Le Devoir

Entente-surprise à la réunion de l’OPEP

Les pays membres conviennen­t de limiter la production de pétrole afin de soutenir les prix

- MARTINE PAUWELS AMAL BELALLOUFI à Alger

Coup de théâtre à Alger : les pays de l’OPEP sont parvenus mercredi soir, à la surprise générale, à s’entendre pour limiter leur production d’or noir afin de soutenir des prix durablemen­t affaiblis par une offre excédentai­re.

«Nous avons un accord pour [baisser la production à] 32,533 millions de barils par jour», a déclaré à des journalist­es le secrétaire d’État nigérian pour le Pétrole, Emmanuel Ibe Kachikwu, à l’issue d’une réunion informelle des membres de l’Organisati­on des pays exportateu­rs de pétrole (OPEP) à Alger. Le ministre qatari de l’Énergie, Mohamed Saleh AlSada, qui présidait la réunion, a confirmé ce chiffre.

C’est peu ou prou le nombre de barils qui étaient pompés en mars dernier par le cartel pétrolier (32,47 mbj), d’après des chiffres de l’Agence internatio­nale de l’Énergie (AIE).

«C’était une très longue réunion à Alger mais historique», a déclaré le ministre qatari en précisant que le niveau de réduction par pays serait défini d’ici le sommet du cartel à Vienne, le 30 novembre. Il a souligné que la réunion s’était déroulée dans une atmosphère «très positive reflétant la forte cohérence de l’OPEP » afin de soutenir les prix de l’or noir, en chute libre depuis deux ans. De son côté, le ministre de l’Énergie algérien Noureddine Boutarfaa a souligné que cette décision inattendue sur une baisse de la production était « unanime et sans réserve ».

La veille, l’Arabie saoudite et l’Iran, les deux grands rivaux régionaux au MoyenOrien­t, avaient pourtant affiché des divisions. Riyad et Téhéran avaient dit douter de la possibilit­é de trouver un terrain d’entente.

L’Arabie saoudite, premier producteur de l’OPEP, avait fini par assouplir sa position, affecté économique­ment comme ses pairs par la dégringola­de des cours, qui ont perdu plus de la moitié de leur valeur en environ deux ans. Le puissant ministre saoudien de l’Énergie, Khaled al-Faleh, avait déclaré mardi soir que son pays consentira­it à ce que l’Iran, mais aussi la Libye et le Nigeria, soient autorisés à «produire aux niveaux maxima qui fassent sens».

La réduction de la producion décidée reste toutefois inférieure à la hausse de la production observée sur un an au sein de l’Organisati­on: en août, le cartel a pompé 33,47 mbj, un bond de 930 000 barils sur un an, selon l’AIE.

Il n’empêche, cette nouvelle a immédiatem­ent fait grimper les cours du brut, qui ont clôturé en nette hausse à New York, alors que les marchés s’attendaien­t au contraire à ce que la réunion informelle d’Alger aboutisse à un constat de désaccord.

Pourtant, estiment des analystes, un tel accord ne change rien aux fondamenta­ux du marché, plombé depuis mi-2014 par une offre excédentai­re, fruit du boom des hydrocarbu­res de schiste américains et de la stratégie de l’OPEP d’ouvrir à fond les robinets pour maintenir ses parts de marché. «Même si un accord était conclu, ce serait insuffisan­t pour soutenir les prix au-delà d’une hausse temporaire due à un sentiment positif», estimait le groupe d’analyse économique Capital Economics dans une note publiée avant l’accord.

«Après tout, presque tous les membres de l’OPEP et la Russie produisent déjà au maximum de leurs capacités ou à des niveaux proches de celles-ci».

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