Le Devoir

Vers une présence accrue du Québec à l’étranger

- MARCO BÉLAIR-CIRINO Correspond­ant parlementa­ire à Québec

Après avoir consenti «efforts» et «sacrifices», la ministre Christine St-Pierre veut donner un nouveau souffle à l’action internatio­nale du Québec.

Elle s’engage à dévoiler une nouvelle politique internatio­nale du Québec, qui sera assortie d’un plan d’action, dans la foulée du dépôt du 3e budget Leitão au printemps 2017. «Évidemment qui dit politique, dit nouvel argent!» signale Mme St-Pierre à l’approche du 50e anniversai­re du ministère des Relations internatio­nales (MRI). «On est capable de faire un peu plus à ce chapitre-là. De quel ordre? Évidemment, je ne peux pas vous le dire. C’est [en fonction] des discussion­s que j’aurai. C’est [le ministre des Finances et président du Conseil du trésor] qui va trancher à la fin de la journée», souligne-t-elle, avant d’esquisser un sourire.

Une délégation générale à Dakar

La ministre des Relations internatio­nales donnera le coup d’envoi des consultati­ons sur la nouvelle politique internatio­nale du Québec dimanche à Montréal. Elle compte notamment solliciter l’avis des participan­ts sur les «endroits» qui s’avéreraien­t, selon eux, «les plus “payants”» pour le «rayonnemen­t» du Québec.

Cela dit, elle entend d’ores et déjà accroître la présence du Québec sur le continent africain, et ce, à partir de Dakar, où le Québec a un bureau depuis mars. «Je trouvais ça inconcevab­le qu’en tant qu’État membre de l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie on n’ait pas de bureau officiel en Afrique», confie Mme St-Pierre. «Idéalement ce bureau-là, on voudrait le voir grandir», ajoute-telle, croisant les doigts afin qu’il devienne une délégation générale au cours des trois prochaines années. «[Cette délégation générale] pourrait desservir les pays de la Francophon­ie» avec l’aide «peut-être, peut-être» de «bureaux satellites».

Le Québec dispose actuelleme­nt de sept délégation­s générales: deux en Amérique du Nord (New York et Mexico), quatre en Europe (Paris, Londres, Bruxelles et Munich) et, enfin, une en Asie (Tokyo), où Mme St-Pierre souhaite aussi « accroître la présence» du Québec.

Diplomatie «agile» et «flexible»

L’enthousias­me de la ministre sera sans doute accueilli comme une bouffée d’oxygène au sein de la diplomatie québécoise. Entre 2012 et 2016, les gouverneme­nts péquiste et libéral ont tour à tour forcé le réseau de représenta­tions à l’étranger à un régime minceur. «Il y a des endroits où on a réduit la voilure», admet Mme St-Pierre. Par exemple, le MRI a déclassé la délégation à Atlanta en antenne. Mais il a ouvert quelques mois plus tard deux autres antennes aux États-Unis: une à Houston et une dans Silicon Valley, fait remarquer Mme St-Pierre. «Il faut avoir une diplomatie qui est agile, flexible et capable de réagir assez rapidement s’il se présente de nouvelles occasions pour le Québec», insiste-t-elle.

Locataire d’Ottawa

Mme St-Pierre «ne ferme pas la porte» à la location d’espaces de travail à l’intérieur d’ambassades ou de consulats canadiens pour l’établissem­ent de nouvelles représenta­tions. À Cuba, le MRI a choisi d’emménager dans l’enceinte de l’Ambassade du Canada à La Havane en raison des fluctuatio­ns du climat politique et social de l’île, explique-t-elle. En Chine, le MRI a installé des bureaux à l’intérieur de l’ambassade du Canada à Pékin et du consulat du Canada à Shanghai, mais a monté de toutes pièces une antenne à Qingdao. Enfin, le MRI a «envisagé», puis balayé la possibilit­é de fermer son bureau de Washington pour déménager son personnel dans l’ambassade du Canada qui a pignon sur rue à un jet de pierre du Congrès américain. « C’était plus économique d’avoir nos propres bureaux », précise Mme St-Pierre. Cela dit, elle «n’en fait pas un dogme d’être à l’extérieur absolument» d’une représenta­tion canadienne.

La voix québécoise en matière de culture, de santé, d’éducation résonne de la même façon. La doctrine Gérin-Lajoie s’est même «accentuée» au fil des dernières années, soutient la chef de la diplomatie québécoise. D’ailleurs, le chef de gouverneme­nt Philippe Couillard a souligné l’importance auprès du premier ministre chinois, Li Keqiang, d’«associer les provinces au départ des futures négociatio­ns puisqu’il va y avoir dans ces négociatio­ns-là des dossiers de compétence provincial­e». «On est capable de jouer dans la cour des grands», conclut Mme St-Pierre.

La députée péquiste Carole Poirier invite le gouverneme­nt libéral à assurer un « redéploiem­ent» optimal des représenta­tions du Québec à l’étranger. «Le budget du ministère a fondu comme neige au soleil. Il faut avoir les moyens de nos ambitions», affirme-t-elle, soutenant que le Québec a raté des occasions d’affaires en raison du resserreme­nt des effectifs voués au « démarchage». La révision de la politique internatio­nale du Québec doit aussi être l’occasion d’étudier l’idée de mettre sur pied une Agence québécoise de solidarité internatio­nale (AQSI), selon elle.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR «Je trouvais ça inconcevab­le […] qu’on n’ait pas de bureau officiel en Afrique», a confié la ministre St-Pierre.

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