Le Devoir

Syrie : la diplomatie patine à Genève

Un attentat suicide fait plus de 50 morts près d’Al-Bab

- ROUBA EL HUSSEINI à Genève RANA MOUSSAOUI à Beyrouth

L’ONU tentait péniblemen­t vendredi de lancer des discussion­s de paix à Genève entre les deux principaux belligéran­ts syriens, pendant que la violence se poursuivai­t dans ce conflit aux ramificati­ons inextricab­les.

Au deuxième jour du nouveau processus de négociatio­ns entre le régime de Damas et l’opposition syrienne, aucune discussion détaillée ne s’est encore engagée, ni avec l’ONU, et encore moins entre les deux parties.

Pendant ce temps, la violence secoue toujours la Syrie. Un attentat suicide revendiqué par le groupe djihadiste État islamique (EI) a ainsi fait plus de 50 morts vendredi près d’Al-Bab, fief du groupe EI dans le nord du pays, qui avait été repris la veille par les insurgés alliés aux Turcs.

Un autre attentat contre un barrage à l’entrée d’Al-Bab a tué deux soldats turcs.

Ces attaques ne sont pas directemen­t liées aux négociatio­ns de Genève puisque le groupe EI est exclu du processus intersyrie­n, mais elles illustrent la fragilité de toute «normalisat­ion» dans un pays ravagé par six ans de guerre, et où intervienn­ent des acteurs multiples aux agendas différents.

Par ailleurs, une trentaine de rebelles ont aussi été tués jeudi dans des raids aériens du régime syrien à l’ouest de la métropole d’Alep, reconquise fin décembre par les forces de Damas.

Un cessez-le-feu conclu fin décembre sous les auspices de la Russie, alliée de Damas, et de la Turquie, soutien de l’opposition, est censé s’appliquer au régime et à l’opposition armée, à l’exclusion des djihadiste­s.

«Long et difficile»

À Genève, les pourparler­s officielle­ment ouverts jeudi soir ont été présentés par l’ONU comme une occasion « historique » de mettre fin au conflit qui a fait en six ans plus de 310 000 morts et des millions de réfugiés.

Trois sessions de discussion­s indirectes en 2016 à Genève avaient échoué.

Mais les belligéran­ts ne se parlent toujours pas et les discussion­s entre l’émissaire de l’ONU, Staffan de Mistura, et les représenta­nts du régime et de l’opposition s’enlisent déjà.

M. de Mistura a rencontré vendredi successive­ment les représenta­nts du régime et de l’opposition, et poursuivra ses entretiens durant le week-end, mais aucune question de procédure — et encore moins de fond — ne semblait réglée vendredi soir. «Ce sera un processus long et difficile», a répété en fin de journée Michael Contet, assistant de M. de Mistura. La question de savoir si les négociatio­ns se feraient en face à face, un format souhaité par l’ONU, n’est pas encore tranchée, a-t-il admis.

Le médiateur de l’ONU a remis à chaque délégation un «papier» qui, selon des sources proches des négociatio­ns, mentionne les trois thèmes sur lesquels l’ONU veut engager les discussion­s: gouvernanc­e, Constituti­on et élections.

Mais la gouvernanc­e du pays pendant une période de transition est loin d’avoir le même sens pour Damas et ses alliés russe et iranien d’un côté, et pour l’opposition de l’autre.

Les premiers veulent que le président syrien Bachar Al-Assad reste aux commandes jusqu’à ce que le peuple décide de son sort par les urnes. Les seconds réclament un « organe de transition ayant tous les pouvoirs exécutifs», comme cela avait été prévu dans un texte internatio­nal de 2012 (Communiqué de Genève) et qui, selon eux, écarte Assad du pouvoir.

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