Le Devoir

Resto Le Tempéra au musée du Québec: les beaux-arts à table

- CATHERINE FERLAND à Québec

Le Tempéra ★★★1/2 $$$1/2

Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré en grande pompe au début de l’été. Son hall est assurément un écrin de choix pour le Tempéra Québecor, où la chef Marie-Chantal Lepage signe un menu élégant.

Le menu du midi propose trois assiettes thématique­s — végétarien, mer et terre — comportant un quatuor de parts format entrées. Que choisir? Un coup d’oeil aux tables voisines nous ayant appris que lesdites parts sont légères, je résous le dilemme et commande tout simplement les trois assiettes pour mon invité et moi. Une excellente décision.

Ab ovo (à partir de l’oeuf)

Le restaurant tire son nom d’une technique de peinture très ancienne basée sur l’émulsion. Bien des peintres du Moyen Âge et de la Renaissanc­e ont employé des couleurs faites de pigments délayés à l’eau et liés à l’oeuf, ce qui donnait à leurs oeuvres un fini léger permettant de traverser le temps.

Ce n’est sans doute pas un hasard si les mets du Tempéra comportent nombre de mousseline­s et d’émulsions fines qui exaltent les saveurs… en douceur. À commencer par la mise en bouche proposée, une crème de légumes racines à la mousse de truffes où l’on a déposé une noix de beurre et quelques micropouss­es.

Pour accompagne­r un repas pris dans un environnem­ent aussi épuré, un vin blanc s’impose. Intriguée par ce patronyme qui sonne si typiquemen­t québécois, j’opte pour une bouteille de Bouchard Père & fils 2014, un bourgogne aligoté de Beaune qui nous suivra jusqu’au dessert.

Classe de maître

Commençons la visite et allons-y par thème, en gardant à l’esprit que le menu évolue constammen­t et que ce qui suit pourrait bien ne plus être à l’honneur dans les prochaines semaines…

Dans l’assiette végétarien­ne se trouvent de fraîches tranches de betterave « bonbon » assorties de cubes de melon d’eau et d’amandes au miel, agrémentée­s d’une émulsion aux herbes. J’apprécie tout particuliè­rement les tomates confites à la mayonnaise au cari et à l’écrasé de feta au citron, tandis que mon ami affiche sa préférence pour les tortellini­s farcis de ricotta, parsemés de shiitakés confits, de sauce crémeuse à l’orange et d’huile d’olive. La salade de lentilles du Puy, abricots séchés, sésame et persil italien, nous laisse cependant indifféren­ts.

L’assiette de la mer accueille deux croûtons surmontés de crevettes nordiques et de fromage fouetté au pamplemous­se, une combinaiso­n gagnante.

L’esturgeon fumé et ses pommes de terre Raphaëlle en sauce gribiche (à base d’oeufs!) me plaît beaucoup, mais c’est le saumon snacké servi en sauce vierge grenoblois­e qui remporte la palme. La salade proposée, le bok choy avec crème sure et noix de cajou, fait également l’unanimité : le légume a été délicateme­nt grillé avec de la sauce hoison, ce qui lui confère une touche sucrée et une texture très agréable.

Enfin, l’assiette terre nous permet de découvrir une mousse de sanglier avec sa vinaigrett­e de bleuets sauvages: les baies sont si noires qu’elles évoquent le cassis ! Ce brave cochon sauvage se trouve toujours heureuseme­nt marié aux petits fruits des bois, alors c’est un régal. La sémillante roquette à l’huile de citron et copeaux de parmesan offre une pause végétale bienvenue.

La saucisse de cerf au bacon nappée de sauce au vin rouge déçoit un peu, pas tant au niveau de l’agencement des saveurs que de la températur­e : c’est tiède, voire froid, un état qui convient nettement mieux à l’excellent tataki de boeuf qui figure à ses côtés. Avec son sucre d’érable râpé sur mousseline de céleri rave, c’est assurément la pièce maîtresse du trio d’assiettes que nous venons de découvrir.

La signature

Le petit gâteau au fromage, avec son crumble de chocolat et son coulis de fruits rouges, confirme que nous avons bien affaire à la chef Lepage. On reconnaît sa touche, bien que son art s’exprime mieux, à mon avis, dans les longs soupers gastronomi­ques que dans les formules lunch. Je devrai sans doute y retourner pour essayer la coupole de fruits de mer ou l’un de ces plats exubérants aux parfums insolites dont elle a le secret…

Les plus. La formule à partager est appréciée, permettant de goûter à plusieurs mets en petites portions. L’écrin lumineux donnant sur les plaines d’Abraham et sur la Grande Allée est revigorant.

Les moins. On souhaitera­it une meilleure utilisatio­n des légumineus­es, qui semblaient un peu fades en comparaiso­n des autres éléments du repas. Coût du repas pour deux incluant alcool, taxes et ser vice : 153 $. TEMPÉRA QUÉBECOR 179, Grande Allée Ouest Québec ☎ 418 644-6780 mnbaq.org

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 ?? RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR ?? Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré au début de l’été et qui abrite le Tempéra.
RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR Immaculé, lumineux, immense. C’est la première impression qui frappe pour qui entre au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, inauguré au début de l’été et qui abrite le Tempéra.
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