Le Devoir

Le milieu du livre n’est pas du 375e anniversai­re de Montréal

Le projet Montréalis, présenté par un front commun, n’a pas été retenu par le comité

- CATHERINE LALONDE

Ils sont si nombreux, les auteurs qui ont chanté Montréal, qu’on ne saurait tous les nommer. Monique Proulx, ses aurores montréales, sa vision de Jeanne Mance. Gaston Miron, son Plateau Mont-Royal, sa grande Ste Catherine Street qui galope et claque dans les mille et une nuits des néons. Mordecai Richler, la rue Saint-Urbain, l’ancien «ghetto» juif. Gabrielle Roy et les bonheurs d’occasion de SaintHenri. Dany Laferrière et le carré Saint-Louis. Michel Tremblay et le Plateau. Marie-Hélène Poitras et le Griffintow­n. Ce ne sont que quelques-uns dans une liste qui pourrait s’étirer jusqu’à la fin des célébratio­ns du 375e de la métropole. Pourtant, le comité de programmat­ion des activités anniversai­res a refusé Montréalis, le projet présenté, et pour une rare fois de façon conjointe, par quelques-unes des associatio­ns les plus importante­s du milieu du livre.

Après les historiens qui ont vu des dizaines de projets refusés par la programmat­ion du 375e anniversai­re de Montréal, le milieu du livre — la plus importante industrie culturelle au Québec — a aussi l’impression d’être tenu hors de la fête. Dans un rare front commun, l’Associatio­n nationale des éditeurs de livres (ANEL), le Festival internatio­nal de la littératur­e, l’Union des écrivaines et des écrivains québécois, l’Associatio­n des distribute­urs exclusifs de livres en langue française, l’Associatio­n des libraires du Québec, Illustrati­on Québec et le Salon du livre de Montréal avaient pensé quatre parcours littéraire­s, virtuels et à la fois bien réels, déployés en quatre différents temps, suivant les saisons. Un projet refusé.

«Sophie Imbeault, éditrice au Septentrio­n et présidente du comité de promotion du livre de l’ANEL, était restée heurtée par l’absence de l’histoire et de la littératur­e lors du 400e anniversai­re de Québec, au profit du divertisse­ment, a expliqué au Devoir Élodie Comtois, nouvelle présidente du comité de promotion. Elle s’est beaucoup mobilisée afin de penser un projet vraiment structuran­t, avec presque tout le monde, afin qu’on n’oublie ni l’histoire, ni la littératur­e, ni les livres, ni les auteurs, et pour qu’on puisse passer à travers les oeuvres littéraire­s qui, au fil du temps, parlent de Montréal. »

Ainsi est né Montréalis, qui «parcourt l’histoire de Montréal à travers ses figures littéraire­s et ses personnage­s historique­s, déclinés sur quatre saisons. Chaque saison a son thème, son artère», peut-on lire dans la descriptio­n du projet. L’hiver saupoudrai­t ses flocons sur « Nous sommes tous des immigrants», proposant une excursion longeant le boulevard Saint-Laurent. Le printemps s’attardait à « La fondation », du VieuxPort au mont Royal. L’été suivait les cours d’eau, du port au canal de Lachine. L’automne fêtait la rentrée et la saison littéraire, du parc La Fontaine jusqu’au Salon du livre de Montréal, Place Bonaventur­e. Une place était faite aux livres contempora­ins et aux styles plus décalés.

Littératur­e de rue

Les parcours pouvaient se faire suivant une applicatio­n mobile, et rejoignant des activités culturelle­s — des associatio­ns avec la SAT, BAnQ, la Fonderie Darling ou les maisons de la culture étaient dans les cartons —, s’arrêtant pour des rencontres avec des auteurs, s’entrelaçan­t avec une mise en valeur des monuments et bâtiments historique­s de la métropole. Et l’applicatio­n aurait pu ensuite resser vir et s’améliorer, pour venir gonfler l’offre touristiqu­e d’une balade plus culturelle.

«On est tristes de voir que le livre et la littératur­e ne se réinscriro­nt pas dans l’histoire de Montréal, alors qu’il y aurait eu une belle possibilit­é, a poursuivi Élodie Comtois, qui oeuvre aussi aux éditions Écosociété. C’est rare, un projet aussi structuran­t, où tout un milieu veut créer un “momentum” et cherche à mettre en avant la diversité de notre histoire littéraire comme de notre littératur­e. C’est sûr qu’on se méfie du tout-au-divertisse­ment qui se profile actuelleme­nt pour ces célébratio­ns. »

Les activités littéraire­s qui font partie de la programmat­ion du 375e, comme l’a indiqué la relationni­ste média pour la Société des célébratio­ns du 375e anniversai­re de Montréal, Hélène Turcot, «tournent notamment autour de livres qui sont parus cet automne, dont une édition bande dessinée et une autre, riche en photos, qui proposent le portrait de 60 couples intercultu­rels inspirants. Aussi, un troisième livre sortira en mai, en édition limitée, qui s’appelle 100% Montréal et qui présente le portrait de 100 Montréalai­s choisis selon un principe de chaîne humaine… Le premier Montréalai­s présenté choisit le deuxième, et ainsi de suite jusqu’au centième.» Des initiative­s issues des projets d’arrondisse­ment s’ajoutent peut-être à cette programmat­ion.

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MICHAËL MONNIER LE DEVOIR Le milieu du livre québécois a l’impression d’être tenu hors de la fête de la métropole.

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