Le Devoir

La suite reste à écrire

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Jusqu’à récemment, le monde était habitué aux facéties du président Kim Jong-un, mais il attendait autre chose de celui des États-Unis. Voilà que nous en sommes réduits à évaluer le succès ou l’échec de nos relations avec la plus grande puissance mondiale aux réactions de son président sur Twitter ou devant les caméras.

Tantmieux,l’exercicear­éussi!Selonles termes du communiqué conjoint diffusé à l’issue de la rencontre entre Justin Trudeau et Donald Trump, «les États-Unis et le Canada reconnaiss­ent l’importance de la coopératio­n pour stimuler la croissance économique, offrir des avantages à nos consommate­urs et entreprise­s et promouvoir un commerce libre et équitable». D’ailleurs, « le Canada est le marché étranger le plus important pour trente-cinq États américains. […] Des millions d’emplois occupés par des Canadiens et des Américains de la classe moyenne, notamment dans le secteur manufactur­ier, dépendent de notre partenaria­t.»

À croire que c’est le cabinet du premier ministre Trudeau luimême qui a rédigé ce texte duquel M. Trump est allé jusqu’à repiquer l’exemple connu de ces 35 États dont les exportatio­ns reposent largement sur le marché canadien.

Cela étant dit, le plus important reste à faire en matière de relations commercial­es, soit renégocier l’ALENA sans trop y perdre et tout faire pour tenter d’influencer les élus républicai­ns que leur projet de réforme de la fiscalité des entreprise­s doit être abandonné.

Ce qui n’ira pas de soi, même si bien des entreprise­s ayant des filiales un peu partout dans le monde ne voient pas non plus d’un bon d’oeil la fameuse propositio­n d’introduire une Border Adjustment Tax (dont nous faisions état la semaine dernière dans cette page).

Dans une étude publiée hier, deux économiste­s de l’Institut C.D. Howe en arrivent à la conclusion qu’une telle réforme interdisan­t désormais aux entreprise­s d’inclure leurs importatio­ns dans les dépenses déductible­s de l’impôt sur les profits aurait des conséquenc­es nettement négatives sur l’économie canadienne.

Ce sont surtout les fournisseu­rs canadiens d’intrants, les industries des pièces automobile­s, de la machinerie et des produits énergétiqu­es, par exemple, qui seraient touchés, au point de retrancher 1 % (20 milliards $CAN) à notre PIB annuel.

Mais l’économie des États-Unis serait aussi directemen­t touchée puisque cette façon de calculer les profits imposables inciterait les entreprise­s à substituer des intrants locaux même plus coûteux ou de moins bonne qualité dans le seul but de pouvoir les déduire de leurs revenus imposables.

Par ce projet de réforme, les républicai­ns souhaitent encourager les sociétés américaine­s à acheter localement, mais sans avoir évalué les effets pervers sur la croissance.

En relisant le communiqué conjoint publié à l’issue de la rencontre, lundi, on est tenté de conclure que le Canada évitera le pire. Si tel était le cas, on ne pourrait que s’en réjouir. Mais pour l’instant, rien n’est moins certain puisque ce qui semble n’être qu’un ajustement mineur (tweaking) à l’esprit du président Trump pourrait se révéler beaucoup plus important pour le Canada. On pense à l’ajout de quotas désavantag­eux pour l’industrie du bois d’oeuvre ou, au contraire, à leur disparitio­n en agricultur­e. Sans parler, bien sûr, de cette fameuse taxe à l’importatio­n.

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JEAN-ROBERT SANSFAÇON

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