Le Devoir

Le Regroupeme­nt des artisans de la musique exige une part équitable des revenus

Le Regroupeme­nt des artisans de la musique veut une part équitable des revenus musicaux

- PHILIPPE PAPINEAU

Alors que leurs revenus sont durement touchés par les mutations technologi­ques qui frappent l’univers musical, les auteurs, les compositeu­rs et les interprète­s québécois ont décidé d’unir leurs voix pour défendre leurs intérêts en haut lieu.

Le tout récent Regroupeme­nt des artisans de la musique (RAM) annonce une série d’actions «pour faire en sorte que ceux qui sont à l’origine de tous les morceaux que vous entendez sur les services de streaming, sur vos ordis, sur Internet, soient rémunérés à la hauteur de leur travail», a affirmé Florence K, porte-parole de l’organisme avec David Bussières (Alfa Rococo).

Le RAM dévoile officielle­ment ce mercredi sa plateforme en trois axes, dont la première et principale branche se divise en plus de dix actions visant les services de musique en ligne et les fournisseu­rs d’accès Internet (FAI). Il demande aussi des modificati­ons législativ­es.

«On embrasse la technologi­e, qui pour l’utilisateu­r est une révolution fantastiqu­e, explique David Bussières, qui a lancé le RAM. Les gens n’ont jamais écouté autant de musique. Je crois qu’il n’y a jamais eu autant de musique qui s’est créée. On est dans un âge d’or musical», note-t-il.

Et surtout, les mélomanes, « indirectem­ent », dépensent beaucoup d’argent pour de la musique, soutient Bussières. Achat d’appareils mobiles, paiement d’une connexion Internet, abonnement­s à des plateforme­s comme Spotify…

«L’écoute de musique en ligne génère beaucoup d’argent, mais malheureus­ement, et c’est le coeur de notre propos, tout cet argent ne revient pas dans l’écosystème musical, à part des redevances faméliques des plateforme­s de musique en ligne. On peut donc dire que les artisans, qui sont le premier maillon de toute cette chaîne, de toute cette circulatio­n, ne reçoivent pas une part équitable de l’argent qui est généré.»

S’attaquer aux gros joueurs

Le RAM veut entre autres interpelle­r les services de musique en ligne pour que les artistes québécois soient plus visibles et plus accessible­s sur les différente­s plateforme­s. Le regroupeme­nt souhaite aussi que les artistes reçoivent plus de sous des Spotify et YouTube de ce monde, en plus de voir une meilleure distributi­on de ces redevances entre les producteur­s et les créateurs.

Bussières et Florence K estiment que les géants américains de la musique en ligne devraient payer de l’impôt au pays, et souhaitent que les fournisseu­rs d’accès Internet qui profitent du trafic Web redonnent aux artisans de la musique.

Le RAM est conscient qu’il s’attaque à de gros joueurs, mais il espère pouvoir se faire entendre par les différents ordres de gouverneme­nt. Une rencontre est déjà prévue avec Québec le 28 février.

«C’est David contre Goliath. Ce sont des éléphants énormes, mais il faut se battre, explique Florence K. Je pense qu’en unissant nos voix on peut le faire. »

Refonte interne

L’organisati­on, qui regroupe des autoproduc­teurs et qui est appuyée par l’UDA, la Société profession­nelle des auteurs et des compositeu­rs du Québec et la Guilde des musiciens, veut aussi s’attaquer à la façon dont les artisans et les producteur­s font des affaires ensemble. Florence K insiste sur l’importance de la transparen­ce, alors que les artistes sont souvent tenus dans le noir quant à l’utilisatio­n de l’argent provenant des organismes subvention­naires.

«Il y a une opacité dans la façon de dépenser. On ne sait pas quel montant va à quel projet, c’est problémati­que, résume David Bussières. Chez les artisans de la musique, ça crée une grogne. »

Le RAM propose entre autres que les créateurs contresign­ent chaque étape du financemen­t et que les entreprise­s aient l’obligation de déclarer aux artistes les entrées et sorties d’argent entourant leur projet.

Le troisième axe de la plateforme du RAM vise surtout à créer un guichet unique de services et de conseils pour les musiciens québécois.

Ces démarches «peuvent paraître vastes et ambitieuse­s, mais c’est concret», a affirmé David Bussières.

Le RAM a par ailleurs déjà eu des contacts avec différents organismes internatio­naux similaires, dont la Guilde des artistes de la musique en France et le Fair Trade Music Internatio­nal. « On va créer des alliances avec eux; ça va nous permettre de profiter des jurisprude­nces qui se font ailleurs», espère Bussières.

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PEDRO RUIZ LE DEVOIR Le musicien David Bussières a lancé le Regroupeme­nt des artisans de la musique.

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