La maison des damnés
Verbinski signe un luxueux film de série B truffé de références au cinéma de genre
CURE DE BIEN-ÊTRE (V.F. DE A CURE FOR WELLNESS) ★★★
Thriller de Gore Verbinski. Avec Dane DeHaan, Jason Isaacs, Celia Imrie, Mia Goth, Ivo Nandi et Harry Groener. États-Unis, Allemagne, 2017, 146 minutes.
S’il continue de ravir le public avec la plus en plus navrante franchise Pirates des Caraïbes, Gore Verbinski n’arrive cependant pas à conquérir le coeur des critiques. À l’exception du film d’animation Rango et du remake du drame d’horreur d’Hideo Nakata Le cercle, ses réalisations récoltent peu d’éloges. Une visite rapide sur le site Rotten Tomatoes, lequel répertorie les critiques parues dans les principaux médias américains, permet de constater que sa plus récente offrande en déçoit plus d’un. Et pourtant, sans que Cure de bien-être soit un chef-d’oeuvre impérissable, Verbinski prouve ici qu’il connaît son cinéma de genre et qu’il sait manier l’image.
À contre-courant des productions frénétiques montées à la tronçonneuse, il prend bien soin dans ce cas-ci d’installer le récit et les personnages en plus d’adopter un rythme lent, donnant à l’ensemble l’impression que le temps a suspendu son vol.
À la demande de ses supérieurs hiérarchiques, un jeune cadre carriériste (Dane DeHaan, le nouveau DiCaprio) se rend dans une maison de santé en Suisse afin d’y chercher son patron qui ne donne plus de nouvelles. Ce qu’il y découvre le laisse pantois et lui fait rebrousser chemin.
L’homme, traumatisé par un douloureux souvenir d’enfance et la maladie mentale de sa mère, sera toutefois contraint de séjourner dans cette oasis tenue par un directeur rigide (Jason Isaacs) après s’être cassé une jambe. Alors qu’autour de lui errent les patients affichant un air plus zombie que zen, il fera la connaissance d’une patiente obsédée par les énigmes (Celia Imrie) et d’une jeune fille étrange (Mia Goth). Ne pouvant plus communiquer avec l’extérieur, il tentera de percer le secret de cette fameuse cure dont parlent tous les membres du personnel, qui semblent tous avoir été lobotomisés.
Avec ses clins d’oeil gros comme ça à Frankenstein de Kenneth Branagh, à Shutter Island de Martin Scorsese, à Audelà du réel de Ken Russell et à Shining de Stanley Kubrick — et à moult autres références qui feront jubiler les amateurs de cinéma de genre —, cet esthétisant thriller sous influences du réalisateur du très mal reçu Justicier masqué tire profit du cadre enchanteur suisse qu’il transforme en un lieu glauque complètement déconnecté du reste du monde.
D’une direction artistique soignée, d’une ambiance à glacer le sang, Cure de bien-être bénéficie d’une photographie somptueuse où se multiplient les jeux de miroir, suggérant par endroits que le personnage principal évolue dans un cauchemar éveillé. N’ayant d’autre prétention que de divertir, le tout s’avère une réflexion grinçante teintée d’humour décalé sur l’ambition aveugle et le surmenage qui guette chacun de nous.