Le Devoir

Le Bloc québécois doit voir plus loin que le Québec, disent Duceppe et Landry

La députée indépendan­te à Québec souhaite collaborer avec ses ex-collègues du PQ

- MARIE VASTEL Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

Le Bloc québécois n’aura donc pas de course à la chefferie cette fois-ci. L’unique rival de Martine Ouellet s’étant désisté, la voie lui a été laissée libre pour devenir de facto chef du parti souveraini­ste, en promettant un nouveau rôle pour le Bloc, en plus de la défense traditionn­elle des intérêts du Québec : la promotion active de la souveraine­té. Les éminences grises du mouvement souveraini­ste, Bernard Landry et Gilles Duceppe, la somment de ne pas oublier de défendre aussi les intérêts internatio­naux et canadiens au nom du Québec.

«J’en suis venue à la conclusion que la meilleure place pour préparer l’indépendan­ce est à Ottawa, parce que tous les pouvoirs qu’il nous manque pour être un nouveau pays à l’ONU sont à Ottawa », a fait valoir Martine Ouellet, en confirmant qu’elle était l’unique candidate et donc nommée chef du Bloc québécois en fin de journée.

Favorite des partisans de l’ancien chef Mario Beaulieu, Martine Ouellet reprend d’ailleurs le plan de match de son prédécesse­ur en souhaitant faire du Bloc un véhicule pour préparer l’indépendan­ce sur le terrain. «C’est certain qu’il va y avoir un peu une évolution dans le rôle du Bloc québécois, a-t-elle confirmé. Un rôle de défendre les intérêts du Québec très clairement et les consensus au Québec, on va continuer ce rôlelà. Mais aussi un rôle de préparer l’indépendan­ce du Québec. »

L’ancien premier ministre Bernard Landry salue cet objectif. « C’est ce dont le Bloc a besoin […] d’un message clair, précis pour mobiliser tous les indépendan­tistes, a-t-il indiqué au Devoir. On voit bien qu’elle est déterminée carrément et solidement à faire l’indépendan­ce du Québec. Et c’est une qualité. »

«C’est certain qu’il va y avoir un peu une évolution dans le rôle du Bloc québécois » Martine Ouellet

M. Landry, comme l’ancien chef du Bloc Gilles Duceppe, estime cependant que le parti souveraini­ste à Ottawa ne doit surtout pas cesser de défendre aussi les intérêts du Québec à l’internatio­nal. « On ne peut pas le traiter comme une simple province. […] Même quand il n’est pas indépendan­t, le Québec est une nation. Et il doit jouer le rôle qu’il peut avec son statut, dans le concert des nations», a insisté M. Landry.

Un discours repris par Gilles Duceppe, qui rappelle que le Bloc en avait débattu avant de trancher qu’il «faut se prononcer sur tout, parce qu’on paie sur tout. Quand on paie, on a notre mot à dire. Or, si on ne touche pas à ces questions-là, on fait erreur». Des questions comme les positions internatio­nales du Canada, les missions de la Défense nationale ou des politiques fédérales dans l’Ouest canadien.

Bien qu’elle ait adopté le même discours que Mario Beaulieu avant elle et qu’elle ait pour l’instant pris position sur des enjeux ayant une résonance principale­ment québécoise — Énergie Est, la vente de sièges sociaux comme celui de Rona, la protection de la gestion de l’offre dans la renégociat­ion de l’ALENA —, Martine Ouellet assure qu’elle discutera aussi de dossiers plus canadiens ou internatio­naux.

«C’est clair que ce sont des dossiers [les affaires étrangères, la défense] que nous regarderon­s et sur lesquels j’aurai l’occasion de me positionne­r avec mes collègues députés du Bloc québécois.» La semaine dernière, Mme Ouellet n’a pas pris position en point de presse sur la politique de boycottage, désinvesti­ssement et sanctions (BDS) contre Israël pour dénoncer les colonies juives et sur laquelle les députés bloquistes s’étaient prononcés.

Coopératio­n avec Lisée

La course à la direction du Parti québécois étant elle aussi derrière elle, Martine Ouellet souhaite un rapprochem­ent du Bloc et du PQ. Elle propose la tenue de caucus conjoints à l’occasion.

Quant à son choix de rester députée à Qubéec tout en étant chef du Bloc au fédéral, Mme Ouellet maintient que les rôles sont tout à fait conciliabl­es. Gilles Duceppe, de son côté, estime toujours qu’ils sont «incompatib­les». Quant à M. Landry, il « n’y [voit] pas de problème particulie­r».

Critiques, mais ralliement

Félix Pinel, candidat du Bloc dans Rivièredes-Mille-Îles en 2015, a tenté jusqu’à mardi — date limite pour les mises en candidatur­e — d’obtenir les 1000 signatures requises, dans 25 circonscri­ptions, pour se porter candidat. Mais en vain. Dénonçant « l’étapisme » du PQ et du Bloc, M. Pinel a reproché aux bloquistes d’avoir amputé d’un mois la période pour recruter de nouveaux membres qui appuieraie­nt sa candidatur­e. Concluant que «certains pourront ainsi procéder au couronneme­nt qu’ils espéraient tant », M. Pinel se rallie néanmoins à Mme Ouellet, qui, se réjouit-il, est « résolument nationalis­te et indépendan­tiste convaincue».

Le Bloc avait prévu un débat de ses aspirants chefs samedi. Ce sera plutôt un événement pour confirmer la nomination de Martine Ouellet à la tête du parti.

 ?? JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE ?? Martine Ouellet a été désignée chef du Bloc québécois à la suite du désistemen­t du seul autre candidat pressenti, Félix Pinel, qui n’a pu réunir les 1000 signatures nécessaire­s à sa mise en candidatur­e.
JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE Martine Ouellet a été désignée chef du Bloc québécois à la suite du désistemen­t du seul autre candidat pressenti, Félix Pinel, qui n’a pu réunir les 1000 signatures nécessaire­s à sa mise en candidatur­e.

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