Le sous-financement de l’éducation est montré du doigt
Trois jours de grève cette semaine, quatre la semaine dernière: les professeurs de l’Université de Sherbrooke protestent. Ils réclament notamment des groupes d’étudiants moins nombreux, l’embauche de nouveaux professeurs pour y parvenir et une révision de leur rémunération, inchangée depuis trois ans.
À cause des compressions du gouvernement, « l’université se retrouve en difficulté», explique Dominique Lorrain, présidente du Syndicat des professeures et professeurs de l’Université de Sherbrooke (SPPUS). Les professeurs et les étudiants en font les frais, plaide-t-elle.
Les classes sont surchargées. Par rapport à la situation qui était celle de l’Université de Sherbrooke il y a dix ans, il manque aujourd’hui 41 professeurs, affirme le SPPUS. Sans compter que les étudiants des cycles supérieurs, de plus en plus nombreux, nécessitent un encadrement plus grand. «Nous, on veut préserver la qualité de la formation», plaide la présidente du syndicat.
«L’université veut aller chercher » de l’argent à même ceux qui en ont le plus besoin» Dominique Lorrain, présidente du Syndicat des professeures et professeurs de l’Université de Sherbrooke
La grève
Le 25 janvier, les professeurs ont voté à près de 80 % en faveur d’une grève de 12 jours non consécutifs. Le SPPUS est composé de 456 professeurs. Un peu moins de la moitié ont participé au vote de grève. La grève, croit sa présidente, est nécessaire pour faire avancer les négociations, qui selon le syndicat piétinent.
Porte-parole de la direction de l’université dans ce conflit, Martin Buteau est recteur adjoint et vice-recteur aux ressources humaines et financières. Pour lui, il est certain que cette grève est « l’expression d’un ras-le-bol», qu’elle montre «l’impact des compressions budgétaires que les universités ont subi ces dernières années ». À l’Université de Sherbrooke, les compressions seraient de l’ordre de 18 millions, dit le vice-recteur. «Il y a un manque à gagner», confie-t-il volontiers. « On est essoufflé.»
Mais pour combler son manque à gagner, fustige le syndicat, « l’université veut aller chercher de l’argent à même ceux qui en ont le plus besoin ». Ainsi, explique Dominique Lorain, la direction de l’université tente par exemple de diminuer de «7% le traitement du congé de maternité et de cinq semaines ce congé ».
Selon Marc Frappier, viceprésident du syndicat des professeurs, les subventions consenties à l’Université de Sherbrooke ont diminué de 5,5% par rapport à l’année 2013-2014. C’est avec 16 millions de moins et un manque de professeurs que l’université doit s’organiser depuis 2014-2015. Pendant ce temps, le nombre d’étudiants a augmenté de 2,6%. En dix ans, souligne par ailleurs Dominique Lorrain, le nombre d’étudiants a même crû de 8 %.
Encouragements
Le vice-recteur se dit tout de même encouragé par les signaux récents du gouvernement à l’égard du financement des universités. Il croit que les investissements pourraient reprendre. «On veut tous que le gouvernement redonne leur place aux universités, qui est celle du développement de toute la société. Il faut arrêter d’étouffer l’université. »
Au fond, les professeurs et l’administration de l’université ne partagent-ils pas une même déception? Le vice-recteur aux ressources humaines et financières Martin Buteau le croit, tout en disant que dans les circonstances il est difficile d’améliorer les choses. « On comprend l’objectif. Mais pour le moment, j’ai un cadre très limité» pour répondre aux demandes.
Le porte-parole de l’université se dit néanmoins encouragé par les signaux envoyés par le gouvernement. Le ministre des Finances, Carlos Leitão, a indiqué la semaine dernière que le prochain budget contiendrait un réinvestissement en éducation supérieure. Les négociations avec les professeurs doivent reprendre jeudi.