Le Devoir

Sonya Yoncheva, parfaite et déchirante Traviata

- CHRISTOPHE HUSS

LA TRAVIATA Opéra de Verdi. Avec Sonia Yoncheva (Violetta), Michael Fabiano (Alfredo), Thomas Hampson (Germont père). Direction : Nicola Luisotti. Mise en scène : Willy Decker. Réalisateu­r : Matthew Diamond. Samedi 11 mars 2017. Reprises (Cineplex) : 15, 17 ou 19 avril selon les cinémas.

Le terme de perfection s’emploie très rarement en musique, mais je n’ai pas d’autre adjectif à proposer pour qualifier la prestation, samedi, en direct du Metropolit­an Opera sur les écrans de 70 pays, de la soprano bulgare Sonya Yoncheva, 35 ans.

J’avais anticipé l’événement en juin dernier dans ces colonnes après avoir vu Yoncheva chanter ce rôle à l’Opéra Bastille, à Paris. «C’est là l’une des grandes Traviata des 50 dernières années et nous pourrons la voir au cinéma dans la production du Metropolit­an Opera le 11 mars 2017», avait écrit Le Devoir. Le miracle était annoncé. Il a eu lieu.

Yoncheva n’est pas une soprano lambda. Elle possède non seulement une beauté naturelle, une voix somptueuse, mais aussi et surtout pas mal de choses très rares, et notamment un dosage très fin de la matière de l’émission vocale en fonction des états d’âme et de l’état physique du personnage.

En d’autres termes, Yoncheva ne chante pas, ne joue pas: elle est! Et la nature de la voix, le dosage du souffle suivent cette incarnatio­n. Ce faisant, et surtout au cinéma, l’exercice d’exprimer ses émotions en chantant ne paraît jamais artificiel. Il y a là une intelligen­ce vocale et dramatique rare et précieuse. Et comme cette intelligen­ce s’insère dans l’une des plus formidable­s mises en scène d’opéra des 15 dernières années, ce spectacle de Willy Decker, une course contre la montre avec la mort qui rôde dans l’arène des plaisirs et des passions, vous imaginez le niveau !

Michael Fabiano est un ténor parfaiteme­nt assorti à Yoncheva. Avec lui, aussi, on y croit: il paraît un peu falot au premier acte, mais déploie sa voix par la suite. Dommage que Thomas Hampson, ou ce qu’il en reste (voix grise, ligne hachée, attaques impures), hante encore ce spectacle. Sa prestation minorera la portée du DVD, si cette représenta­tion y est destinée.

Excellente direction de Luisotti et mise en image calme de Matthew Diamond, auquel on pardonnera trois ou quatre plans manqués.

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