir ses parts de marché.

Plusieurs pays producteur­s fortement dépendants des revenus pétroliers plaident pour un gel de production, mais certains gros producteur­s s’y opposent, comme l’Iran, ou même l’Arabie saoudite si Téhéran ne se joint pas au projet. «Un seul pays ne peut pas influer sur le marché », a réagi le ministre saoudien Khaled alFaleh aux déclaratio­ns de son homologue iranien.

Il a aussi soufflé le chaud et le froid sur cette réunion d’Alger. Il a d’une part affirmé que son pays n’avait pas réellement besoin d’un accord: «Je demeure optimiste sur la base des fondamenta­ux du marché qui prennent la bonne direction», at-il dit, sous-entendant que le marché était sur la voie d’un rééquilibr­age, même si ce processus était un peu plus long que prévu. Mais il a ajouté être optimiste «aussi sur le fait que les producteur­s parviennen­t à une vision commune ».

«Ce qu’a dit la République islamique d’Iran, mais aussi les autres pays membres [de l’OPEP] fait entièremen­t partie des négociatio­ns», a voulu temporiser le secrétaire général du cartel, le Nigérian Mohammed Barkindo. « Au minimum, la réunion informelle préparera les premiers éléments d’un accord », a déclaré une source proche du gouverneme­nt algérien.

Les marchés financiers n’ont pas été surpris outre mesure par ces prises de position, la plupart des experts jugeant peu probable qu’Alger soit le théâtre d’un consensus. «L’espoir qu’un gel de production de brut puisse être atteint à Alger cette semaine est déçu, après que l’Arabie saoudite se soit jointe à l’Iran pour avertir que ces discussion­s n’étaient que consultati­ves », a expliqué Neil Wilson, d’ETX Capital.

L’autre grand exportateu­r de pétrole, la Russie, non membre de l’OPEP mais également présente à Alger, a dit être prête à consentir un effort pour réduire sa production, aujourd’hui à son maximum, selon une source proche du gouverneme­nt algérien. Mais le ministre russe de l’Énergie, Alexandre Novak, a précisé à des journalist­es que son pays se positionne­rait à l’issue de la réunion informelle du cartel.

De son côté, le ministre irakien du Pétrole, Jabbar Ali Hussein al-Luiebi, a déclaré attendre des résultats positifs de la réunion d’Alger, «qui seront un facteur essentiel dans la stabilisat­ion et l’équilibre du marché pétrolier mondial […] Le but est la hausse des prix du pétrole. Nous soutenons tout effort qui permettra d’équilibrer le marché».

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RYAN KRAMDI AGENCE FRANCE-PRESSE Le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, entouré de journalist­es à la rencontre d’Alger: «Atteindre un accord en deux jours ne figure pas dans notre agenda.»

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