Bilan social positif, mais inégalités persistantes
Le Canada a un «bilan social comparatif» supérieur à plusieurs autres États, mais la situation est moins reluisante lorsque les indicateurs se penchent plus particulièrement sur certaines réalités comme les inégalités de revenus entre hommes et femmes, où il se classe 13e sur 16 pays étudiés.
Selon un classement publié mercredi par le Conference Board du Canada, qui se penche aussi sur la pauvreté, la « mobilité intergénérationnelle du revenu», la criminalité et le bienêtre, le Québec et le Canada obtiennent une note globale de B. Alors que les pays scandinaves obtiennent un A, le Japon et les ÉtatsUnis se contentent d’un D.
L’organisme de recherche a juxtaposé à ces indicateurs ceux de plusieurs autres pays, dont la France, la Belgique, l’Australie et l’Allemagne. Étant donné le bassin de données élargi et leur disponibilité parfois asymétrique, l’ensemble des données a été attaché à l’année 2013.
«En gros, on est au milieu du peloton», a dit en entrevue l’économie en chef du Conference Board, Craig Alexander, qui occupait autrefois cette fonction à la Banque TD. «Ce n’est pas surprenant si on pense à notre modèle économique et social. Ce n’est pas du capitalisme à l’américaine, notre filet social est plus robuste, mais nous ne sommes pas aussi généreux que certains pays européens. »
Or, l’un des points faibles pour l’ensemble canadien, et «c’est vrai au Québec aussi», c’est l’écart salarial entre les sexes, a dit M. Alexander. «Peut-être que les gens sont conscients du fait que les femmes gagnent moins que les hommes, mais lorsqu’on regarde le classement international, on est nettement sous la médiane. En d’autres termes, plus de pays ont un écart inférieur au nôtre que de pays qui font moins bien. »
Au Québec, les femmes non diplômées gagnent à peine 70% du salaire médian des hommes sans diplôme, a signalé dans un rapport l’an dernier le Conseil du statut de la femme, qui jugeait la situation «très préoccupante». Ce dernier rappelait que cette catégorie représente plus de 20% de la population féminine.
Par ailleurs, au chapitre de l’écart salarial entre immigrants et les travailleurs nés ici, le Québec se trouve dans la deuxième moitié des provinces, en compagnie des provinces de l’Ouest.
Pour ce qui est de la pauvreté en général, la plupart des provinces obtiennent un C, alors que l’Alberta obtient un A et que la Saskatchewan récolte un B. Cependant, le fait que les données soient de 2013 signifie que l’impact de la crise pétrolière n’apparaît pas dans les conclusions. Le Canada se classe 4e sur 13 pays à ce chapitre.
L’importance des indicateurs sociaux
De manière générale, a estimé M. Alexander, les indicateurs sociaux prennent de plus en plus d’importance. «Un peu partout, on voit une montée du nationalisme et de populisme, et ça fait partie de l’équation dans le vote sur le Brexit et dans l’élection de Donald Trump à la présidence américaine. Les gens estiment que leur sort économique n’est pas bon. La mondialisation et les changements technologiques entraînent des tensions, notamment dans les inégalités de revenus. »
Le peu d’attention portée aux situations sociales est directement lié à ce qui s’est produit. « Le risque économique est maintenant lié au fait de ne pas avoir abordé ces enjeux», a dit M. Alexander.
Les budgets à Québec et à Ottawa vont contribuer à réduire les inégalités, «quoique modestement», a écrit l’Institut du Nouveau Monde dans un rapport publié mardi. Ce rapport est basé sur un panel de 32 experts de divers horizons. À Québec, les mesures «ayant un impact plus important sont la construction de logements sociaux, les nouvelles sommes pour l’intégration des immigrants au marché du travail, le financement pour les autochtones, l’augmentation des bourses pour étudiants chefs de famille monoparentale et le financement pour l’égalité femmes-hommes», a-t-il précisé.