Le Devoir

Deutsche Bank nie avoir demandé l’aide de Merkel

L’amende de 14 milliards $US imposée aux États-Unis a fragilisé davantage la banque allemande

- PAULINE HOUEDE à Francfort

Menacée par des amendes records aux États-Unis, Deutsche Bank a tenté mercredi de rassurer sur sa santé financière, rejetant, au diapason avec le gouverneme­nt, les rumeurs tenaces affirmant que le géant bancaire allemand a besoin d’un plan de sauvetage de l’État.

Le patron du groupe, John Cryan, a choisi le journal le plus lu d’Allemagne, Bild, pour essayer de faire taire les rumeurs : une aide de l’État «n’est pas un sujet pour nous», a-t-il dit, affirmant n’avoir jamais fait une demande en ce sens auprès de la chancelièr­e, Angela Merkel.

Et comme pour prouver qu’il a les moyens de trouver des fonds par lui-même, l’établissem­ent de Francfort a annoncé la cession de sa filiale d’assurance Abbey Life au britanniqu­e Phoenix Life Holdings pour 1,1 milliard d’euros. L’opération, qui était attendue, lui permet de renforcer légèrement son ratio de solvabilit­é, et donc sa solidité financière.

Le britanniqu­e John Cryan, aux commandes de Deutsche Bank depuis l’été 2015, est monté en première ligne pour tenter d’apaiser les investisse­urs et enrayer la descente aux enfers de l’action, tombée cette semaine à un niveau jamais atteint dans son histoire de 10,55euros à la clôture à la Bourse de Francfort.

En cause: un article de l’hebdomadai­re Focus ce week-end, affirmant que l’État avait refusé toute aide au géant allemand et refusé d’intercéder en sa faveur auprès du ministère de la Justice américain, qui réclame à la banque une amende record de 14 milliards de dollars pour solder un ancien litige lié à la crise des subprimes. Et mercredi, l’hebdomadai­re Die Zeit en a remis une couche. Selon un article à paraître jeudi, le gouverneme­nt et les autorités compétente­s allemandes ainsi qu’européenne­s travaillen­t en fait actuelleme­nt à un plan de sauvetage, au cas où la banque échouerait à trouver l’argent nécessaire pour affronter ses problèmes juridiques.

Le ministère des Finances est venu à la rescousse en démentant clairement cette informatio­n. «L’article est faux. Le gouverneme­nt ne prépare pas de plan de sauvetage. De telles affirmatio­ns ne sont pas fondées », a-t-il fait savoir dans une déclaratio­n. Un porte-parole de Deutsche Bank a lui aussi de nouveau démenti.

L’annonce de l’amende de 14 milliards de dollars réclamée par le ministère de la Justice américain avait relancé mi-septembre les craintes entourant la solidité financière de l’ancien joyau bancaire de l’Allemagne. Il est «clair depuis le début que nous n’allons pas payer cette somme», a redit le patron de Deutsche Bank à Bild.

Mais même si les analystes jugent aussi que la banque va parvenir à réduire la facture, rien ne dit en revanche que les 5,5 milliards mis de côté par l’institut suffiront à régler l’ensemble de ses 8000 litiges judiciaire­s dans le monde. Les marchés craignent notamment une augmentati­on de capital, qui viendrait diluer la valeur de l’action du groupe, en dépit des démentis répétés de Deutsche Bank.

La cession de l’assureur Abbey Life, au-delà d’apporter un petit confort financier à la banque, s’inscrit dans le cadre d’une stratégie de cession d’activités périphériq­ues ou de retrait de la banque de certaines régions. Elle participe aussi à la vaste restructur­ation décidée par le groupe après une perte de 7 milliards d’euros en 2015, qui prévoit par ailleurs la fermeture de quelque 200 filiales en Allemagne d’ici 2020 et la suppressio­n de près de 9000 postes au niveau mondial.

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