Culture : Janette Bertrand cède ses archives à BAnQ
Deux mètres linéaires de documents… C’est ce que remet aux archives nationales Janette Bertrand, dans un fonds nouvellement créé qui porte sur sa carrière littéraire, radiophonique, télévisuelle et théâtrale. En plus de ses prix et distinctions, de ses agendas et même de témoignages reçus de téléspectateurs, le fonds d’archives réunit surtout des manuscrits annotés et diverses versions des oeuvres de la grande dame depuis les années 1980, en particulier celles d’Avec un grand A, l’inoubliable série dramatique qui a marqué toute une génération de Québécois.
«J’ai même des photos de l’année où j’étais dans la ligue d’improvisation. J’étais complètement pourrie, mais c’est là», rigole Janette Bertrand.
Quand on lui demande la raison derrière ce don aux archives, elle répond en éclatant de rire: «J’ai 92 ans! Je dois être vieille.» La vraie raison, selon la présidente-directrice générale de BAnQ, Christiane Barbe, c’est que cette grande dame «a contribué de façon extraordinaire » au développement de la société québécoise. «Le regroupement de ses écrits en un ensemble archivistique rend l’évolution de sa pensée d’autant plus accessible et la qualité de sa contribution d’autant plus éclatante.»
Pour Janette Bertrand, ce geste satisfait son besoin de donner au suivant. «J’ai toujours été une espèce de professeure », souligne-t-elle, se remémorant sa jeunesse dans le quartier du «faubourg à m’lasse», une époque où les fillettes devaient travailler. «Moi, j’avais un père qui m’a fait étudier. Je suis allée à l’université et je me suis toujours sentie coupable vis-à-vis d’elles. Je me disais toujours que j’allais leur redonner, leur montrer ce que j’avais appris. Je crois beaucoup à la transmission. Je veux bien qu’on apprenne de moi, car j’ai beaucoup appris des autres. »
Contribution féministe
Son fonds, insiste-t-elle, a aussi quelque chose de résolument féministe. « Je pense que pour les femmes, c’est important de voir qu’il faut continuer à écrire. […] Les filles sont autant capables d’écrire pour les gars. Il n’y a pas de littérature féminine ou masculine. Il y a la littérature de quelqu’un. »
BAnQ abonde et souligne que toutes ces caisses de documents s’ajoutent à un riche corpus documentant la présence de femmes dans les milieux journalistique, littéraire, théâtral et télévisuel — notamment les fonds Clémence DesRochers, Dominique Michel et Lise Payette — à une époque où celles-ci étaient peu nombreuses dans ces domaines. Les archives de Mme Bertrand sont également complémentaires d’autres fonds reliés à la scène télévisuelle québécoise, comme ceux de Jean Bissonnette et de Claude Jasmin.
Janette Bertrand admet avoir été surprise qu’on l’ait approchée pour soumettre les traces de son oeuvre. «Je n’aurais jamais pensé qu’on puisse s’y intéresser. Ça a pris presque un an, ramasser toutes mes affaires, je ne suis pas une gardeuse », confie celle qui fera paraître un autre roman en octobre, une histoire d’amour dont elle ne révèle rien si ce n’est que ça parlera d’«un énorme tabou». En attendant, les plus impatients auront dès aujourd’hui tout un fonds d’archives à se mettre sous la dent.
Cette grande dame «a contribué de façon extraordinaire » au développement de la société québécoise