Le Devoir

Mont-Joli n’a pas l’intention d’abuser du pouvoir accordé

Les villes, petites ou grosses, ne seront plus tenues de lancer des appels d’offres pour les contrats de 100 000 $ ou moins

- ISABELLE PORTER

Ce n’est pas parce que le gouverneme­nt leur permet de le faire que les municipali­tés vont donner tous les contrats de 100 000$ sans appels d’offres, plaide la mairesse de Mont-Joli, Danielle Doyer.

À Mont-Joli, on compte d’abord faire un «test» avec les contrats sous la barre des 50 000$, a expliqué la mairesse en entrevue au Devoir vendredi. «Pour une municipali­té de notre taille, de gré à gré, 100 000$, je ne suis pas sûre », dit-elle.

La ville de Mont-Joli compte 6600 habitants et son budget annuel est d’environ 11 millions, soit près de 100 fois moins que celui de la ville de Québec. Malgré tout, elle est ravie que le gouverneme­nt donne aux villes qui le souhaitent la possibilit­é de le faire. «Ce n’est pas une obligation, c’est un pouvoir qu’on nous donne. […] Ce n’est pas parce qu’on a le droit de faire quelque chose en législatio­n qu’on va le faire, résume-t-elle. Pour les grosses municipali­tés, la limite de 100 000 $, ça peut être intéressan­t, mais à mon idée, la plupart des municipali­tés vont continuer d’aller chercher plus d’une soumission. »

Le projet de loi 122, qui vise à donner plus d’autonomie aux municipali­tés, fait passer de 25 000 $ à 100 000 $ le montant maximal des contrats pouvant être octroyés sans appel d’offres. Certains groupes, comme la Ligue d’action civique, ont dénoncé cette mesure récemment en faisant valoir qu’il n’y aurait presque plus d’appels d’offres dans les petites villes.

Ils donnaient l’exemple de Mont-Joli, où 72% des contrats accordés l’an dernier en appels d’offres auraient été donnés de gré à gré si la loi avait été en vigueur. Cette proportion aurait été de 25 % à Montréal.

Pour la Ligue d’action civique, le recours aux contrats de gré à gré est d’autant plus inquiétant que les petites municipali­tés manquent de ressources et d’expertise pour procéder à l’octroi de contrats.

Une affirmatio­n insultante pour Mme Doyer. Outre les appels d’offres, les municipali­tés ont toutes sortes de règles pour encadrer les contrats municipaux, plaide-t-elle. MontJoli, par exemple, a entériné une politique d’achat en 2010 qui interdit les dons et encadre avec précision les relations entre le personnel de la Ville et les entreprise­s qui contracten­t avec elle.

Des règles différente­s

Mme Doyer concède toutefois que «ce ne sont pas toutes les municipali­tés» qui ont une politique d’achat, en particulie­r les plus petites. Selon elle, le gouverneme­nt devrait peut-être catégorise­r les municipali­tés selon leur nombre d’habitants et permettre l’octroi de contrats de gré à gré proportion­nel à la population des municipali­tés, comme le proposait récemment le maire de Saint-Jérôme, Stéphane Maher, dans Le Devoir.

«Est-ce que les petites municipali­tés ont des réglementa­tions concernant leurs achats? Pas souvent. […] Et la politique de gestion contractue­lle, je ne suis pas sûre que les petites municipali­tés ou les petits villages ont ça.»

Reste à savoir si d’autres municipali­tés comptent ne pas aller jusqu’à la limite de 100 000$. À l’Union des municipali­tés (UMQ), on n’a pas eu vent d’autres municipali­tés ayant prévu un test sous la barre des 50 000$. «La plupart attendent certaineme­nt de voir ce qui sera dans le texte définitif de la loi avant de décider ce qu’elles vont faire», fait-on remarquer.

La commission parlementa­ire sur le projet de loi 122 s’est terminée avant la relâche et doit reprendre pour l’étude détaillée.

«Ce qui est certain cependant, c’est que désormais, pour les contrats en bas de 100 000$, chaque municipali­té aura l’autonomie nécessaire pour se doter d’une politique interne de gestion contractue­lle en fonction de sa réalité propre, de la valeur et du type de contrats octroyés, etc., et justifier pourquoi elle retient telle ou telle approche», a expliqué le porte-parole de l’UMQ, Patrick Lemieux.

Les lobbies municipaux réclament depuis des années que le gouverneme­nt leur donne plus de souplesse, notamment dans l’octroi des contrats. Pour justifier le seuil de 100 000$ pour les appels d’offres, ils ont fait valoir que c’est ce qui est imposé aux commission­s scolaires et aux ministères.

À mon idée, la plupart des municipali­tés vont continuer d’aller chercher plus d’une soumission Danielle Doyer

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ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR
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