Le Devoir

L’homme qui aimait trop le hockey

- MANON DUMAIS Collaborat­rice Le Devoir

ÇA SENT LA COUPE

Comédie dramatique de Patrice Sauvé. Avec Louis-José Houde, Émilie Bibeau, Julianne Côté, Louis-Philippe Dandenault, Patrick Drolet, Maxime Mailloux et Marilyn Castonguay. Canada (Québec), 2017, 90 minutes.

Les grands films québécois portant sur notre sport national ne sont pas légion. Certes, Ken Scott et Charles Binamé ont livré un honorable Maurice Richard. Jacques Savoie et Sylvain Archambaul­t ont bien failli assombrir les célébratio­ns du centenaire du Tricolore avec le lamentable Pour toujours les Canadiens. Passé presque inaperçu lors de sa sortie, contrairem­ent à la tonitruant­e et peu édifiante franchise des Boys, Histoires d’hiver de François Bouvier, d’après le roman de Marc Robitaille, traçait avec sensibilit­é le portrait d’un jeune garçon idolâtrant Henri Richard.

C’est d’ailleurs à ce joli film teinté de nostalgie que fait penser cette adaptation fidèle du roman de Matthieu Simard, Ça sent la coupe, par Patrice Sauvé (Cheech, Grande Ourse: La clé des possibles). Sans aller jusqu’à dire que Sauvé signe un film mémorable, on peut avancer que ce dernier a accompli honnêtemen­t son boulot. Et alors que l’on rêve que Claude Julien emmène le CH en séries, on peut espérer que le public se pointera en grand nombre au cinéma.

Un soir qu’il regarde le hockey avec ses chums (LouisPhili­ppe Dandenault, Patrick Drolet et Maxime Mailloux) et sa soeur (Julianne Côté), Max (Louis-José Houde) se fait larguer par sa blonde Julie (Émilie Bibeau). Ex-ingénieur ayant repris la boutique de souvenirs sportifs de son père depuis le décès de ses parents sept ans auparavant, l’adulescent trentenair­e comprend qu’il doit se prendre en mains lorsqu’une ambulanciè­re (Marilyn Castonguay), rencontrée à la suite d’un incident impliquant un bâton élevé, lui demande de réfléchir aux raisons du départ de Julie. Max se laissera tout de même emporté par la fièvre des séries: après tout, l’action se déroule lors de la saison 2009-2010.

À l’instar du roman, le scénario de Matthieu Simard est composé de courts segments suivant cette saison où Halak a mené les Canadiens très loin dans les séries. D’entrée de jeu, la structure du récit apporte une dimension ludique à l’ensemble, lui insufflant également un rythme tonique. Au bout d’un certain temps, le processus risque d’agacer par sa rigidité et, pis encore, de réduire Ça sent la coupe à une sitcom où l’on ne rit pas si souvent. De fait, il y a bien quelques situations cocasses et répliques amusantes, mais le personnage qu’incarne Louis-José Houde est aux antipodes de ce qu’il est sur scène, et ce qu’il traverse n’a rien de joyeux.

Distillant une douce mélancolie, notamment grâce à la lumière enveloppan­te de Ronald Plante, narré par le personnage principal qui s’adresse à son père disparu, Ça sent la coupe explore, en un habile mélange de légèreté et de gravité, le deuil et le passage à l’âge adulte. Alors que Patrice Sauvé traduit la fébrilité des séries, il enchaîne de touchantes scènes sur le sens de la famille et sur l’amitié avec une émotion contenue. Solidement entouré par une distributi­on irréprocha­ble, l’attachant Louis-José Houde se révèle plutôt doué dans le registre dramatique.

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