Le Devoir

Québec se lance dans les obligation­s vertes

La première émission de 500 millions n’est qu’un début, promet le ministre Leitão

- KARL RETTINO-PARAZELLI

Le Québec emboîte le pas à l’Ontario et devient la deuxième province canadienne à offrir des obligation­s vertes. La première émission de 500 millions de dollars, qui a connu un grand succès auprès des investisse­urs, n’est qu’un début, promet le gouverneme­nt.

Les 500 millions de dollars d’obligation­s vertes sur cinq ans, offertes à un taux d’intérêt de 1,67%, ont toutes trouvé preneur vendredi. Les investisse­urs ont répondu à l’appel en grand nombre et se sont montrés prêts à investir 1,1 milliard de dollars, ce que le gouverneme­nt perçoit comme un signal positif pour la suite.

« C’est une preuve tangible du fait que les marchés financiers veulent investir dans des instrument­s financiers responsabl­es», s’est réjoui vendredi le ministre de l’Environnem­ent, David Heurtel, lors d’une conférence de presse à Montréal en compagnie du ministre des Finances, Carlos Leitão.

La première émission du gouverneme­nt du Québec est modeste, comparativ­ement aux trois émissions réalisées par l’Ontario depuis 2014 et totalisant plus de 2 milliards de dollars.

«On commence avec 500 millions. L’année prochaine ou dans six mois, selon les conditions du marché, on pourra faire d’autres émissions », a précisé M. Leitão, sans dévoiler un objectif ou un échéancier précis.

Ces 500 millions de dollars d’obligation­s vertes sont une goutte d’eau dans un océan de quelque 20 milliards d’obligation­s convention­nelles émises par le gouverneme­nt du Québec au cours de l’année financière en cours. Québec s’est limité à ce demi-milliard parce qu’il ne sentait pas le besoin d’obtenir davantage de financemen­t dès maintenant, mais la situation pourrait évoluer dans le futur.

Projets verts

Les obligation­s vertes du gouverneme­nt du Québec sont semblables à des obligation­s traditionn­elles en matière de prix, de rendement et d’échéance. La différence, c’est qu’elles sont liées à des projets bien précis, qui « comportent des avantages tangibles sur le plan de l’environnem­ent ».

Québec a choisi d’accoler une étiquette verte à une partie des obligation­s qu’il prévoyait d’émettre

La première émission d’obligation­s servira à financer quatre projets concernant la Société de transport de Montréal (STM): l’acquisitio­n des nouvelles voitures de métro Azur, deux programmes de rénovation des équipement­s et des infrastruc­tures et l’achat d’autobus hybrides.

«Cette fois-ci, on a pris un programme de projets lié au métro de Montréal, mais une prochaine émission pourrait être liée à d’autres projets ailleurs au Québec, qui doivent avoir la certificat­ion verte», a affirmé M. Heurtel.

Reddition de compte

Le gouverneme­nt a mis sur pied un Comité consultati­f sur les obligation­s vertes (CCOV), formé de représenta­nts de différents ministères, qui évaluera l’admissibil­ité des autres projets qui pourront être financés par des obligation­s vertes.

Pour le moment, seuls des projets inclus dans le Plan québécois des infrastruc­tures 2016-2026 sont admissible­s, mais cette contrainte pourrait être levée, a laissé entendre M. Leitão.

Le cadre mis en place par Québec — qui a obtenu la cote la plus élevée de la part du Center for Internatio­nal Climate and Environmen­tal Research d’Oslo — prévoit qu’un montant équivalant au financemen­t obtenu grâce à l’émission d’obligation­s vertes sera déposé dans un compte désigné et que l’évolution des

projets financés fera l’objet d’un suivi sur le site du ministère des Finances.

Les obligation­s vertes du gouverneme­nt du Québec ne représente­nt pas une source additionne­lle de financemen­t et elles sont liées à des projets qui auraient été financés de toute façon par des obligation­s traditionn­elles. Autrement dit, Québec a choisi d’accoler une étiquette verte à une partie des obligation­s qu’il prévoyait d’émettre au cours de l’année financière.

«L’intérêt, pour nous, est d’élargir notre base d’investisse­urs, explique le ministre Leitão. En agissant de la sorte, nous allons chercher d’autres investisse­urs, qui ne seraient peut-être pas intéressés par l’achat d’obligation­s québécoise­s [convention­nelles] .»

Forte demande

Selon le ministre Heurtel, il est dans l’intérêt du Québec d’offrir dès maintenant des obligation­s vertes, puisque ce produit financier demandé le sera encore plus dans les années à venir.

Le Conseil du patronat du Québec n’a pas tardé à applaudir l’initiative, lui qui réclame depuis plusieurs années l’adoption de mesures d’écofiscali­té au sein de l’Alliance SWITCH.

«L’émission des premières obligation­s vertes de la part du gouverneme­nt du Québec est un levier extraordin­aire qui permettra de répondre à des besoins d’investisse­ment de projets à faible empreinte carbone, tout en stimulant l’innovation et en modernisan­t notre économie», a déclaré son président-directeur général, Yves-Thomas Dorval.

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