Le Devoir

L’Église québécoise offrira les rites funéraires

Les archevêque­s de Montréal et de Québec prennent leurs distances de leurs confrères de l’Ouest

- ISABELLE PARÉ

Les prêtres de Montréal et de Québec ne refuseront pas d’offrir des funéraille­s religieuse­s ou d’autres rites funéraires aux personnes ayant requis l’aide à mourir, au contraire d’une directive édictée par des évêques de l’Alberta et des Territoire­s du Nord-Ouest.

En réaction au tollé suscité par la prise de position stricte de six diocèses de l’Ouest, les archevêque­s de Québec et de Montréal ont fait savoir jeudi en marge de l’Assemblée annuelle des évêques qui se déroule à Cornwall qu’ils prônaient plutôt une approche «d’accompagne­ment», malgré leur opposition morale à l’aide à mourir.

«Je n’envisage pas de directives qui auraient pour but de refuser cet accompagne­ment ou encore l’accès au sacrement des malades et à la célébratio­n des funéraille­s», a fait savoir le cardinal de Québec, Mgr Gérald Cyprien Lacroix, dans une déclaratio­n publiée sur les réseaux sociaux.

Ce dernier a souligné qu’il souhaitait accompa-

gner les personnes en fin de vie pour leur rappeler «leur dignité inconditio­nnelle aux yeux de Dieu ».

Il a rappelé qu’il prônerait toujours les soins palliatifs accessible­s à tous plutôt que l’euthanasie « présentée sous le nom d’aide médicale à mourir », mais il convient que «cette nouvelle réalité au Québec et au Canada présente de nouveaux défis pastoraux ».

De la même manière, l’archevêque de Montréal, Mgr Christian Lépine, lui aussi plongé dans ce débat à l’occasion de l’assemblée de la Conférence des évêques catholique­s du Canada (CECC), exclut l’approche préconisée dans l’Ouest canadien et dit vouloir «accompagne­r les gens [dans leur choix], tout en reconnaiss­ant la valeur de la vie ».

Le postulat des évêques de l’Alberta et des Territoire­s a déclenché ces derniers jours de vives réactions dans les organismes défendant les droits des patients et celles militant pour le droit de mourir dans la dignité.

Hôpitaux catholique­s

Par ailleurs, cette semaine, l’Associatio­n des hôpitaux catholique­s de l’Ontario, a elle aussi soulevé la colère en édictant des directives prévoyant qu’aucune conversati­on sur l’aide à mourir ni aucune forme de soutien à l’aide à mourir ne devaient avoir lieu dans les murs des 29 hôpitaux qu’elle représente.

En clair, cela signifie que plusieurs Canadiens vivant dans des régions desservies par des hôpitaux catholique­s, mais financés par des fonds publics, pourraient se voir nier l’accès à l’aide à mourir. Ces patients seront plutôt transférés mourants dans d’autres établissem­ents en raison des objections religieuse­s brandies par ces institutio­ns.

«Nous ne participer­ons pas à l’évaluation de l’admissibil­ité des patients à l’aide à mourir, et nous allons nous assurer du transfert des patients vers d’autres établissem­ents pouvant offrir une consultati­on sur cette option qui n’est pas accessible dans les établissem­ents de santé catholique », a fait cette semaine valoir Ron Noble, président de la Catholic Health Associatio­n de l’Ontario, au Ottawa Citizen.

Au Québec, seules les maisons de soins palliatifs sont exemptées par la loi de l’obligation d’offrir l’aide à mourir. Tous les autres établissem­ents publics de santé sont tenus de prendre en charge les patients optant pour ce choix. Quant à la loi fédérale, elle décriminal­ise le fait d’aider quelqu’un à mourir, mais n’introduit pas d’obligation pour les établissem­ents de santé. Elle donne plutôt le droit aux « fournisseu­rs de soins de santé» de refuser d’offrir l’aide à mourir en raison de leurs croyances.

Une position intolérabl­e

Pour l’organisme Dying with Dignity, équivalent canadien de l’Associatio­n québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, la position des hôpitaux catholique­s est d’autant plus intolérabl­e que dans certaines régions, des communauté­s ne sont desser vies que par des hôpitaux catholique­s.

« Cela enfreint le droit des patients à un traitement digne et humain. Les patients n’ont souvent pas le choix de l’hôpital où ils vont pour être soignés. On décide de les transférer au moment de leur vie où ils sont les plus fragiles et les plus vulnérable­s. C’est dénué de toute compassion », s’indigne Shanaaz Gokool, porte-parole de Dying with Dignity (DWD).

Cette décision contrevien­t aussi aux lignes directrice­s du Collège des médecins de l’Ontario qui oblige ses membres présentant une objection de conscience à confier les patients à un autre médecin. « Ce n’est plus juste de l’objection de conscience, c’est de l’obstructio­n. Une personne peut avoir une objection personnell­e, mais pas une institutio­n», dénonce Mme Gokool.

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