Le Devoir

Couillard veut faciliter l’accès à l’emploi aux immigrants

- LISA-MARIE GERVAIS

Le premier ministre Philippe Couillard semble désormais pressé de faire adopter le projet de loi 98, qui favorisera l’intégratio­n des immigrants au marché du travail. Accompagné par les deux ministres concernées par ce dossier, soit Kathleen Weil à l’Immigratio­n et Stéphanie Vallée à la Justice, le chef du gouverneme­nt libéral a dit vouloir s’attaquer aux barrières qui empêchent les immigrants de trouver un emploi et croit que son projet de loi sera adopté «assez rapidement».

Représenta­nt 46 ordres, la présidente du Conseil interprofe­ssionnel du Québec s’est montrée étonnée d’un tel empresseme­nt, étant donné que, depuis le dépôt du projet de loi en mai et les consultati­ons publiques au mois d’août dernier, le dossier n’avance guère. « Je ne sais pas s’il a fait ça dans le contexte actuel où le gouverneme­nt doit avoir l’air de faire beaucoup de choses pour l’immigratio­n, s’est demandé Gyslaine Desrosiers après avoir écouté son point de presse. Mais il n’a rien dit là-dessus depuis le mois de mai.»

Le projet de loi 98 modifiera diverses lois concernant l’admission aux profession­s et la gouvernanc­e du système profession­nel. Le taux de chômage des nouveaux arrivants « est encore trop élevé », a dit M. Couillard, expliquant qu’il est de 9,8% pour les immigrants du Québec, mais de 15% pour ceux arrivés au cours des cinq dernières années.

Les ordres profession­nels sont prêts à collaborer et se disent ouverts à des modificati­ons de gouvernanc­e, notamment en ce qui a trait à la compositio­n de leurs conseils d’administra­tion. Le point délicat concernait toutefois l’élargissem­ent des pouvoirs d’un commissair­e aux plaintes, qui deviendrai­t un «commissair­e à la reconnaiss­ance des compétence­s et à l’admission aux profession­s» avec pouvoirs d’enquête sur ce qui empêche l’accès à l’emploi des immigrants. «On était déçus de cette propositio­n-là», a reconnu Mme Desrosiers, mentionnan­t qu’il y a d’autres solutions prioritair­es pour régler le problème.

D’autres priorités

Selon elle, il est injuste que les ordres profession­nels soient « constammen­t sur la sellette », car de nombreux problèmes d’intégratio­n à l’emploi ne relèvent pas d’eux, mais plutôt des décisions ministérie­lles. «En commission parlementa­ire, l’Ordre des infirmière­s disait que 700 infirmière­s étaient prêtes à intégrer le système, mais elles ont besoin d’un stage de deux mois. Ce n’est pas la mer à boire. Mais à cause des coupes, il n’y a pas un hôpital qui peut les prendre»,a souligné Mme Desrosiers. «Quand bien même il y aurait une enquête, que voulez-vous qu’on fasse ? » Dans le cas d’une vingtaine de profession­s du domaine de la santé régies par des ordres, les places sont contrôlées par le ministre luimême. Elle ajoute que des 4500 candidatur­es étrangères reçues annuelleme­nt, le taux de reconnaiss­ance est de 95 %.

La porte-parole de Québec inclusif, Émilie Nicolas, croit qu’il est « important » que le projet de loi 98 soit remis en avant, mais que le problème de la discrimina­tion à l’emploi « va bien au-delà de la reconnaiss­ance des diplômes». «Il y a des barrières systémique­s qui se recoupent, entre le sexisme et le racisme. Il y a en effet des discrimina­tions qui touchent surtout les femmes immigrante­s», fait remarquer celle qui demandait récemment une commission sur le racisme systémique. Revoir la compositio­n des ordres profession­nels pour qu’ils soient plus « représenta­tifs » ne fera pas de tort, conclut-elle.

«Quand

bien même il y aurait une enquête, que fasse?» voulez-vous qu’on La présidente du Conseil interprofe­ssionnel du Québec, Gyslaine Desrosiers

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR

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