Le Devoir

Le Sénat déplore l’absence de plan stratégiqu­e

Le programme est administré par 31 organismes gouverneme­ntaux

- JORDAN PRESS à Ottawa

Un comité sénatorial soutient que le gouverneme­nt libéral pourrait gaspiller des milliards de dollars dans le cadre de son programme d’infrastruc­ture au cours des prochaines années, à cause d’un manque d’orientatio­n stratégiqu­e pour dépenser efficaceme­nt toutes les nouvelles sommes promises.

Le Comité sénatorial des finances nationales estime que, dans certains cas, la seule mesure du rendement de ces vastes programmes se limite au nombre de projets terminés et à leur valeur. Le gouverneme­nt sait donc combien d’argent sort des coffres, mais ne sait pas précisémen­t ce à quoi il aura servi, déplorent les sénateurs. Faute d’un plan stratégiqu­e, Infrastruc­ture Canada ne peut établir d’objectifs significat­ifs ni de mesures du rendement, souligne le rapport du Comité des finances. Les parlementa­ires et les Canadiens ne peuvent donc vérifier si le programme d’infrastruc­ture du gouverneme­nt libéral atteindra véritablem­ent son objectif de stimuler l’économie.

En décembre dernier, 308 projets, d’une valeur de 806 millions, étaient déjà en route, alors que le gouverneme­nt visait le double

Guichet unique

Les sénateurs déplorent par ailleurs que le programme d’infrastruc­ture soit administré d’une façon ou d’une autre par 31 organismes gouverneme­ntaux, qui présentent souvent des priorités différente­s. Le comité croit que cette façon de faire prête à confusion pour les demandeurs et ne permet pas au Parlement d’effectuer un suivi rigoureux. Il recommande donc qu’Infrastruc­ture Canada soit le guichet unique auquel les municipali­tés pourraient s’adresser directemen­t. Les sénateurs recommande­nt par ailleurs qu’Infrastruc­ture Canada consulte les municipali­tés et prenne en compte leurs besoins réels avant de distribuer les fonds.

Le président du comité sénatorial, le conservate­ur Larry Smith, a résumé le rapport en estimant que le gouverneme­nt devait établir des priorités et rendre le programme plus souple et plus clair. «Nous ne disons pas au gouverneme­nt qu’il ne fait pas du bon travail — là n’est pas la question. Mais ce programme est primordial pour l’avenir du pays. »

186 milliards

Au cabinet du ministre de l’Infrastruc­ture, Amarjeet Sohi, on promet pour le printemps un plan stratégiqu­e à long terme, élaboré de concert avec les municipali­tés et les parlementa­ires. Ottawa a promis jusqu’ici d’injecter 186 milliards dans les projets d’infrastruc­ture au cours de la prochaine décennie; près de la moitié de cette somme proviendra du nouveau programme promis par les libéraux en campagne électorale pour stimuler l’économie canadienne.

La première phase du programme est destinée à rénover ou réparer les infrastruc­tures existantes, afin de verser l’argent rapidement en attendant la deuxième phase, qui exige plus de préparatio­n. Cette phase, dotée d’une enveloppe d’environ 80 milliards, servira à réaliser des projets plus ambitieux.

Ottawa a mis plus de temps que prévu à verser les premières tranches du programme aux provinces et aux municipali­tés. Le comité sénatorial a découvert qu’en décembre dernier, 308 projets, d’une valeur de 806 millions, étaient déjà en route, alors que le gouverneme­nt visait le double — 719 projets valant 1,5 milliard. Ce lent décollage risque de mettre à mal les projection­s économique­s des libéraux; par contre, les Canadiens verront encore des grues lorsqu’ils se rendront voter aux élections fédérales d’octobre 2019.

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