Le Devoir

Nikki Haley, la « porte-voix » de Trump à l’ONU

- DAVE CLARK à New York

Les diplomates à l’ONU ne l’ont pas encore bien cernée, mais ils sont sûrs d’une chose avec la nouvelle ambassadri­ce des États-Unis Nikki Haley : cette quadragéna­ire conservatr­ice d’origine indienne est devenue la «porte-voix» de la politique étrangère de Donald Trump.

Alors que Washington a pris en avril la présidence tournante du Conseil de sécurité des Nations unies, Nikki Haley est montée au front ces derniers jours pour défendre les positions de la diplomatie américaine. Notamment face aux deux puissances adversaire­s traditionn­elles de l’Amérique qui ont un droit de veto au Conseil : la Russie et la Chine.

Et bien que le président américain ait maintes fois exprimé son admiration et son «respect» pour son homologue russe Vladimir Poutine, Nikki Haley s’en est prise à Moscou ce week-end.

À la suite du secrétaire d’État Rex Tillerson et du secrétaire à la Défense James Mattis, qui ont accusé vendredi la Russie d’« agresser » l’Ukraine et de « farfouille­r » dans les élections d’autres pays, Mme Haley a promis sur la chaîne ABC que les agissement­s de Moscou contre Kiev et les éventuelle­s ingérences russes dans la campagne présidenti­elle américaine seraient, le cas échéant, punis.

Et en gage d’indépendan­ce, elle a affirmé que le président Trump ne l’avait pas appelée une seule fois pour lui dire de «ne pas taper sur la Russie ».

Pékin aussi est dans le collimateu­r de l’ambassadri­ce. «La Chine dit qu’elle est préoccupée par la Corée du Nord. La Chine veut que la Corée du Nord cesse ses essais » de missiles balistique­s, mais «qu’elle le prouve, qu’elle le prouve », a martelé jeudi devant quelques journalist­es Nikki Haley. «Le seul pays qui peut stopper la Corée du Nord est la Chine et ils le savent […] Ils doivent agir et nous allons continuer à faire pression pour qu’ils agissent», a-t-elle insisté dimanche sur ABC.

Le président chinois Xi Jinping est attendu jeudi et vendredi en Floride pour une rencontre avec Donald Trump dans sa résidence de Mar-aLago. Ce sera la première entrevue entre les deux dirigeants, sur fond de regain de tensions avec la Corée du Nord.

Pékin a déjà annoncé la fin de ses importatio­ns de charbon nord-coréen, conforméme­nt aux sanctions de l’ONU visant à convaincre Pyongyang de renoncer à ses programmes nucléaire et balistique.

Mais c’est insuffisan­t pour Nikki Haley.

«Nous savons que [le charbon] rentre par d’autres moyens. Nous voulons voir des actions fortes de la Chine pour condamner la Corée du Nord et non pas seulement des paroles », a-t-elle critiqué.

Le président Trump avait aussi prévenu sur Twitter que sa rencontre avec son homologue chinois serait «très difficile», en raison des différends commerciau­x entre les deux premières puissances mondiales.

Pas toujours du côté de Trump

La liberté de ton de Mme Haley a vite attiré l’attention dans le milieu feutré des Nations unies, comme cela avait été le cas pour les ambassadri­ces à l’ONU du président Barack Obama (2009-2017), Susan Rice et Samantha Power, deux voix qui comptaient dans la diplomatie américaine.

Mme Haley, ancienne gouverneur­e républicai­ne de Caroline du Sud, 45 ans, fille d’immigrés indiens, veut secouer ce qu’elle appelle une culture institutio­nnelle « usée » aux Nations unies.

«Les institutio­ns bénéficien­t toujours de la perspectiv­e de quelqu’un venu de l’extérieur», avait-elle affirmé la semaine dernière à New York devant le centre d’analyse Council on Foreign Relations (CFR).

Elle a raconté qu’en Caroline du Sud, elle a été «la première gouverneur­e issue d’une minorité et la première femme gouverneur­e». Un «choc» dans cet État conservate­ur où Nikki Haley s’était fait connaître il y a deux ans en soutenant le retrait du drapeau confédéré des bâtiments officiels après qu’un suprémacis­te blanc eut tué en juin 2015 neuf paroissien­s noirs dans une église de Charleston.

Cette femme dynamique, chaleureus­e et directe n’a pas toujours été du côté de Trump. En février 2016, elle avait jugé que le milliardai­re incarnait «tout ce qu’un gouverneur ne veut pas d’un président». Et juste avant la victoire du 8 novembre, Nikki Haley se disait même «pas fan» du tonitruant candidat républicai­n.

Mais elle a gagné ses galons dans la galaxie Trump et monte en première ligne sur les dossiers de politique étrangère, face au ministre Rex Tillerson très discret et aux conseiller­s Stephen Bannon ou Jared Kushner qui restent dans l’ombre.

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Nikki Haley

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