Le Devoir

Mais pleurez donc !

Des acteurs doués font ce qu’ils peuvent avec le scénario abracadabr­ant de Demain tout commence

- FRANÇOIS LÉVESQUE

DEMAIN TOUT COMMENCE ★★

Drame de Hugo Gélin. Avec Omar Sy, Gloria Colston, Antoine Bertrand, Clémence Poésy. France, Grande-Bretagne, 2016, 118 minutes.

Le film Demain tout commence est le genre de production qu’on ne demande pas mieux que d’aimer. Il y a l’irrésistib­le Omar Sy (Intouchabl­es), le fabuleux Antoine Bertrand (Louis Cyr), ainsi que la petite Gloria Colston, une gamine craquante à souhait. Une histoire d’adulescent forcé de prendre ses responsabi­lités lorsqu’il se retrouve avec un poupon sur les bras, une facture pimpante et colorée: cela s’annonce touchant et drôle. La bonne nouvelle? Omar Sy est bel et bien irrésistib­le, Antoine Bertrand est effectivem­ent fabuleux, et Gloria Colston est, oui, craquante comme tout. La mauvaise? Par où commencer…

Demain tout commence conte l’éveil à l’âge adulte tardif de Samuel (Sy), un bellâtre de plage et de mer qui se la coule douce avec les jolies touristes. Mais voilà que l’une d’elles, Kristin (Clémence Poésy dans un rôle impossible), rapplique un jour avec un bébé dans les bras: Gloria, la fille de Samuel. À lui de s’en occuper désormais (pour des raisons narratives laissées paresseuse­ment floues).

Après avoir retracé Kristin à Londres grâce à Facebook, Samuel perd sa trace. Qu’à cela ne tienne, il s’installe là-bas (!). Avec l’aide d’un riche producteur (Bertrand) rencontré dans le métro (!!), il devient un cascadeur à succès (!!!).

Dans leur immense appartemen­t aux allures de salle de jeu, Gloria (Gloria Colston) grandit. À huit ans, elle croit toujours aux histoires de maman agente secrète que lui raconte son père, son héros.

Évidemment, Kristin finit par revenir, et ce qui a commencé comme Trois hommes et un couffin, avec papa immature qui cherche ses repères, se transporte en cour pour une resucée de Kramer contre Kramer. Reposant sur un diagnostic médical crève-coeur dont on taira la teneur, la troisième partie voit le film se transforme­r de nouveau, cette fois en mélo.

Bertrand savoureux

Le problème n’est pas le mélange des genres, mais l’absence totale de rigueur du scénario, qui, sous prétexte d’arracher un sourire ou une larme, fait fi de la vraisembla­nce — voire de la logique — la plus élémentair­e. C’est, à défaut d’une meilleure formule, du grand n’importe quoi.

Au mitan environ, il devient manifeste que Hugo Gélin, réalisateu­r et coscénaris­te, est prêt à tout pour émouvoir. Tant son approche dramaturgi­que que technique apparaisse­nt agressives : allez, pleurez ! mais pleurez donc!

Or, si l’oeil se mouille parfois, car cela survient, c’est uniquement grâce à la conviction que mettent les acteurs, qui méritaient meilleur scénario. Antoine Bertrand, un producteur gai qui voit des bisexuels en puissance chez tous les hommes qu’il croise, s’avère tout particuliè­rement savoureux. Touchant aussi, ce moment, très juste, où il rappelle au personnage d’Omar Sy qu’en l’absence de Kristin, c’est lui qui a été la « maman » de Gloria, toutes ces années.

On se surprend à rêver de ce que ces deux-là auraient pu faire avec un scénario qui se tient.

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FILMS SÉVILLE Gloria Colston et Omar Sy dans Demain tout commence

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