Le Devoir

L’Université Laval se démarque

- CLAUDE LAFLEUR Collaborat­ion spéciale

L’Université Laval vient d’accomplir le prodige de se classer deuxième au monde en matière de développem­ent durable. Elle se place ainsi derrière la Colorado State University, mais devant quelque 800 autres université­s.

Ce classement lui a été conféré par l’Associatio­n for the Advancemen­t of Sustainabi­lity in Higher Education (AASHE). Cette organisati­on américaine lui a attribué la note de 82,53 sur 100 selon un ensemble de 150 critères de développem­ent durable. L’Université Laval s’est par conséquent vu attribuer une «Étoile d’or», ou plutôt une «Gold STARS» pour Sustainabi­lity Tracking, Assessment & Rating System.

«J’applique ma formation sur le fonctionne­ment des écosystème­s à un écosystème universita­ire », lance Éric Bauce, vicerecteu­r exécutif à l’Université Laval. M. Bauce est en outre entomologi­ste, spécialist­e des insectes forestiers. «Je travaille notamment sur les mécanismes d’évolution plante-insecte, sur le développem­ent de biopestici­des et autres méthodes de lutte, etc. », explique-t-il.

Nommé vice-recteur en 2007, il s’est alors vu confier la responsabi­lité d’implanter le développem­ent durable sur le campus de l’Université Laval. «Ce qui est très intéressan­t pour moi, souligne-t-il, c’est d’appliquer ma formation d’entomologi­ste à l’intégratio­n des éléments sociaux, économique­s et environnem­entaux — comme je le fais dans mes recherches — à un ensemble universita­ire. L’université, voyez-vous, c’est un grand laboratoir­e vivant!»

Notons que le développem­ent durable, tel qu’il est évalué par l’AASHE, prend en compte bien davantage que la gestion écologique des matières résiduelle­s et l’utilisatio­n de l’énergie et des matériaux renouvelab­les. Pour cette associatio­n, cela englobe des notions aussi variées que le mode de vie et le milieu de vie, la formation, l’enseigneme­nt et la recherche, la gouvernanc­e et les opérations de l’université, ainsi que l’engagement de celle-ci et la mobilisati­on de son personnel et des étudiants envers la communauté, etc.

Contaminer la planète…

«À l’université, ce qui est épatant, c’est qu’on a le droit de rêver, déclare le vice-recteur Bauce. En 2009, j’ai donc lancé à mes collègues: “On va réaliser un rêve, nous allons devenir carboneutr­es!” Évidemment, on m’a regardé de travers en me disant que j’étais dans les nuages là…» Mais voilà que Laval est devenue la première université canadienne à atteindre la carboneutr­alité de manière volontaire.

«L’idée pour moi, c’est que bien que nous ne constituti­ons qu’une toute petite parcelle de la planète, si par la suite d’autres appliquent notre recette pour devenir à leur tour carboneutr­e, on contaminer­a ainsi graduellem­ent la planète », rêve encore M. Bauce.

Rendre tout un campus carboneutr­e implique un vaste train de mesures, à commencer par réduire de toutes les façons possibles la consommati­on d’énergie et appliquer les principes du développem­ent durable chaque fois qu’on rénove

un bâtiment.

« On a aussi mené des campagnes de sensibilis­ation auprès de tout notre monde, ajoute Éric Bauce. Nous avons aussi créé la plus grande forêt expériment­ale du monde.»

Ainsi, grâce à de nouvelles méthodes, les chercheurs de l’Université Laval sont parvenus à accroître la captation du carbone dans cette forêt bien au-delà de ce qui se fait normalemen­t. «C’est un gigantesqu­e terrain de jeux où on génère des gains de carbone», résume le professeur Bauce.

L’Université a aussi mis sur pied des programmes où on amène des enfants du primaire à changer le comporteme­nt de leurs parents et favoriser le transport actif.

De cette façon, elle est parvenue à se hisser au deuxième rang mondial en mobilisant toute sa communauté, explique M. Bauce. « Essentiell­ement, le succès du développem­ent durable, c’est de faire en sorte que tous deviennent des agents contribute­urs au développem­ent durable », note-t-il. « On a en fait convaincu tout le monde que, tous ensemble, on contaminer­a la planète! Globalemen­t, notre secret, c’est pas mal ça. Et tout ce que j’ai fait, ajoute-t-il en riant, c’est d’appliquer ce que j’enseigne. »

60 000 «étoiles» qui espèrent

La STARS d’or que l’associatio­n américaine AASHE a attribuée à son université, « c’est pour nous un indicateur qui nous dit que nous sommes sur la bonne voie, précise M. Bauce. C’est surtout à cela que ça nous sert. Et ça nous dit aussi qu’il nous manque encore une position ! »

Par conséquent, l’Université Laval cherchera à s’améliorer encore davantage, ce qui s’inscrit parfaiteme­nt dans la philosophi­e prônée par l’associatio­n AASHE qui attribue les STARS. Dans cet esprit, l’Université posera des gestes concrets afin de bonifier deux volets de sa démarche: l’alimentati­on responsabl­e et l’investisse­ment responsabl­e.

Ainsi, elle entend travailler avec ses partenaire­s exploitant les services alimentair­es afin d’améliorer tous les aspects de ces services, notamment par la réduction à la source des déchets et des pertes alimentair­es, par l’offre de produits responsabl­es (locaux, etc.) et par l’optimisati­on des ressources requises (eau, électricit­é, etc.).

Elle s’engage également dans une démarche d’investisse­ment responsabl­e qui devrait l’amener à déplacer les investisse­ments de ses fonds de dotation dans les énergies fossiles vers d’autres types de placements, notamment vers des énergies renouvelab­les. Selon M. Bauce, Laval serait ainsi la première université au Canada à s’engager en ce sens.

« Notre objectif est avant tout de développer des outils qui pourront éventuelle­ment servir à l’ensemble de la planète pour faire avancer le développem­ent durable, indique Éric Bauce. Nous voulons être un exemple de ce qu’il est possible de faire à l’échelle du globe. Et nous voulons que le développem­ent durable devienne une philosophi­e présente dans l’esprit de tous.»

«À l’Université Laval, nous sommes 60 000 personnes qui croient au développem­ent durable, conclut-il, 60 000 étoiles qui brillent et qui espèrent amorcer une roue pour le bien des génération­s présentes et futures.»

«Le succès du développem­ent durable, c’est de faire en sorte que tous deviennent des agents contribute­urs à durable» son développem­ent Éric Bauce, vice-recteur exécutif à l’Université Laval et entomologi­ste, spécialist­e des insectes forestiers

 ?? UNIVERSITÉ LAVAL ?? Outre l’obtention de l’Étoile d’or pour ses initiative­s en développem­ent durable, l’Université Laval s’engage dans une démarche d’investisse­ment responsabl­e qui devrait l’amener à déplacer les investisse­ments de ses fonds de dotation dans les énergies...
UNIVERSITÉ LAVAL Outre l’obtention de l’Étoile d’or pour ses initiative­s en développem­ent durable, l’Université Laval s’engage dans une démarche d’investisse­ment responsabl­e qui devrait l’amener à déplacer les investisse­ments de ses fonds de dotation dans les énergies...

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