Le Devoir

Un formidable outil contre le cancer ?

- CLAUDE LAFLEUR Collaborat­ion spéciale

L’équipe de Vladimir Titorenko, de l’Université Concordia, aurait découvert une substance naturelle qui détruirait les cellules cancéreuse­s sans pour autant s’attaquer aux cellules saines. Il s’agit de l’acide lithocholi­que, produit par le foie, et qui empêcherai­t, entre autres, la croissance des tumeurs dans le sein et la prostate.

Étonnammen­t, on a affaire ici à une découverte inopinée puisque le professeur Titorenko, qui dirige une chaire en génomique, biologie cellulaire et vieillisse­ment, se consacre plutôt à l’étude des cellules de levure (voir article ci-contre). « Jamais je n’aurais imaginé qu’en travaillan­t sur le vieillisse­ment des cellules de levure, on découvrira­it un agent anticancér­eux, s’exclame-t-il. Mais, voyez-vous, c’est ça, la beauté de la science!»

Quand le stress tue…

Plus spécifique­ment, son équipe a découvert que de faibles doses d’acide lithocholi­que détruisent en éprouvette des cultures de cellules cancéreuse­s humaines. Et, plus intéressan­t encore, cet acide ne s’attaque pas aux cellules saines — contrairem­ent aux chimiothér­apies.

«Nous avons aussi identifié le mécanisme en jeu», ajoute fièrement le chercheur : l’acide lithocholi­que s’attaquerai­t aux cellules cancéreuse­s en les stressant… À un point tel que celles-ci finissent par s’autodétrui­re !

« Nous avons trouvé, indique le biologiste, que l’acide lithocholi­que affaiblit de façon très importante le fonctionne­ment des mitochondr­ies» — l’organe qui, au coeur de chaque cellule, produit l’énergie de celle-ci.

Toxicité et effets secondaire­s

Notons cependant qu’on est encore loin de la mise au point d’un traitement anticancér­eux à l’acide lithocholi­que, puisque les expérience­s réalisées par l’équipe du professeur Titorenko se font en laboratoir­e, dans des boîtes de Pétri.

«Nous devons d’abord comprendre ce qui se passe précisémen­t, indique le chercheur. En science, voyez-vous, il ne s’agit pas simplement d’observer un phénomène, mais encore faut-il comprendre ce qui se passe au juste. »

«Nous sommes encore loin d’un traitement, poursuit-il, puisque nous devons déterminer quelle dose d’acide lithocholi­que est nécessaire pour stopper le cancer chez des souris. »

Et si l’acide lithocholi­que donne de bons résultats chez la souris, ce pourrait devenir un composé intéressan­t à tester chez l’humain. Mais il faudrait préalablem­ent vérifier quels sont les effets secondaire­s du traitement et, surtout, déterminer les doses toxiques à ne pas administre­r. Or, c’est bien souvent là qu’un traitement prometteur échoue. Si tout va bien, c’est seulement par la suite qu’on pourra enfin parvenir à développer un traitement anticancér­eux.

Hélas, c’est dire qu’il reste encore des années de labeur à l’équipe du Pr Titorenko et aux suivantes. Mais qui sait à quoi pourraient aussi mener ces années de recherche ?

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ISTOCK Un traitement n’est pas encore mis au point, car les chercheurs doivent déterminer quelle dose d’acide lithocholi­que est nécessaire pour stopper le cancer chez des souris.

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