Le Devoir

Geert Wilders a perdu son pari

- STÉPHANE BAILLARGEO­N

La vague Trump et celle du Brexit n’ont pas traversé les polders et les Pays-Bas ont finalement résisté à la tentation du populisme, de la postvérité et de l’extrême droite dans l’élection générale de mercredi.

Le fort taux de participat­ion du scrutin a plutôt profité aux libéraux dirigés par le premier ministre sortant, Mark Rutte. Son Parti populaire libéral et démocrate (VVD) mène la réaction ouverte à contre-courant des tendances observées aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Les projection­s de jeudi soir lui accordaien­t plus de 30 sièges sur les 150 de la chambre basse. Ce serait douze de plus qu’à la dissolutio­n de la législatur­e.

Le mode de scrutin du pays empêche pratiqueme­nt la domination majoritair­e au Parlement et force les coalitions élargies. Trois autres formations, celles des chrétiens-démocrates, des progressis­tes et du Parti pour la liberté (PVV), cumuleraie­nt chacune une vingtaine de sièges.

Le PVV, dirigé par Geert Wilders, le «Trump néerlandai­s», incarnait la tentation de la droite extrême. Mais s’il n’a pas la possibilit­é de diriger ou d’entrer au gouverneme­nt, il fait tout de même un gain puisqu’il n’avait que 15 députés à la dissolutio­n de la chambre.

«Je suis très fière de ce qui est arrivé et heureuse qu’on nous ait à nouveau fait confiance », a déclaré Tamara van Ark, chef de campagne du VVD. Elle s’exprimait en fonction des sondages réalisés aux bureaux de scrutins alors que les résultats officiels n’étaient pas encore connus.

Il semble aussi que la réaction de M. Rutte à la bataille diplomatiq­ue avec la Turquie lui a profité jusqu’aux urnes.

La crise a été déclenchée la semaine dernière quand La Haye a refusé que deux ministres d’Ankara fassent campagne sur le territoire néerlandai­s en vue d’un référendum pour accroître les pouvoirs du président. En tenant ferme contre le pays musulman, le chef du gouverneme­nt des Pays-Bas a du même coup tiré le tapis sous les pieds de ses adversaire­s de droite.

L’élection confirme également la chute du Parti du travail, allié des libéraux depuis 2012, qui passe de 38 députés à moins de 10 selon les projection­s. Ses déboires semblent profiter aux écologiste­s, autres grands gagnants de la soirée, avec un bon projeté de quatre à seize sièges. Il existe aussi un Parti des animaux (cinq députés) et un autre pour les retraités (quatre sièges).

Le libéral Rutte devra maintenant négocier une coalition avec ces positions disparates pour passer la ligne des 76 voix de la majorité. Il misera vraisembla­blement d’abord et avant tout sur les chrétiens-démocrates et les centristes réformateu­rs, ce qui annonce un gouverneme­nt moins à gauche que le précédent.

La victoire centriste souffle aussi le calme centriste sur une Europe surchauffé­e par la poussée de mouvements politiques populistes, nationalis­tes ou carrément xénophobes. Le scrutin aux Pays-Bas était souvent décrit par les politologu­es comme le révélateur des tendances qui pouvaient se développer dans les élections à venir en France et en Allemagne.

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MARTEN VAN DIJL AGENCE FRANCE-PRESSE Dans un entrepôt transformé en bureau de scrutin pour l’occasion, un électeur néerlandai­s a déposé son bulletin de vote dans l’urne.

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