Le Devoir

Le budget va dans la bonne direction, mais la cote de crédit du Québec ne bouge pas

- FRANÇOIS DESJARDINS

Le Québec en fait plus que plusieurs autres provinces en ce qui concerne la diminution du poids de sa dette, mais les efforts devront se poursuivre de manière durable avant qu’ils puissent donner lieu à un relèvement de sa cote de crédit, ont estimé des grandes agences de notation au lendemain du quatrième budget Leitão.

« Lorsqu’on regarde le Québec comparativ­ement aux autres, c’est encouragea­nt», a dit Travis Shaw, vice-président des finances publiques à l’agence DBRS, basée à Toronto. « Cela dit, c’est assez graduel, et le poids de la dette du Québec, si on le juxtapose à celui des autres, demeure élevé.»

Sous l’Ontario

La cote de A (élevé) décernée par DBRS ne bouge pas pour l’instant, et se trouve tout juste sous celle de AA (faible) accordée à l’Ontario, où le gouverneme­nt signe des déficits importants depuis la crise financière.

Voilà maintenant dix ans que le gouverneme­nt québécois effectue des versements réguliers au Fonds des génération­s, dont l’objectif est de produire des rendements supérieurs aux intérêts liés à ses emprunts. Alimenté entre autres par des redevances hydrauliqu­es, la taxe spécifique sur les boissons alcoolique­s et l’indexation de l’électricit­é patrimonia­le, il atteint présenteme­nt 10,6 milliards.

La dette brute du Québec est de 207 milliards, soit 52,7% du produit intérieur brut (PIB), un ratio en baisse depuis deux ans. L’objectif est de l’amener à 45 % d’ici 2025-2026. En guise de comparaiso­n, le ratio ontarien était de 46,3% l’an dernier, comparativ­ement à 46,8% au gouverneme­nt fédéral.

L’état des finances sourit aux agences de notation. Québec a terminé l’exercice 2016-2017 sur un excédent de 2,3 milliards. Après un versement d’un peu plus de 2 milliards au Fonds des génération­s, il reste 250 millions. En 20172018, la contributi­on au Fonds sera de 2,5 milliards. De plus, les prochains budgets seront équilibrés eux aussi, prévoit le gouverneme­nt Couillard, qui a injecté des sommes additionne­lles en santé et en éducation tout en annonçant une baisse d’impôt générale.

«Les budgets équilibrés et la prévision d’une croissance des sommes dans le Fonds des génération­s sont un facteur positif », a estimé dans une note d’analyse l’agence Moody’s, qui se garde pour l’instant de modifier sa cote de Aa2. Celleci, qui influence les taux d’intérêt exigés par les investisse­urs sur les marchés obligatair­es, est la même que pour l’Ontario, le Manitoba et les provinces maritimes.

La Colombie-Britanniqu­e se trouve elle aussi dans une «situation fiscale plutôt enviable», a dit M. Shaw, et le poids de sa dette au PIB diminue. «Le Québec semble bouger un peu plus vite», a-t-il dit.

Une des préoccupat­ions de certains experts concerne la structure du Fonds des génération­s, dans lequel un gouverneme­nt pourrait, s’il le désirait, puiser pour consacrer des

sommes à d’autres fins. Cette possibilit­é est théorique, disent-ils, mais rien n’indique qu’elle pourrait se réaliser dans un avenir rapproché.

Aux yeux de Standard & Poor’s, la situation du Québec repose sur des «assises fiscales saines», a dit Paul Judson, directeur principal à Toronto. Son économie a fait mieux que la moyenne canadienne, ce qui a donné de l’élan aux revenus autonomes du gouverneme­nt. Cela dit, le niveau de la dette «est très élevé», et tout geste visant à réduire son poids dans l’économie est perçu comme positif.

Sur la question de la gestion de la dette, une étude du Fonds monétaire internatio­nal avait conclu en 2014 que les États qui compriment leurs dépenses pour diminuer leur endettemen­t causent plus de dommages collatérau­x dans l’économie que de bienfaits. Le FMI évoquait plutôt l’idée de laisser l’économie croître naturellem­ent afin que le poids de la dette prenne moins de place au fil du temps.

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