Le Devoir

Trudeau ne convainc pas l’opposition de sa bonne foi

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa Le Devoir

Dans ce qui se voulait un avant-goût de ce qu’aurait l’air une éventuelle réforme de la procédure parlementa­ire, le premier ministre Justin Trudeau a pris la liberté de répondre à la totalité des 42 questions posées par l’opposition à la Chambre des communes mercredi. Peine perdue. Les libéraux n’auront pas convaincu l’opposition de leurs bonnes intentions, surtout maintenant qu’ils reconnaiss­ent ne pas s’engager à n’instaurer que les changement­s faisant consensus parce que cela équivaudra­it à octroyer à leurs adversaire­s un « veto » sur leurs projets.

Par tradition, le premier ministre répond tout au plus à une dizaine de questions par jour, soit seulement celles posées par les chefs de parti. Dans le cadre de la réforme parlementa­ire qu’ils envisagent, les libéraux suggèrent d’imiter la Grande-Bretagne et de réserver une période de questions par semaine au premier ministre.

« Aujourd’hui [mercredi], nous avons eu un exemple de ce qu’est une période de questions du premier ministre. On a montré que ça peut se faire. Maintenant, nous voulons savoir ce que les députés en pensent. Nous voulons connaître leur opinion, car je veux les assurer que leur opinion compte », a fait valoir après l’exercice la leader libérale en Chambre, Bardish Chagger.

Guerre de procédures

L’opposition n’a pas été impression­née. « Je voudrais remercier le premier ministre de répondre à autant de questions aujourd’hui», a lancé le néodémocra­te David Christophe­rson. «J’aimerais lui faire remarquer qu’il a réussi à le faire sans changer une seule règle. Il n’est donc pas nécessaire d’imposer unilatéral­ement des changement­s. »

Le Parlement est englué dans une guerre de procédures à cause de cette réforme envisagée. Le gouverneme­nt propose, outre l’instaurati­on d’une période de questions du premier ministre, l’abolition des séances peu achalandée­s du vendredi et l’implantati­on du vote électroniq­ue au Parlement.

Surtout, il propose de modifier l’allocation de temps de débat, ce qui aurait pour effet de limiter les moyens de l’opposition de ralentir les travaux en cas de désaccord. C’est ce dernier aspect qui déchaîne les passions.

Tentative d’apaisement

Les libéraux maintienne­nt qu’ils ne veulent que débattre de ces idées. L’opposition fait valoir que, une fois que le comité aura commencé ses travaux, les libéraux, majoritair­es, auront beau jeu de voter les changement­s de leur choix.

L’opposition trouve suspect le refus obstiné des libéraux de s’engager à ne réformer que les aspects faisant consensus. La leader en Chambre leur a donné raison hier.

«Pendant la campagne électorale, a déclaré Mme Chagger, nous nous sommes engagés à moderniser le fonctionne­ment du Parlement. […] Nous avons reçu un mandat. Je ne donnerai pas aux conservate­urs un veto sur nos promesses électorale­s. »

Dans une tentative d’apaisement, l’opposition a proposé hier au gouverneme­nt d’établir un comité réduit de quatre personnes pour débroussai­ller les idées de réforme et qui ne fonctionne­rait que par consensus. Mme Chagger refuse de considérer cette propositio­n pour l’instant.

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ADRIAN WYLD LA PRESSE CANADIENNE Les libéraux ont promis en campagne électorale de moderniser le fonctionne­ment du Parlement, mais l’opposition craint de voir ses moyens d’action limités par ces changement­s de procédure.

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