Leitão ouvre ses goussets
Les budgets des ministères de l’Éducation et de la Santé seront bonifiés de 4 %
L’heure du rattrapage a sonné. À un an et demi des prochaines élections générales, le ministre des Finances, Carlos Leitão, relâchera encore un peu plus le frein exercé sur la croissance des dépenses au cours des dernières années. L’«austérité» tant décriée est terminée… pour vrai, martèlera-t-il mercredi, chiffres à l’appui.
Les sommes allouées aux deux principales missions du gouvernement du Québec — Éducation et Santé — croîtront de quelque 4%: du rarement vu depuis l’arrivée du Parti libéral du Québec aux commandes de l’État.
M. Leitão sera chaussé d’une paire de souliers flambant neufs lorsqu’il dévoilera son 4e budget ce mardi. « Même s’il est un peu incertain, nous pouvons faire face à l’avenir avec confiance et optimisme parce que notre économie est en meilleure position maintenant. C’est le budget pour dépenser davantage dans nos priorités», a-t-il déclaré lundi après-midi, après avoir disposé de ses vieilles chaussures rapiécées.
Éducation En haussant d’environ 4% le budget de fonctionnement, le gouvernement libéral permettra aux commissions scolaires d’embaucher des dizaines de techniciens en éducation spécialisée (TES), d’orthopédagogues, d’orthophonistes, ainsi que de psychologues afin de prêter main-forte aux élèves handicapés ou élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA). Mais, quelques centaines de millions de dollars ne constituent pas pour autant «une baguette magique», fait valoir la porteparole de la Coalition de parents d’enfants à besoins particuliers, Brigitte Dubé. Plusieurs professionnels ont choisi de pratiquer dans un bureau privé, plutôt que de «travailler quelques heures ici et là» dans le réseau public, dit-elle. « Ce n’est pas une simple question de réinvestir et de dire: “On va remettre du monde.» Il faut revoir aussi certaines façons de faire”. Les syndicats accusent le gouvernement libéral d’avoir «sacrifié une génération» au moyen des compressions totalisant 1 milliard de dollars.
Santé Le rattrapage salarial des médecins est «complété», répète le ministre Gaétan Barrette depuis des mois. Sauf qu’il a lui-même signé en septembre 2014 une entente sur l’étalement des hausses, qui prévoit encore 1,9 milliard de rattrapage d’ici 2021-2022. Dans l’ensemble, le budget accordé à la santé doit augmenter de 4%, a déjà annoncé le premier ministre, Philippe Couillard. C’est beaucoup plus que les 2,4% annoncés dans le dernier budget, mais pas assez pour combler l’écart qui s’est créé au fil des ans, selon Jean-Pierre Aubry, du CIRANO. En se fiant sur un rapport de l’Institut du Québec qui a été présidé par Raymond Bachand, il rappelle que les dépenses de santé « devraient » croître de 5,2% par an et qu’à défaut, une croissance de 4,2% permettrait au gouvernement de trouver «un point d’équilibre ». Or, selon ses calculs, le taux annuel moyen de croissance a été de 2,7 % depuis 2014.
Fardeau fiscal Le quatrième budget Leitao doit sceller la fin de la «taxe santé», un an plus tôt que prévu. La mesure fiscale, annoncée en 2010 par Raymond Bachand, pourrait être abolie de manière rétroactive pour l’année 2016.
Transports On s’attend à trouver dans le budget des précisions sur les grands projets de transport en commun à Montréal et Québec soit le Réseau électrique métropolitain (REM), le Service rapide par bus (SRB), le troisième lien Québec-Lévis et peut-être le prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal. Le gouvernement doit annoncer une participation d’environ 1 milliard $ dans le projet du REM. La création d’un bureau de projet pour le « troisième lien» entre Québec et Lévis devrait aussi être officialisée.
Famille L’Association québécoise des centres de la petite enfance (CPE) réclame l’abolition de la modulation des services de garde, et estime à 60 millions $ le montant du réinvestissement nécessaire dans le réseau des CPE. De quoi financer l’indexation des dépenses non salariales, rétablir les services alimentaires à leur niveau d’avant les compressions imposées et assurer le financement des services qui génèrent la qualité des services éducatifs, comme les bureaux coordonnateurs.
Culture La Coalition pour la pérennité de la presse d’information, dont Le Devoir fait partie, réclame des crédits d’impôt remboursables pour les coûts de production et les investissements nécessaires au virage numérique, de même qu’une exemption de la contribution au service de recyclage, qui a augmenté de plus de 1000% en 10 ans. Le gouvernement libéral pourrait acquiescer à leurs demandes, en partie.