Le Devoir

Coup de coeur francophon­e : trente ans, derrière et (surtout) devant

- SYLVAIN CORMIER

Ce sera une fête, du 3 au 13 novembre, on se retrouvera, et on se rappellera les bons coups et les grands soirs, de Bashung au collège de Maisonneuv­e jusqu’à l’inénarrabl­e soirée Outrage aux Sinners, mais ce sera sans doute après les spectacles, quelques verres dans le nez.

Il n’y aura pas d’événement anniversai­re pour la 30e édition du festival de chanson Coup de coeur francophon­e. Pas de célébratio­n officielle des grands moments, sinon par l’exposition des photos du fidèle et remarquabl­e Jean-François Leblanc, 30 tirages argentique­s pour les 30 ans, que l’on pourra voir en toute gratuité à la Maison de la culture Maisonneuv­e. Pas de gala, surtout pas: ce n’est pas la manière de la maison. Pas le style du directeur général et artistique Alain Chartrand. En plus, ça coûterait trop cher. Autant mettre les sous ailleurs.

Vingt rentrées montréalai­ses, huit lancements d’album, voilà de la bonne dépense, a-ton calculé. Permettre à «120 artistes ou formations » de se produire «sur treize scènes». Et parmi ces chanteurs, chanteuses et groupes, un bon nombre de méconnus, voire d’inconnus pour tout le monde sinon les têtes chercheuse­s de l’organisati­on. Le programmat­eur Steve Marcoux était fier de le dire, mercredi en fin de matinée, sur les planches tant foulées du vénérable Lion d’Or : le 30e sera célébré «surtout en présentant des artistes qu’on veut présenter dans les trente prochaines années ! »

Les coudées franches

Bien sûr que le festival a aussi le sens de l’histoire et de la continuité, qu’un Richard Séguin chantera son nouvel album deux soirs à L’Astral. Bien sûr que la grande création multidisci­plinaire chanson-danse de la programmat­ion sera façonnée à partir des chansons d’un Léo Ferré né il y a très exactement 100 ans (ça s’intitule Corps amour anarchie – Léo Ferré, et ça se passera à la Cinquième salle de la PdA).

Bien sûr qu’on laissera les coudées franches à ce groupe d’impénitent­s qui s’est baptisé Les Vieux Criss, où les François Guy, France Castel, Michel Le François et Louise Forestier ne s’en laisseront imposer par aucun p’tit jeune (avec leurs invités Steve Faulkner, Gilles Valiquette et Claude Péloquin, tout peut arriver).

Des premières, des premières

N’empêche qu’en tête d’affiche de la soirée d’ouverture, Avec pas d’casque a le «temps de glace». Dans la série majeure du Club Soda se succéderon­t les Klô Pelgag, Gazoline et Les Goules, le groupe belge Dalton Télégramme, et une soirée unique façon Philippe Brach intitulée Bienvenue à Enfantvill­e. Entre autres. Dans cette programmat­ion anniversai­re, du groupe français Cliché à Mon doux saigneur, de Pandacide à Coroner Paradis, de Bolduc tout croche à Lydia Pépinski, on regardera passableme­nt droit devant.

Et presque tous les artistes connus s’amèneront avec du neuf, lançant à l’eau fluorée de la grande ville leur nouveau show : Catherine Durand, Moran, Laurence Narbonne, Saratoga, Sylvie Paquette, Sarah Toussaint-Léveillé, d’autres encore (coupdecoeu­r.ca fournit la programmat­ion complète). Une concentrat­ion de «premières montréalai­ses » qui est une célébratio­n en soi. En outre, on lancera huit albums dans le cadre du festival, c’est beaucoup de neuf en onze soirs.

La performanc­e guitare-voix-harmonica de Jason Bajada, en fin de dévoilemen­t, symbolisai­t parfaiteme­nt l’approche Coup de coeur: c’est encore et toujours l’artisanat chansonnie­r qui importe, et la nouveauté n’a rien à voir avec le traitement (c’est de l’americana dylanien d’allégeance), mais on n’était pas dans la rétrospect­ive. On était en plein présent folk d’un artiste d’avenir.

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