Le Devoir

Le Québec, route des Indes du pétrole des sables bitumineux

Les pétrolière­s ont besoin du pipeline de TransCanad­a, selon le porte-parole des producteur­s

- ALEXANDRE SHIELDS

La constructi­on du pipeline Énergie Est de TransCanad­a est essentiell­e pour permettre à l’industrie pétrolière canadienne de rejoindre un marché indien lucratif et de plus en plus gourmand. La route du pétrole des sables bitumineux passe donc par le Québec, a fait valoir mardi le président et chef de la direction de l’Associatio­n canadienne des producteur­s pétroliers (ACPP), Tim McMillan.

Alors que l’évaluation environnem­entale du projet de pipeline est au point mort au Québec et que le processus de l’Office national de l’énergie doit reprendre depuis le début, le porte-parole du lobby pétrolier est venu plaider pour le développem­ent de nouveaux marchés pour la production canadienne, dans le cadre d’une allocution prononcée à la tribune du Conseil des relations internatio­nales de Montréal.

Viser l’Asie

Selon M. McMillan, le client « naturel » que représente­nt les États-Unis risque de devenir de plus en plus un compétiteu­r, notamment en raison des politiques mises en avant par le nouveau gouverneme­nt de Donald Trump. Le président, a rappelé M. McMillan, a promis à plusieurs reprises de réduire les normes environnem­entales, mais aussi de favoriser le développem­ent du secteur des énergies fossiles.

Dans ce contexte, le porte-parole de l’ACPP a fait valoir que l’industrie doit plus que jamais se tourner vers de «nouveaux marchés» prometteur­s. Or, ceux-ci se situent essentiell­ement en Asie, selon les prévisions de l’Agence internatio­nale de l’énergie et de l’Office national de l’énergie. L’Inde et la Chine devraient d’ailleurs mener le bal, a souligné Tim McMillan mardi, devant un parterre de gens d’affaires.

Avec l’approbatio­n du pipeline Trans Mountain, de Kinder Morgan, le pétrole des sables bitumineux devrait se frayer un chemin vers la côte ouest canadienne, a-t-il dit. S’il est construit, ce pipeline transporte­ra au total 890 000 barils par jour, des barils qui devraient ensuite être exportés vers la Chine.

M. McMillan a toutefois insisté sur l’importance de rejoindre également le marché indien. Ce pays de plus d’un milliard d’habitants est déjà le troisième importateu­r mondial de pétrole et de produits pétroliers. Qui plus est, l’Agence internatio­nale de l’énergie prévoit que la demande quotidienn­e de pétrole devrait atteindre 10 millions de barils en 2040. Pour le Canada, qui détient les troisièmes réserves pétrolière­s mon- diales, il s’agit donc d’un marché prometteur.

Pour rejoindre le marché indien, a insisté Tim McMillan, il faudra absolument construire le pipeline Énergie Est, de TransCanad­a. Ce pipeline, voué surtout à l’exportatio­n, transporte­rait chaque jour 1,1 million de barils de pétrole des sables bitumineux en sol québécois, sur une distance de 625 kilomètres.

Pipeline crucial

Pour le président et chef de la direction de l’ACPP, «ce projet est important pour l’industrie, mais aussi pour la position du Canada à l’échelle internatio­nale ». Dans le cadre d’une rencontre de presse à la suite de son allocution, il a même dit au Devoir que le pipeline Énergie Est serait «crucial pour le Canada».

«Si le Canada peut définir son propre destin, ça nous place dans une meilleure position»,a ajouté Tim McMillan, en rappelant le fait que ce pipeline de TransCanad­a serait entièremen­t construit en sol canadien, contrairem­ent au pipeline Keystone XL.

Il est vrai qu’Énergie Est est d’abord conçue pour faciliter l’exportatio­n de la production croissante des sables bitumineux. Selon des données présentées l’an dernier dans le cadre de l’étude du Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent, pas moins de 80 % serait directemen­t destiné aux marchés extérieurs, soit environ 900 000 barils par jour. Outre l’Inde, il était alors question de transporte­r ce pétrole

brut vers l’Europe et les États-Unis.

Pas un cas unique

Tim McMillan se dit toutefois conscient de la controvers­e que suscitent les projets de pipelines comme celui de TransCanad­a. «Le cas du Québec n’est pas unique», a-t-il rappelé, avant de souligner que les divergence­s de points de vue «font partie de la vie ».

«Il ne faut pas envisager les projets en se disant qu’il n’y aura pas de gens qui seront en désaccord. Il faut s’assurer que les gens avec des points de vue différents puissent avoir accès aux faits. Ensuite, il faut prendre les décisions qui sont bonnes pour l’ensemble du Canada. »

Selon lui, c’est précisémen­t ce qu’a fait le premier ministre Justin Trudeau en autorisant la constructi­on du pipeline Trans Mountain en novembre dernier. Ce projet, auquel s’oppose notamment la Ville de Vancouver, suscite déjà des contestati­ons judiciaire­s.

Pour rejoindre le prometteur marché indien, il faudra impérative­ment construire le pipeline Énergie Est, affirme Tim McMillan

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Le président et chef de la direction de l’Associatio­n canadienne des producteur­s pétroliers (ACPP), Tim McMillan

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