Encore faut-il que l’accord sur le pétrole soit respecté
La Russie a déjà annoncé qu’elle ne réduira pas sa production
L’OPEP a surpris le monde entier en annonçant un accord sur la réduction de la production d’or noir, poussant les marchés à la hausse, mais de nombreuses inconnues demeurent.
Après des semaines de tractations et six heures de réunion, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole a décidé mercredi soir de ramener sa production à un niveau de 32,5 à 33 millions de barils par jour, contre 33,47 mbj en août. Il s’agit de la plus importante limitation depuis celle décidée pendant la crise de 2008, quand le baril était passé de près de 150dollars à près de 40. Le cours du baril de référence (WTI) a gagné jeudi 78 ¢ à 47,83 $US sur le contrat pour livraison en novembre au New York Mercantile Exchange.
«L’initiative de l’OPEP est un événement important pour le marché pétrolier. Il est trop tôt pour dire si cet accord […] aura un impact sur l’équilibre du marché » où l’offre est surabondante par rapport à la demande, a réagi l’Agence internationale de l’énergie qui représente les pays industrialisés consommateurs de pétrole. Même prudence aux États-Unis, du côté des producteurs de pétrole de schiste. Ce sont eux qui ont largement contribué à inonder le marché, au grand dam de l’OPEP, depuis 2014.
L’Arabie saoudite avait quant à elle tout fait jusqu’ici pour résister à toute réduction de la production afin de maintenir des prix bas et de les éjecter hors du marché, ceuxci ayant besoin d’un prix du
« Il est trop tôt pour dire si cet accord [...] aura un impact sur l’équilibre du marché Agence internationale de l’énergie
baril plus élevé pour être rentables étant donné leurs coûts de production. «La décision de l’OPEP peut créer une hausse des prix à court terme, mais la hausse devra être durable à long terme pour qu’elle conduise à une augmentation des investissements et des nouveaux projets aux États-Unis», a déclaré à l’AFP Jeffrey Eshelman, porte-parole de l’organisation américaine IPAA, qui regroupe des entreprises du secteur.
D’une manière générale, plusieurs inconnues planent encore sur cet accord aux yeux des analystes, notamment sur les modalités d’application. «Il est réellement difficile de crier victoire après la décision [que certains qualifient déjà d’historique] de l’OPEP d’hier soir», estimaient jeudi matin les analystes de Mirabaud Securities. Les décisions concrètes sur les objectifs de production de chacun de ses membres doivent encore être prises au sommet semestriel de l’OPEP, qui produit environ 40% du brut mondial, le 30 novembre à Vienne.
Un facteur important sera l’attitude de la Russie, un des principaux exportateurs mondiaux de brut, qui ne fait pas partie de l’OPEP, mais qui a déjà dit qu’elle était pour un gel de la production au niveau record atteint en septembre de cette année, tout en estimant qu’un prix juste du baril devrait se situer entre 50 et 60 $US.
«Il y a eu une décision très positive hier», a réagi le ministre russe de l’Énergie, Alexandre Novak, ajoutant que cet accord aiderait à «réduire la volatilité des prix» mais que son pays ne comptait pas pour autant produire moins. «Tout dépendra de la situation macroéconomique et des plans des compagnies, mais nous nous concentrons sur le maintien des niveaux de production actuels », a déclaré le responsable russe, précisant qu’il s’agit là d’un « principe de base qui a déjà été discuté».
Au final, confrontée à la production extérieure au cartel, «l’OPEP pourrait donc se retrouver face au même dilemme qu’en 2014 [quand elle a dû se résoudre à laisser plonger les prix pour préserver ses parts de marché] et dans ce cas, les consommateurs devraient bénéficier d’un pétrole bon marché pendant un certain temps», ont dit les analystes de Commerzbank.
«Enfin, cela reste très théorique», car, dans les faits, il est probable, disent-ils, que « les pays de l’OPEP ne vont pas respecter l’accord ».