Le Devoir

Une taxe frontalièr­e nuirait aux États-Unis, soutient Morneau

- ANDY BLATCHFORD à Ottawa

Le ministre canadien des Finances a plaidé lundi, devant un parterre de gens d’affaires à New York, qu’un projet de « taxe américaine à la frontière» sur les importatio­ns risquait d’appauvrir les deux pays, et qu’elle pourrait même nuire davantage aux Américains.

Dans le cadre d’un événement organisé par le Forum économique mondial, Bill Morneau a prévenu qu’une telle taxe frontalièr­e, qui s’apparente en fait à un tarif douanier, nuirait aux familles des deux côtés de la frontière en perturbant une relation commercial­e bénéfique pour les deux parties. Il a aussi plaidé que cette taxe à l’importatio­n imposerait des coûts additionne­ls aux entreprise­s américaine­s.

Cette prise de position ferme du ministre Morneau contre la «taxe frontalièr­e» survient après que le ministre des Ressources naturelles, Jim Carr, a noté la semaine dernière que cette propositio­n était accueillie avec beaucoup d’opposition à Washington même. À l’issue de rencontres avec des législateu­rs, des représenta­nts du gouverneme­nt et des gens d’affaires, M. Carr avait estimé que Washington n’était pas près d’adopter une taxe à l’importatio­n dans le cadre du projet de loi «omnibus» sur une vaste réforme fiscale, qui doit être déposé bientôt.

Évaluation­s

M. Morneau a précisé lundi que le gouverneme­nt canadien avait mené des évaluation­s «extrêmemen­t préliminai­res» sur les impacts économique­s potentiels d’une taxe américaine sur les importatio­ns, puisqu’il existe encore trop de données hypothétiq­ues pour en arriver à une conclusion claire.

L’incertitud­e entourant une telle taxe frontalièr­e a soulevé des inquiétude­s du côté des entreprise­s canadienne­s, dont plusieurs s’appuient fortement sur l’exportatio­n en sol américain.

Le ministre Morneau a par ailleurs vanté lundi le solide partenaria­t qui lie déjà les deux pays et a soutenu que le commerce et les investisse­ments sont essentiell­ement, au fil des ans, aussi bénéfiques pour un pays que pour l’autre. Une taxe frontalièr­e se traduirait par une hausse des prix à la consommati­on aux ÉtatsUnis et pourrait soulever des questions liées aux devises, a prévenu le ministre.

Deux objectifs

«En ce qui nous concerne, ce serait mauvais aussi bien pour les Américains que pour les Canadiens de rendre la frontière plus opaque», a soutenu M. Morneau, qui doit se rendre mardi en Indiana pour y rencontrer le gouverneur de l’État et des gens d’affaires, et visiter la plus grande gare de triage du Canadien National aux États-Unis, à Gary, sur le lac Michigan.

La taxe frontalièr­e, d’abord proposée par les leaders républicai­ns à la Chambre des représenta­nts, vise deux objectifs: générer de nouvelles recettes fiscales qui serviraien­t ensuite à réduire les impôts aux États-Unis, et rapatrier en sol américain des emplois délocalisé­s à l’étranger. Selon la Fondation américaine de la fiscalité, cette taxe frontalièr­e pourrait rapporter jusqu’à 1100 milliards $US en 10 ans dans les coffres du gouverneme­nt.

Le président Donald Trump ne s’est cependant jamais prononcé clairement en faveur de cette taxe, qui n’obtiendrai­t pas un solide appui au Capitole. La semaine dernière, le représenta­nt démocrate John Delaney, du Maryland, estimait que cette taxe n’obtiendrai­t pas les appuis suffisants pour être adoptée au Congrès.

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MANDEL NGAN AGENCE FRANCE-PRESSE Le ministre canadien des Finances, Bill Morneau

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