Le Devoir

La Russie et la Chine bloquent les sanctions de l’ONU concernant des armes chimiques

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Genève — La Russie et la Chine ont bloqué mardi des sanctions contre la Syrie pour son utilisatio­n d’armes chimiques, marquant le premier grand désaccord entre Washington et Moscou au Conseil de sécurité depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche.

Vladimir Poutine l’avait encore martelé quelques heures avant le vote: imposer des sanctions «n’aiderait pas le processus de négociatio­ns» pour la paix en Syrie, le président russe qualifiant d’éventuelle­s mesures contre le pouvoir syrien « d’inopportun­es » dans le contexte des pourparler­s laborieux menés à Genève sous l’égide de l’ONU.

Cela «ferait juste du tort ou minerait la confiance» envers ces négociatio­ns, a-t-il souligné mardi à Bichkek, au Kirghizsta­n.

Un monde «plus dangereux»

« Cette résolution est très opportune », a rétorqué l’ambassadri­ce américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley, devant les membres du Conseil. «C’est un triste jour pour le Conseil de sécurité quand les membres commencent à trouver des excuses à d’autres États membres qui tuent leur propre peuple », a-telle ajouté après le vote. «Le monde est sans aucun doute plus dangereux» après ce rejet.

Les États-Unis et la Russie sont chacun impliqués sur le terrain en Syrie, Washington à la tête d’une coalition internatio­nale luttant contre le groupe djihadiste État islamique, et la Russie en soutien de son allié Bachar al-Assad.

Les Européens s’étaient montrés inquiets ces dernières semaines d’un éventuel changement de position radical des États-Unis vis-à-vis de la Russie après l’arrivée au pouvoir du nouveau gouverneme­nt Trump.

Mais sur le dossier syrien, Washington s’est de nouveau rangé du côté du Royaume-Uni et de la France en se ralliant à leur projet de résolution, qui proposait des sanctions contre 11 responsabl­es syriens, principale­ment des chefs militaires, et 10 organismes, tous en lien avec l’utilisatio­n d’armes chimiques en Syrie.

Paris a déploré ce veto, s’en prenant à la Russie, sans citer la Chine. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a estimé que la Russie portait «une lourde responsabi­lité vis-à-vis du peuple syrien et du reste de l’humanité». Son homologue britanniqu­e, Boris Johnson, a pour sa part exprimé sa « profonde déception », regrettant que la Russie et la Chine aient choisi d’« empêcher toute action ».

Septième veto russe

Le texte a finalement reçu neuf votes pour et trois votes contre: ceux de la Chine, de la Russie et de la Bolivie. Le Kazakhstan, l’Éthiopie et l’Égypte se sont abstenus.

C’est la septième fois que Moscou, le principal allié de Damas, utilise son veto pour protéger le régime de Bachar al-Assad contre les sanctions de l’ONU. La Chine, autre membre permanent du Conseil de sécurité doté du droit de veto, s’est jointe à la Russie pour bloquer six de ces sept résolution­s.

La nouvelle propositio­n de sanctions suivait une enquête commune menée par les Nations unies et l’Organisati­on pour l’interdicti­on des armes chimiques (OIAC), qui a conclu en octobre que le régime syrien avait mené au moins trois attaques avec des armes chimiques en 2014 et 2015 contre les villes de Tell Mannas, Qmenas et Sarmin.

Les enquêteurs avaient déterminé que les djihadiste­s du groupe État islamique avaient eux aussi utilisé du gaz moutarde en 2015.

L’ambassadeu­r de Chine auprès des Nations unies, Liu Jieyi, a estimé que ces sanctions auraient été prématurée­s. «L’enquête est encore en cours et il est trop tôt pour parvenir à une conclusion», a-t-il dit au Conseil.

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IVAN SEKRETAREV AGENCE FRANCE-PRESSE Le président russe, Vladimir Poutine, a une fois de plus protégé le régime de Bachar al-Assad.

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