SYRIE ALEP SOUS LES BOMBES
Les deux principaux hôpitaux de la partie rebelle d’Alep ont été bombardés
La ville d’Alep a de nouveau été la cible de bombardements mercredi. Deux hôpitaux situés dans des zones rebelles ont été touchés, amenant une centaine de médecins syriens excédés à faire la grève pendant trois heures. Alors que l’ONU dénonce des «crimes de guerre», Washington menace de lâcher Moscou.
En réaction au bombardement de deux hôpitaux à Alep tôt mercredi, une centaine de médecins ont aussitôt protesté en tenant une grève symbolique de trois heures en aprèsmidi. Impuissants devant ce qu’ils qualifient de « massacre », les médecins, à bout de souffle, réclament une trêve des hostilités et l’ouverture immédiate d’un corridor humanitaire indépendant.
«Ils sont épuisés, notamment à Alep, ça n’arrête pas. On opère des gens par terre, il n’y a plus de lits. Et même dans les centres de santé aux alentours, c’est ponctué de bombardements », a expliqué au Devoir Jehan Lazrak-Toub, responsable des communications pour l’Union des organisations de secours et des soins médicaux (UOSSM-France).
Tôt mercredi, deux hôpitaux (M2 et M10) et une boulangerie située dans des zones rebelles d’Alep ont été touchés par des frappes aériennes et ne peuvent plus fonctionner, a indiqué la Syrian American Medical Society (SAMS), l’ONG basée aux États-Unis qui les gère. Deux patients ont été tués et au moins deux membres du personnel soignant ont été blessés dans ces attaques.
C’est ce qui a poussé des médecins et le personnel médical de trois organisations humanitaires (UOSSM-France, SAMS et SEMA) qui opèrent des centres de santé et fournissent du matériel médical à de nombreux hôpitaux en Syrie à faire la grève des soins, seulement de ceux qui étaient non urgents.
En début d’après-midi, ils sont sortis devant leurs établissements pour brandir des pancartes qui disaient «Des médecins, pas des ennemis » et «Protégeons les civils». « L’initiative est venue du personnel médical sur place», poursuit Mme Lazrak-Toub. Elle précise que la grève n’a pas eu lieu à Alep-Est où les besoins opératoires sont trop grands. «À Bwaibiye, nos équipes ont dû reprendre leur travail en urgence parce qu’il y a eu un bombardement pendant [la grève] ».
La situation s’enlise
Depuis une semaine, l’offensive de l’armée syrienne, appuyée par la Russie, pour déloger les rebelles et reprendre le contrôle sur la totalité d’Alep, a fait une centaine de morts. Pour plusieurs, ces attaques sont délibérées et visent le personnel médical et les hôpitaux, pour forcer les quelque 250 000 habitants d’Alep vivant dans les zones rebelles à s’en aller. UOSSMFrance a pour sa part perdu cinq membres de son personnel, trois infirmiers et deux chauffeurs d’ambulances. « Ils ont été ciblés, c’est sûr », a déclaré l’anesthésiste Ziad Alissa, qui travaille pour l’UOSSM-France et qui était à Alep en avril. De nombreuses pannes d’électricité compliquent le travail des médecins et font parfois fermer temporairement certains secteurs de l’hôpital.
«Le personnel soignant ne peut plus travailler dans ces conditions. Il a fait une grève pour montrer la situation catastrophique, vraiment catastrophique, a-t-il ajouté. Ce matin, un collègue qui est là-bas m’a dit: “Je ne sais pas quand ce sera à mon tour de mourir. ” Il y a la mort partout, et des blessés partout. Il n’y a plus d’espoir.»