Couillard « dramatise » le recours à la disposition de dérogation, dénonce le Parti québécois
Le Parti québécois (PQ) accuse le premier ministre Couillard de «dramatiser» le recours à la disposition de dérogation, qui permettrait au Québec de se soustraire à l’arrêt Jordan. Il est revenu à la charge dimanche pour demander au gouvernement d’agir avant que d’autres accusés ne se retrouvent libres comme l’air.
«C’est une erreur de jugement de la part de M. Couillard de dramatiser la clause, ce qui rend son application plus difficile politiquement, a déclaré le chef de l’opposition, Jean-François Lisée, lors d’un point de presse à Montréal. Il devrait plutôt reconnaître que c’est un outil qu’on utilise parfois en dernier recours. Mais les derniers recours, ça arrive, et on en est là.»
«Arme nucléaire»
Samedi, le premier ministre Couillard a indiqué qu’il n’envisageait pas d’invoquer la disposition de dérogation, du moins à court terme, en soulignant qu’elle est l’équivalent d’une « arme nucléaire en matière constitutionnelle».
Il exige plutôt qu’Ottawa nomme rapidement 14 juges aux postes vacants à la Cour supérieure du Québec, une demande que la ministre québécoise de la Justice, Stéphanie Vallée, a formulée à plusieurs reprises au cours des derniers mois.
Pression supplémentaire
« Nous en appelons au sens des responsabilités du premier ministre d’écarter son hésitation, peut-être idéologique, à utiliser la clause dérogatoire», a affirmé M. Lisée, entouré de la porte-parole de son parti en matière de justice, Véronique Hivon, et de représentantes de groupes de défense de victimes ou de familles de victimes.
Le PQ demande depuis novembre dernier au gouvernement Couillard d’envisager l’utilisation de la disposition de dérogation de la Constitution canadienne pour éviter que des procès avortent en raison de délais judiciaires excessifs. Le parti accentue la pression depuis jeudi, alors qu’un premier procès pour meurtre a été annulé au Québec en vertu de l’arrêt Jordan.
Agir rapidement
«La négligence dont fait l’objet le système de justice depuis trop longtemps ne doit pas avoir pour effet aujourd’hui d’abandonner les victimes à leur sort, a fait valoir la députée Véronique Hivon. Il faut que le fédéral nomme de toute urgence ces juges à la Cour supérieure, mais on ne peut pas se dire qu’en attendant que ça produise des résultats, on reste les bras croisés et qu’à chaque jour qui passe, il y ait d’autres accusés qui soient libérés.»
Samedi, la Coalition avenir Québec a pour sa part réclamé une rencontre d’urgence des ministres de la Justice de toutes les provinces canadiennes pour répondre aux impacts de l’arrêt Jordan.
Cet arrêt de la Cour suprême du Canada a établi en juillet dernier les limites des délais judiciaires jugés raisonnables: 18 mois pour un procès dans une cour provinciale, et 30 mois dans les cours supérieures.
La ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould, a répondu à la demande de la CAQ en annonçant dimanche que les ministres de la Justice du fédéral, des provinces et des territoires se rencontreront au plus tard ce mois-ci pour « discuter des effets de l’arrêt Jordan et des réponses possibles à la question des délais au sein du système de justice».